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Macron nomme Bayrou à Matignon pour tenter de dénouer la crise politique

Emmanuel Macron a nommé vendredi François Bayrou Premier ministre, un défi immense pour le président du MoDem et premier allié du président, chargé de dénouer la crise politique majeure ouverte par la dissolution et aggravée par la censure de Michel Barnier.

Wojtek RADWANSKI - AFP

Emmanuel Macron a nommé vendredi François Bayrou Premier ministre, un défi immense pour le président du MoDem et premier allié du président, chargé de dénouer la crise politique majeure ouverte par la dissolution et aggravée par la censure de Michel Barnier.

"Il y a un chemin à trouver qui réunisse les gens au lieu de les diviser. Je pense que la réconciliation est nécessaire", a brièvement déclaré aux journalistes le nouveau Premier ministre qui devrait en dire davantage lors de la passation de pouvoirs prévue à 17H00.

La nomination du dirigeant centriste est intervenue à la mi-journée, après une nouvelle matinée d'intenses spéculations et de bras de fer en coulisses. François Bayrou avait été reçu à 08H30 à l'Élysée pour un entretien de près de deux heures, suivi d'un long silence radio.

A 73 ans, comme son prédécesseur Michel Barnier renversé le 4 décembre par l'Assemblée nationale lors d'une censure inédite depuis 1962, M. Bayrou devient le sixième locataire de Matignon depuis la première élection d'Emmanuel Macron en 2017.

Une tâche redoutable attend rue de Varenne le maire de Pau. Avec pour priorité le budget pour 2025, laissé en suspens par la censure.

Dans un contexte de colère des agriculteurs et de multiplication des plans sociaux, le niveau du déficit et de la dette sera "une réalité qui s'imposera à tout gouvernement, quel qu'il soit", a prévenu Michel Barnier.

En attendant que ce nouveau budget soit adopté, un projet consensuel de loi spéciale permettant d'éviter une paralysie de l'Etat sera examiné lundi par l'Assemblée nationale.

- "Gouvernement d'intérêt général" -

Cette nomination intervient trois jours après une réunion inédite des dirigeants des partis, hors Rassemblement national et La France insoumise, sous l'égide du chef de l'État.

L'ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve à Guidel, le 29 septembre 2024 dans le Morbihan

L'ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve à Guidel, le 29 septembre 2024 dans le Morbihan

FRED TANNEAU - AFP/Archives

Où se sont esquissés les contours d'un "accord de coopération démocratique", selon la formule de M. Bayrou mardi: le gouvernement s'engagerait à ne pas recourir au 49.3 pour imposer ses lois, les opposants à ne pas le censurer, Emmanuel Macron évoquant de son côté son intention de ne pas dissoudre à nouveau l'Assemblée.

Le nouveau Premier ministre, qui "s'est imposé" comme "le plus consensuel", "aura pour mission de dialoguer" avec ces mêmes partis, des communistes à la droite, "afin de trouver les conditions de la stabilité et de l'action", a déclaré l'entourage du président. Ce dernier l'a chargé de former un "gouvernement d'intérêt général", "resserré".

Même si le centriste a régulièrement distillé des critiques contre la politique -trop à droite- et la pratique du pouvoir -trop personnelle- de son allié, ce ne sera donc pas une cohabitation, comme la gauche le réclame depuis les élections législatives.

Comme prévu, le Nouveau Front populaire ne participera pas à ce gouvernement. Mais il se divise sur le degré de critiques envers François Bayrou.

LFI déposera ainsi dès que possible une motion de censure, son coordinateur Manuel Bompard qualifiant ce choix de "nouveau bras d'honneur à la démocratie".

Pour prix de leur non-censure, les socialistes demandent de leur côté à François Bayrou à s'engager à renoncer au 49.3 et à procéder à une "réorientation de la politique gouvernementale". Les communistes ont exprimé une position voisine.

Entre les deux, la patronne des écologistes Marine Tondelier a listé ses exigences, dont la sortie du gouvernement de Bruno Retailleau, actuel ministre de l'Intérieur à la ligne très droitière. Son parti, Les Républicains, devrait quant à lui arrêter sa position dans l'après-midi.

Roland Lescure, ex-ministre de l'Industrie, le 3 juillet 2024 à Paris

Roland Lescure, ex-ministre de l'Industrie, le 3 juillet 2024 à Paris

Ludovic MARIN - AFP/Archives

Côté RN, "il n'y aura pas de censure a priori", a dit son président Jordan Bardella, même si Marine Le Pen a prévenu qu'un "prolongement du macronisme" avec François Bayrou "ne pourrait mener qu'à l'impasse".

- Autres noms jusqu'au bout -

Le centriste a finalement été préféré à d'autres noms qui ont circulé jusqu'au bout, comme celui de l'ex-Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve ou du ministre des Armées Sébastien Lecornu, de l'aile droite de la macronie.

Le premier secrétaire du PS Olivier Faure arrive à l'Elysée pour une rencontre avec le président Emmanuel Macron, le 10 décembre 2024 à Paris

Le premier secrétaire du PS Olivier Faure arrive à l'Elysée pour une rencontre avec le président Emmanuel Macron, le 10 décembre 2024 à Paris

Thomas SAMSON - AFP

Jeudi, c'est le profil de l'ex-ministre de l'Industrie Roland Lescure, un macroniste social-libéral, qui a été poussé par le secrétaire général de l'Elysée Alexis Kohler, selon plusieurs sources proches des consultations. Mais la droite et le RN sont montés au créneau pour lui faire barrage.

C'est une arrivée à Matignon aux allures de consécration particulière pour le lointain ministre de l'Éducation (1993-1997) depuis longtemps tourné vers la plus haute fonction: inlassable défenseur d'un centre indépendant, François Bayrou a été trois fois candidat à l'élection présidentielle de 2002 à 2012, sans parvenir au second tour (18,57% en 2007).

Son alliance avec Emmanuel Macron en 2017 a dégagé la voie pour l'élection du plus jeune président de l'histoire de France, porteur d'un "en même temps" droite-gauche en phase avec son projet politique.

Mais le Béarnais, nommé ministre de la Justice, n'est resté que 34 jours place Vendôme en 2017, empêché par l'affaire des assistants parlementaires du MoDem, jugée en première instance sept ans plus tard, en février 2024. Si le parti a été lourdement condamné, François Bayrou a été relaxé, mais le parquet a fait appel.

Par Baptiste PACE, Francesco FONTEMAGGI, Anne RENAUT / Paris (AFP) / © 2024 AFP

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