Patrick Forestier, grand reporter auteur de “Poutine contre la France”, aux éditions Le Cherche Midi, est l'invité du Face-à-Face d'André Bercoff pour analyser la présence de la Russie en Afrique.
Lybie : "On y est allé un peu naïvement"
Patrick Forestier, grand reporter, a longuement étudié la présence de la France en Afrique et son remplacement par la Russie. Il a notamment vu, pendant la guerre de Lybie, la distribution d'armes "de tous calibres". "On a vu une caverne d'Ali Baba gorgées d'armes. Les gens se servaient, les barbus, les trafiquants, toutes ces armes se sont dispersées dans le pays et ont mis le feu à la moitié de l'Afrique." Pendant ce temps, les Français commençaient leur mission aux Mali et ont "vu venir ces Touaregs armés jusqu'aux dents." Patrick Forestier déplore ainsi un manque d'anticipation. "On n'avait pas bien appréhendé que la Lybie est une agrégation de tribus", tribus que Kadhafi faisait tenir par le bâton. "On y est allé un peu naïvement, voilà ça nous a échappé."
La présence de la France en Afrique n'a pas été que militaire. Elle a également construit. "Nous, c'était les routes, les écoles. Les produits pas tellement, sauf au Niger où il y avait l'uranium. Il aurait fallu d'ailleurs s'en apercevoir et couper peut-être le cordon ombilical". "Nos entreprises ont du mal à travailler là-bas parce qu'il n'y a pas grand-chose." En Afrique, les routes intérieures sont peu développées, et le continent fonctionne grâce au téléphone portable. "Internet marche en Afrique, le portable marche partout, pour les Africains les plus reculés, c'est formidable."
La Russie réalise des "produits de propagande anti-français"
Aujourd'hui, la présence française en Afrique est réduite comme peau de chagrin, et la Russie l'a remplacée. Poutine a pour cela usé de plusieurs moyens. "Il a phagocyté les hauts fonctionnaires", sans oublier les dessins animés de propagande. Ces contenus sont principalement dirigés contre la France. "On est le diable, des voleurs, on est sournois, on vient dévaliser les richesses de l'Afrique. On est avec les rebelles, on est même avec les djihadistes. Ils ont réussi à renverser le récit, c'est une méthode soviétique. Une réalité, on la transforme à sa sauce, on n'a pas riposté sur ce terrain-là, c'est pas nos méthodes."
La Russie est donc aujourd'hui bien implantée en Afrique. Quant à l'Ukraine, Patrick Forestier doute beaucoup de l'issue de la guerre. "Aujourd'hui, on peut dire qu'il y a zéro à zéro. L'Ukraine est fatiguée, usée, le moral commence à peser mais de là à franchir le pas, je ne pense pas que ce soit mûr." Sans oublier que les Russes eux-mêmes ne sont "pas folichons". "Des guerres de cette ampleur, ça prend des années."
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