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Pour Bertrand Saint-Germain, il n'y a "pas de lien direct entre le port d'armes et les tueries"

Par Adélaïde Motte

Détention et port d'armes : André Bercoff en parle avec Bertrand Saint-Germain sur Sud Radio le 8 février 2024.

armes
Bertrand Saint-Germain, invité d’André Bercoff dans "Bercoff dans tous ses états” sur Sud Radio.

Bertrand Saint-Germain, docteur en droit, auteur de “(P)rendre les armes”, éditions Le Polémarque, faisait la promotion de son livre dans le Face-à-Face d'André Bercoff.

"Tout le monde dit qu'il est naturel que l'homme puisse se défendre"

Bertrand Saint-Germain rappelle que l'interdiction du port d'arme est plus aberrante que l'inverse, en citant notamment l'exemple de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qui a failli inclure le port d'armes. "Il avait été question, Mirabeau l'avait proposé, de garantir que les hommes puissent avoir une arme, on lui a dit 'non c'est pas la peine, parce que c'est évident, la résistance à l'oppression dit que nécessairement vous devez avoir une arme pour vous protéger'". "D'Aristote jusqu'à Voltaire et Rousseau, tout le monde dit qu'il est naturel que l'homme puisse se défendre." Selon bien des philosophes, les armes permettent notamment de garantir la légitime défense individuelle, qui, selon Cicéron "est la nature même.Le port d'arme permet aussi "la résistance à la tyrannie". "Un État sans limites peut faire n'importe quoi, la limite que peut rencontrer le gouvernement, c'est des citoyens armés". "C'est gênant de rappeler qu'avec toutes leurs différences, on a cette constance de tous les penseurs, de tous les philosophes. Le citoyen, c'est un être de raison, il doit avoir le droit de se défendre."

Le port d'armes permet aussi de combler une défaillance de l'État. "L'État assure la sécurité, on renonce à se faire justice soi-même, sauf la légitime défense. Si l'État n'arrive plus à assurer cette mission au quotidien, si l'État n'assure plus, ou plus suffisamment, la sécurité des citoyens, ce qui est sa raison d'être, il est illégitime qu'il empêche ceux qui le souhaitent de se défendre eux-mêmes." Bertrand Saint-Germain cite notamment le cas de Charb, dessinateur tué lors des attentats de Charlie Hebdo, qui avait demandé l'autorisation de porter une arme sur lui en raison des menaces qu'il recevait, une autorisation accordée à "moins de dix personnes par an". Étant tireur sportif, "Charb avait des armes, il demandait l'autorisation de les porter, de les transporter." Il estimait donc qu'il n'avait pas besoin de la protection policière qui lui était accordée et pouvait se protéger seul. "On lui a refusé cette faculté en estimant qu'il n'avait pas assez de risques qui s'imposaient à lui."

"C'est une fausse bonne idée d'interdire le port d'armes"

Quant aux risques liés à une autorisation du port d'armes, Bertrand Saint-Germain les réfute. "L'actualité nous montre tous les jours que les déséquilibrés accèdent aux armes", remarque-t-il. "Il y a un exemple tout simple, c'est la Suisse, c'est le troisième pays qui dispose du plus d'armes au monde au regard de sa population, il n'y a pas de tueries de masse en Suisse." En Suisse, après un service militaire de plusieurs années, ceux qui le souhaitent "ramènent leur fusil d'assaut à la maison." Quant aux soldats en exercice, "on leur demande d'aller au club de tir du village et de tirer". "Il y a des suivis psychiatriques, un examen, si ces éléments-là sont validés, on peut tout à fait envisager qu'un citoyen qui le souhaiterait puisse avoir des armes."

La France n'est pourtant pas un Far-West, et on se demande comment éviter cet écueil. Bertrand Saint-Germain détaille donc la situation mal connue des États-Unis. "Il n'y a pas de législation fédérale en matière d'armes, ce sont les États qui font leur propre législation. Quand on regarde le détail de la criminalité américaine, on a eu à peu près à 150 tueries de masse depuis 1980." Or, "l'État qui connaît le plus de tueries de masse (à partir de quatre morts), c'est la Californie. Or, la Californie est l'État américain où la législation est la plus stricte sur le port d'armes. Donc c'est pas un lien direct entre le port d'armes et ces tueries." Au contraire, comme l'explique Beccaria, "le premier pénaliste, l'inventeur de la criminologie moderne, en 1750", "c'est une fausse bonne idée d'interdire le port d'armes parce que les criminels ne respecteront jamais ces lois, on va désarmer les honnêtes gens et les livrer aux criminels."

"Même ce qui n'est pas une arme peut être considéré comme une arme par destination"

Alors pourquoi le port d'armes est-il interdit en France ? Tel n'a pas toujours été le cas, il était autorisé jusqu'au début du XXe siècle. "Les forces de police et le gouvernement n'ont jamais vu ça d'un très bon œil, à partir des années 20, il y a quantité de mesures qui sont faites". "Après Vichy arrive, interdit les armes, demande qu'on vienne les livrer en préfecture. À la Libération, le régime restrictif est maintenu, depuis cette date, il est interdit en France d'avoir des armes, avec des dérogations pour les chasseurs, les tireurs sportifs, les collectionneurs". "On sait que si on est agressé chez soi, on est dans une hypothèse de la légitime défense privilégiée, la loi le permet. L'idée c'est d'aller plus loin, les gens sont agressés chez eux, il faut avoir les moyens de se défendre, pour ceux qui veulent protéger sa famille."

"L'idée de la légitime défense privilégiée, c'est que si quelqu'un rentre la nuit dans le domicile, il y a une présomption de légitime défense. Ensuite, si l'arme est détenue illégalement, vous pouvez être poursuivi pour ça. S'il y a des blessures physiques, vous serez naturellement mis en examen et là, les circonstances vont être examinées." Face aux potentiels délinquants et criminels à la recherche d'une victime, "savoir qu'en face de lui, il peut croiser des gens armés qui vont riposter, ça à tendance parfois à lui remettre un peu d'équilibre psychologique, il y a une résistance au passage à l'acte." Aujourd'hui, même le transport d'une bombe lacrymogène est proscrit : "ça rentre dans les armes de quatrième catégorie, port et transport interdit". "Même ce qui n'est pas une arme peut être considéré comme une arme par destination."

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Retrouvez “Le face à face” d’André Bercoff du lundi au jeudi  à 13h dans Bercoff dans tous ses états Sud Radio.

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