Comme l'explique Jérôme Pauzat, la démocratie, ce n'est pas simplement l'organisation du pouvoir par le vote, c'est aussi la soumission du pouvoir au droit.
Jérôme Pauzat : "Le devoir d'exemplarité, c'est ce devoir de probité qui est exigé et qui a une valeur constitutionnelle"
La juge évoque le "trouble à l'ordre public démocratique". De quoi s'agit-il ? "On voit bien dans la progression du raisonnement que les collègues se sont basés sur les questions prioritaires de constitutionnalité qui ont déjà été posées par le passé, qui ont été entendues par la Cour de cassation, avec la décision du Conseil constitutionnel du 28 mars 2025. L'ordre public démocratique, ça renvoie à ça. C'est-à-dire que le Conseil constitutionnel a bien dit que l'exécution provisoire de la peine d'inéligibilité contribuait à renforcer l'exigence de probité et d'exemplarité des élus et la confiance des électeurs dans leurs représentants. C'est ça, l'ordre public démocratique. C'est ce devoir d'exemplarité, c'est ce devoir de probité qui est exigé et qui a une valeur constitutionnelle. C'est pour ça qu'il passe avant le reste", a répondu Jean François Blanco.
Mais quand même, sur l'incohérence du fait de dire 'il y a l'ordre public démocratique, on a le droit de voter', ce peuple qui doit avoir le choix… et de l'autre côté interdire la représentante d'un parti connu de tous avec ce poids électoral qu'on connaît… n'y a-t-il pas là un vrai problème ? "Non, parce que, justement, la légitimité démocratique n'enlève pas la légitimité juridique. C'est-à-dire que si vous voulez la démocratie, ce n'est pas simplement l'organisation du pouvoir par le vote, c'est aussi la soumission du pouvoir au droit. Il faut que les deux coïncident. Sauf que là, il y en a un qui coïncide pas puisque Marine Le Pen a été condamnée pour détournement de fonds publics. Donc, elle a trahi la confiance des électeurs. Donc, le législateur a dit : 'Dans ce cas-là, je suis désolé, mais, mesdames et messieurs les électeurs, on ne peut pas vous donner au suffrage quelqu'un qui a triché et qui a trahi votre confiance'", a réagi Jean François Blanco.
Ghislain Benhessa : "François Bayrou a toujours été le pape de la moralisation de la politique"
Ce n'est pas la faute à la justice, c'est peut-être la faute de la manière dont la justice se fait en France, avec ce pouvoir des juges de lire le droit et de donner une interprétation par rapport à la loi telle qu'elle est ? "Admettons que le juge n'a pas retenu l'inéligibilité et que nous envisagions donc la condamnation de Marine Le Pen sans l'exécution provisoire. Les Français auraient un regard sur les malversations et la nature de Marine Le Pen, sa qualité en se disant : 'est-ce que finalement j'ai envie de voter pour elle ou non ?'. Le débat autour d'elle aurait une autre teneur, puisque le spectre de son absence n'aurait pas pesé. Cela rebat les cartes. Et si les cartes sont rebattues, c'est parce qu'une décision a été rendue", a réagi Ghislain Benhessa.
Pour Ghislain Benhessa, ce jugement dans l'affaire Marine Le Pen marquera sans aucun doute le temps de François Bayrou en tant que Premier ministre. "Vous savez, François Bayrou a toujours été le pape de la moralisation de la politique. Ce qui me fait sourire quand même, c'est que François Bayrou, on le retiendra que pour ça. Pour l'instant, François Bayrou, c'est un spectre. Il ne laissera pas un bilan. Le Premier ministre qu'il est, on ne peut pas dire qu'il va laisser une trace dans les mémoires françaises. Mais en tout cas, la moralisation de la vie publique est associée à François Bayrou."
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