Il était l'une des personnalités littéraires les plus influentes et les plus réputées du pays. L'écrivain et académicien Jean d'Ormesson est décédé la nuit dernière à l'âge de 92 ans, des suites d'une crise cardiaque, à son domicile de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine). Sa fille unique, Heloïse D'ormesson - qu'il a eu avec Françoise Béghin - a annoncé le décès dans la matinée, confirmant ainsi une information révélée un peu plus tôt par le site Métropolitain.
Journaliste puis écrivain avant d'être "immortel"
Né à Paris le 16 juin 1925 d'un père ambassadeur de France et d'une mère issue d'une famille monarchiste catholique, Jean d'Ormesson passe son enfance au château de Saint-Fargeau (Yonne), propriété familiale du côté maternel, se déplaçant souvent au gré des missions diplomatiques de son père, notamment en Allemagne, en Roumanie et au Brésil. Après avoir effectué l'essentiel de sa scolarité en suivant des cours par correspondance, il obtient son Baccalauréat en 1943, à sa deuxième tentative, puis intègre le Lycée Henry IV en Hypokhâgne avant de faire son entrée à l'École normale supérieure, où il suivra notamment les cours du philosophe Louis Althuser. Sortant du prestigieux établissement avec une licence en lettres et en histoire sous le bras, il obtient également l'agrégation de philosophie en 1949 avant de démarrer une carrière journalistique, collaborant avec plusieurs journaux tels que Paris-Match, Ouest-France, Nice Matin ou encore la revue philosophique "Diogène", dont il deviendra le Directeur général en 1976.
Nommé parallèlement secrétaire général de l'UNESCO en 1950 grâce aux relations de son père, après avoir déjà participé à plusieurs conférences internationales en tant que membre de délégations françaises, il va en outre travailler au sein de plusieurs cabinets ministériels à partir de 1958, tout en publiant son premier roman "L'amour est un plaisir", en 1956. Nommé président du directoire de la société de gestion du Figaro en 1974, il va diriger le quotidien jusqu'à sa démission en 1977. Une période marquée par ses écrits sur la Guerre du Viêt-Nam qui inspireront au chanteur Jean Ferrat la célèbre chanson "Un air de liberté", dans laquelle l'artiste s'en prendra au journaliste à qui il reprochait d'approuver les guerres coloniales. Après son départ du Figaro, Jean d'Ormesson continuera toutefois d'y tenir une chronique régulière jusqu'en 1983. En 1974, il publie ce qui sera l'un de ses plus grands succès littéraires "Au plaisir de Dieu", dans lequel il relate ses jeunes années passées au château de Saint-Fargeau. D'autres ouvrages à succès suivront comme "Dieu, sa vie, son œuvre" (1981), "Jean qui grogne et Jean qui rit" (1984), "Histoire du juif errant (1991), "La douane de mer" (1994), ou encore "Presque rien sur presque tout" (1996). Récompensé pour l'ensemble de son œuvre par le prix Chateaubriand en 1994, il continuera de publier de nombreux ouvrages jusqu'aux années 2010 et s'essaiera même au cinéma en 2012, en interprétant le rôle du président de la République dans le film "Les saveurs du palais", aux côtés de Catherine Frot.
Élu à l'Académie française le fauteuil 12), celui qui se définissait souvent comme un "Gaulliste européen avec des idées de gauche" était le doyen d'élection des académiciens depuis 2009 et le décès de Claude Lévi-Strauss. Devenu au fil du temps l'une des figures majeures du paysage littéraire français, il était par ailleurs un bon client des plateaux télé, où sa posture de vieux sage, son sourire malicieux et ses anecdotes truculentes faisaient leur effet. Ayant survécu à un cancer de la vessie en 2013, sa présence dans les médias se faisait rare ces derniers temps jusqu'à l'annonce de son décès ce mardi. Il laisse derrière lui une œuvre importante et le souvenir d'un homme populaire respecté par ses pairs.