Jean-Baptiste Noé est géographe. Rédacteur en chef de la revue Conflits, il plaide en faveur de la réhabilitation de la géopolitique. Mais de la vraie géopolitique. Explications.
"La géopolitique est une méthode d’analyse"
"Le terme géopolitique est revenu à la mode dans les années 80 avec un autre géographe Yves Lacoste. Mais aujourd’hui c’est un terme que l’on emploie un peu à tort et à travers. Comme tous les mots que l’on emploie beaucoup, c’est un terme qui finit par perdre de sa valeur. Et aujourd’hui on confond souvent géopolitique et relations internationales. Dans la géopolitique, la dimension géographique est fondamentale" explique Jean-Baptiste Noé, rédacteur en chef de la revue Conflits, auteur de Le déclin du monde géopolitique des affrontements et des rivalités en 2023, publié aux éditions de l’Artilleur.
"La géopolitique n’est pas une discipline, mais une méthode d’analyse. On prend plusieurs disciplines, et avec ça, on essaie de comprendre comment s’effectuent des rapports de force" ajoute-t-il sur Sud Radio. Citant Thucydides et Xenophon dans son dernier livre, Jean-Baptiste Noé nous rappelle que les auteurs antiques nous rappellent "qui nous sommes". "Ce sont des historiens, des généraux, des hommes politiques, qui ont écrit la guerre du Péloponnèse et la guerre contre les Perses. Ils ont compris à travers leur quotidien quelle était la nature de l’homme" lance-t-il.
Ce qu’il nous faut pour comprendre qui nous sommes
Nos hommes politiques devraient lire ces auteurs classiques, estime Jean-Baptiste Noé. "On est le fruit de ce que l’on a mangé, de ce qu’on a lu. On se prive d’un trésor. Il existe un trésor à redécouvrir. C’est notre héritage. Nous en avons besoin pour former notre pensée, pour comprendre le monde dans lequel on vit" précise ce professeur en licence. "Ce que j’essaie de faire, c’est d’expliquer que l’homme a un passé. Et que s’il veut avoir un futur, il doit redécouvrir son passé. C’est cela qui donne une dimension profonde au présent, qui permet de résoudre la crise identitaire qui est la nôtre".
Revenant sur les nombreuses guerres, y compris celles dont on parle très peu, Jean-Baptiste Noé rappelle le point de départ de tous les conflits. Ce que les auteurs grecs appellent "l’ubris", ce besoin de se sentir supérieur à son voisin, et de vouloir le contrôler, ou lui imposer telle ou telle chose, y compris un mode de vie, y compris des "droits", comme ceux de l’Homme. Une critique actuelle de l’universalisme en somme.