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Yvan Stefanovitch : "Les entreprises ne paient rien pour le recyclage"

Par Jean Baptiste Giraud

Yvan Stefanovitch, auteur du livre "La mafia du recyclage: Entre monopoles, gaspillages et conflits d'intérêts" (Éditions du Rocher), était l'invité de "Bercoff dans tous ses états" le 26 avril 2023 sur Sud Radio.

Yvan Stefanovitch
Yvan Stefanovitch, invité d’André Bercoff dans "Bercoff dans tous ses états” sur Sud Radio.

Comme l’explique Yvan Stefanovitch, en fin de compte, ce sont les ménages qui paient pour le recyclage des emballages en plastique.

 

"Quel que soit le produit, au final c’est le consommateur qui paie pour son recyclage"

Le recyclage du plastique coûte un total de 10 milliards d'euros par an aux Français. "La mécanique est un peu insidieuse. Les lois sur le recyclage ont été passées de manière très discrète. On a fait une loi parce qu’on a inventé en 1978 les bouteilles en plastique. Ça a foutu un bordel terrible, le volume des poubelles a augmenté de 40%. Les collectivités locales n’avaient plus l’argent pour faire ça. On a donc inventé la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, ça nous coûte 8 milliards d’euros par an. Et puis, on paie 2 milliards pour le recyclage. En tout, 10 milliards donc. Ce qui est fantastique, c’est que les entreprises ne paient rien."

 


"On a fait une nouvelle loi en 1992 et 1993. Il fallait faire quelque chose, ne pas se contenter de brûler ou enfouir ce plastique. Et puis, même si on ne parlait pas encore de réchauffement climatique, on comprenait que le plastique était nocif. On se dit : 'on va mutualiser les efforts des entreprises, qui vont financer les collectivités locales à hauteur de 80% de la différence'. Car incinérer un déchet ou l’enfouir, ça coûte beaucoup moins cher que de le recycler. Il faut nettoyer le déchet, il faut le dépolluer, il y a plusieurs étapes… c’est très compliqué. Sur les produits d’ameublement et les produits électriques et électroniques, il est écrit : 'vous payez une éco-participation'. Mais, quel que soit le produit, au final c’est le consommateur qui paie."

"Pendant 20 ans, le président de Citeo, c’était le PDG de Danone"

Selon Yvan Stefanovitch, les grandes entreprises qui commercialisent des produits avec des emballages en plastique ont intérêt à perpétuer ce type d’emballage, car son cycle de vie leur rapporte de l’argent. "En France, on vit dans une économie libérale, dans le capitalisme, mais on est les héritiers de Colbert. On a fait un système où les entreprises donnent de l’argent aux collectivités locales sans but lucratif, c’est pour lutter contre le changement climatique, la pollution. Ce sont les grandes entreprises qui organisent ça via les éco-organismes : on mutualise toutes les éco-participations. Et les actionnaires des éco-organismes, ce sont uniquement de grosses sociétés. Par exemple, pendant 20 ans, le président de Citeo, c’était le PDG de Danone. Ces grandes sociétés sont donc dans un conflit d’intérêts : plus elles vont se soucier du recyclage des bouteilles pour que ça pollue moins, plus ça va leur coûter cher. Cela fait qu’ils n’ont pas intérêt à se soucier de la lutte contre le changement climatique."

 


En plus, la loi est faite de telle sorte qu’elle décourage les entreprises d’atteindre un taux de recyclage élevé. "L’État donne des agréments à chaque éco-organisme, comme Citeo et Eco-Emballages. Dans l’Accord de Grenelle, Nathalie Kosciusko-Morizet, qui était la ministre de l’Environnement l’époque, a écrit que l’argent de l’éco-participation, que détenait ces éco-organismes, ne devait être reversé à l’État qu’à hauteur de 80%, et uniquement si les collectivités atteignaient un taux de recyclage de 75%. Donc, résultat : aujourd’hui, ce taux de 75% n’est toujours pas atteint."

 

 

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Retrouvez “Le face à face” d'André Bercoff chaque jour à 12h30 dans "André Bercoff dans tous ses états" Sud Radio.

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