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Crash des ventes électriques : la fin d’un rêve ?

Par Jean-Luc Moreau

Le mois d’août 2024 a été marqué par une chute de 24 % du marché automobile en France, un recul qui touche l’ensemble des segments, y compris les véhicules électriques. Ces derniers ont enregistré une baisse spectaculaire de 33,3 % des immatriculations. Ce phénomène, loin d’être propre à la France, s’étend à l’Europe et à d'autres régions du monde. Depuis le début de l’année, les ventes de voitures électriques et hybrides rechargeables affichent un net repli. Que se cache-t-il derrière ce retournement inattendu ?

illustration voiture électrique

Une baisse mondiale qui interpelle

Le marché des véhicules électriques montre des signes d’essoufflement. L'Europe, continent pionnier sur la voiture électrique, a vu les immatriculations de véhicules reculer chaque mois. Des marchés comme la Chine et les États-Unis subissent également cette tendance baissière. Le phénomène ne touche pas seulement les voitures électriques, mais aussi les voitures hybrides rechargeables, longtemps considérées comme une solution intermédiaire vers la mobilité zéro émission.

Une étude récente du cabinet McKinsey a révélé que 46 % des propriétaires américains de véhicules électriques envisagent de revenir à une motorisation thermique. Massivement observé chez les propriétaires de Tesla, ce désaveu s’explique en grande partie par la politique tarifaire agressive de la marque, qui a profondément déstabilisé le marché de l'occasion. On trouve désormais de nombreux acheteurs qui hésitent à investir dans des véhicules neufs, craignant une forte décote – parfois jusqu’à 50 % en deux ans !

Le coût élevé des véhicules électriques reste l’un des principaux freins à leur adoption (40 990 euros pour une Tesla Model Y Propulsion, 33 490 euros pour une Renault R5 électrique avant bonus, 23 550 euros pour une Peugeot 208 Hybrid 100 e-DCS6 Active). Malgré les efforts relatifs des constructeurs, les prix des véhicules n’ont pas baissé comme le grand public pouvait s'y attendre. Plusieurs facteurs justifient ce prix encore trop élevé : l’augmentation des coûts des matières premières indispensables à la fabrication des batteries, notamment le lithium et le cobalt. Autre facteur, les aides publiques à l’achat (les fameux bonus) qui avaient favorisé l’essor de la voiture électrique dans de nombreux pays, commencent maintenant à diminuer, rendant ces véhicules de moins en moins accessibles.

Enfin, les coûts de recharge s'ajoutent à la frustration des consommateurs (en particulier ceux qui parcourant des longues distances), notamment dans les régions où les crises énergétiques ont fait grimper les prix de l’électricité.

Autonomie des batteries et des infrastructures de recharge insuffisantes

Malgré des progrès technologiques concrets, l'autonomie des véhicules électriques reste une source d’inquiétude pour de nombreux utilisateurs. Même si les nouvelles générations électriques proposent des autonomies de plus en plus importantes, l’« anxiété de la recharge » (traduction anglaise littérale de"range anxiety") est toujours présente. Ce phénomène est accentué par l'irrégularité du réseau de bornes de recharge, qui peine à suivre la demande, en particulier dans certaines régions provinciales d’Europe et du monde.

Les bornes de recharge rapide, pourtant promises comme une solution, sont encore trop rares ou souvent hors service. Ce manque d'infrastructures de qualité pousse certains automobilistes à réévaluer leur choix, notamment ceux qui envisagent de longs trajets ou qui habitent dans des zones moins bien équipées.

Pour rendre les véhicules électriques plus abordables, une des solutions consisterait à modifier la chimie des batteries. Passer du NMC (nickel, manganèse et cobalt) au LFP (pour lithium, fer et phosphate) permettrait de réduire les coûts. Cependant, toutes les gigafactories européennes ont été conçues pour produire des batteries NMC. Changer de technologie en cours de route pourrait perturber la production et décourager les acheteurs potentiels.

Une décision politique instable

Cette adaptation, perçue comme un signe d’instabilité, illustre les limites de la « monoculture » électrique. Le basculement rapide vers une mobilité 100 % électrique, prôné par les gouvernements, rappelle l’erreur passée d’avoir voulu faire rouler toute l'Europe au diesel, une transition qui, rétrospectivement, s’est avérée coûteuse et mal gérée.

L’ambition de l’Union Européenne de bannir les véhicules thermiques d'ici 2035 semble de plus en plus complexe. Bien que l’électrique soit perçu comme l’avenir de la mobilité, la technologie actuelle peine encore à convaincre une partie importante des automobilistes. Entre l’autonomie limitée, la cherté des véhicules, et la lenteur du développement des infrastructures, la route vers le tout électrique paraît semée d'embûches.

L’étude de McKinsey, qui révèle qu’une grande partie des propriétaires de véhicules électriques envisagent de revenir aux moteurs thermiques, montre bien que la transition vers l’électrique ne fait pas l’unanimité. Pour beaucoup, le rêve d’une mobilité propre se heurte à des réalités économiques et pratiques.

Une transition à affiner

La chute des ventes de véhicules électriques et hybrides rechargeables met en lumière les difficultés d'une transition trop rapide. Bien que l'électrification du parc automobile soit nécessaire pour atteindre les objectifs environnementaux, elle ne peut se faire sans une meilleure planification et des efforts supplémentaires pour rendre la voiture électrique accessibles à tous. La clé de cette transition réside dans une approche plus nuancée, combinant plusieurs technologies pour répondre aux besoins variés des consommateurs.

Retrouvez On Parle Auto, présenté par Jean-Luc Moreau et Laurence Péraud, tous les samedis matins de 10h à 12h. Vous pouvez également écouter les podcasts de l’émission et consulter les essais automobiles sur l’application Sud Radio et sur sudradio.fr.

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