Ils font régulièrement la Une de l’actualité. Tout le monde en parle, et pourtant, personne n’a l’impression qu’une solution émerge. Il s’agit bien évidemment des quartiers dits sensibles, des banlieues. La question sécuritaire est au cœur de la campagne électorale pour l’élection présidentielle. L’un des enjeux sécuritaires, ce sont bien sûr ces zones de non-droit. Que s’y passe-t-il vraiment ? Comment y-vit-on ? Sud Radio vous emmène en immersion dans ces banlieues.
Ne pas cacher ces banlieues
Stanislas Poyet les connaît bien. Il a passé plusieurs mois à écumer ces quartiers sensibles. Le journaliste a rencontré les gens qui y vivent. Il a été confronté à la violence, à la drogue et à la précarité. De Roubaix à Marseille en passant par Toulouse, Rennes ou encore Vénissieux, il donne la parole, dans son dernier livre, Défense d’entrer (éd. du Rocher), à tous les acteurs de ces banlieues, qu’ils soient policiers, mères de famille, dealers, bailleurs HLM ou travailleurs sociaux.
"Quand on va dans ces quartiers, on y trouve ce qu’on a envie d’y trouver. Beaucoup de choses que l’on décrit sont là. La drogue est là. La pauvreté est là. Le mal-logement est là. L’islamisme est là. Quand on se confronte à la réalité, on voit que c’est plus compliqué. Il y a de l’espoir. Il y a des gens qui se battent, qui travaillent, qui se lèvent tôt, qui en veulent. Je ne dis pas que tout est perdu. Je dis simplement que ce sont des territoires où c’est difficile de rentrer, de s’en sortir. Et l’idée n’est pas de les cacher", explique-t-il au micro d’André Bercoff.
Les banlieues, un espace très masculin
Le journaliste brosse plusieurs sujets d’importance dans ces zones. Parmi eux, la drogue. Une économie colossale qui fait vivre une partie des gens qui habitent dans ces zones. "Quand on se rend dans ces quartiers, c’est la première chose qui choque. C’est physiquement visible. C’est à la vue de tous. Beaucoup d’argent se brasse dans ces endroits et on ne rigole pas. Les gens bossent. Si on veut discuter avec ces gens-là, il faut y aller très doucement. Il faut passer par quelqu’un, qui nous présente, etc.", ajoute Stanislas Poyet. Ce dernier a consacré un an à son enquête. Un travail effectué à petits pas, en y allant, régulièrement, en y retournant régulièrement, afin de gagner la confiance des habitants de ces banlieues sensibles.
Pour un certain nombre de ces habitants, ces quartiers, c’est leur planète. L’endroit qui les enracine et qui les structure. "C’est une forteresse mentale. C’est un endroit où on n’entre pas, mais où on en sort très peu. L’extérieur est hostile. Il y a la réalité de la discrimination. Surtout pour les hommes. C’est moins le cas pour les jeunes filles qui sortent beaucoup plus. Le quartier est un espace très masculin. On le voit dans les médias. Ce sont les hommes qui s’expriment", lance Stanislas Poyet sur Sud Radio.
La prison ou le cercueil
Véritable univers parallèle, ces quartiers sont vecteurs de grande pauvreté, même si l’économie parallèle permet de gagner des sommes plutôt considérables en peu de temps. "Les revenus de la drogue varient énormément en fonction des personnes qui y travaillent. Les petites mains ne travaillent pas tous les jours", précise le journaliste. Néanmoins, ce genre d’activité pousse les plus jeunes à décrocher du système scolaire. "Comment voulez-vous donner envie à un jeune d’aller à l’école, d’apprendre un travail lorsqu’il peut gagner de l’argent facile ? À long terme, ils savent bien que ce n’est pas malin, qu’à terme, c’est la prison ou le cercueil. Mais quand on a quinze ans, on ne pense pas aussi loin", ajoute Stanislas Poyet.
"Quand vous discutez avec des jeunes, ils n’ont pas le désir de changer le monde. Ils n’ont pas de rêve. Ou bien une vie tranquille, posée. Ou encore, devenir footballeur. On rêve peu dans ces quartiers. Si ce n’est faire du pognon vite et bien et s’enfuir à Dubaï, pour certains. C’est très différent par rapport à leurs parents. Il y a une vraie rupture générationnelle", explique le journaliste, qui confirme qu’en l’espace de quelques années, les choses ont bien changé dans ces quartiers.
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