"J’avais envie de laisser quelque chose, dans l’analyse si vous voulez, de ce quinquennat d'Emmanuel Macron qui est un quinquennat très étrange", explique Françoise Degois. "Cela a été un quinquennat difficile, douloureux pour moi, en tant qu’éditorialiste politique avec ma tendance politique. Mais aussi avec mon regard à moi, qui est peut-être très social, qui a envie de faire attention à tout le monde et pas seulement au cercle élitaire".
"Ce quinquennat a été très éprouvant. Il était éprouvant socialement, mais également psychologiquement. Il y a eu notamment des ordres et des contre-ordres permanents, une manière de gouverner qui alterne les gifles et les caresses, très verticale et une façon de brouiller les pistes. Je suis pour le matin, je suis contre l'après-midi et je suis entre les deux le soir. C’est une façon de gouverner qui est assez perverse et je voulais raconter cela à travers la personnalité de ce président dont je considère qu’il n’a pas d’amis", juge Françoise Degois.
Emmanuel Macron est "quelqu'un de profondément ambigu"
"Je pense que c’est plus qu’un abécédaire du macronisme, je pense que l’abécédaire ne voulait pas dire ce que je voulais écrire", explique Françoise Degois à propos de son livre L'homme qui n'avait pas d'amis. "Je voulais dire que c’est la première fois que l’on a eu un président ainsi, jeune, brillant et technicien de Bercy", continue-t-elle.
"D’un autre côté, on a quelqu’un d'extrêmement, pas complexe, mais profondément ambigu", juge-t-elle. "Je pense que ce quinquennat est marqué, plus que tout autre, par la personnalité de ce président. C’est pour ça que j’ai dit ‘l'homme qui n’a pas d’amis’, cela veut dire, en gros, que les Français ne sont pas ses amis. La France est une start-up, on la gère comme une entreprise et on engueule les salariés assez régulièrement", explique l’éditorialiste au micro de Sud Radio.
"Il inscrit ses pas dans ceux des rois de France"
"Cela fait des années que j’observe la vie politique. Je la vis mais je l’ai organisée aussi. J’ai travaillé avec François Hollande et Ségolène Royal. Je fais partie des gens, je le dis aussi, qui sont allés voter pour Emmanuel Macron pour faire barrage à Marine Le Pen. Et à 22h32, lorsque je pars sur un plateau pour faire cette soirée électorale, je vois ces images" d’Emmanuel Macron au Louvre, raconte-t-elle. "Je comprends le malentendu, qu’à un moment donné Emmanuel Macron a déjà oublié qui l’a fait roi. Il a déjà oublié que 61% des Français n’ont pas voté pour lui par adhésion mais pour faire barrage à Marine Le Pen", explique-t-elle.
"Je suis frappée par le choix du Louvre. Vous savez, le Louvre c’est une histoire royale. Certaines personnes ont comparé ça avec Mitterrand et le Panthéon. Mais quand Mitterrand marche dans le Panthéon, il inscrit son pas dans l’histoire de France. Il inscrit ses pas dans ceux de Jaurès, de Schœlcher qui a aboli l’esclavage, il met ses pas dans les pas d’une histoire collective", raconte Françoise Degois. "Emmanuel Macron met ses pas dans les rois de France. Je le vois marcher, il n’y a pas un sourire, il n’y a pas d'allégresse, on dirait le Premier consul. Je pense que toute sa personnalité, non pas dans sa complexité mais dans sa dureté, est dans cette soirée du Louvre. J’ai été heureuse de pouvoir le retranscrire tel que je l’avais senti en mai 2017", explique-t-elle.
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