Le gouvernement doit-il accorder un petit coup de pouce au Smic, en plus de l’augmentation automatique basée sur l’inflation ? Non, à en croire un groupe d’experts sur le sujet, qui a remis ce mardi un rapport au gouvernement expliquant cette conclusion. Président de ce groupe d’experts, l’économiste Gilbert Cette précise au micro de Sud Radio les raisons de cette recommandation. "Les deux objectifs centraux dans nos analyses ont été la création d’emplois et la baisse durable et soutenable du chômage d’une part, et la lutte contre la pauvreté d’autre part. C’est au vu de ces deux seuls critères que nous avons mené nos analyses qui ont abouti à ces conclusions", annonce-t-il en préambule.
"La France souffre d’un problème de manque de compétitivité"
"Sur le coup de pouce, le constat est simple. La France est dans une situation d’extrême fragilité. La reprise y est beaucoup plus faible que dans la zone euro. La baisse du chômage, qui est bien là depuis 18 mois, est beaucoup plus faible que dans la zone euro. La situation de beaucoup de personnes est très fragile. Et enfin, la France souffre d’un problème de manque de compétitivité. Pour la dixième année consécutive, notre solde des échanges extérieurs est négatif. Compte tenu de ces éléments et du fait que la situation financière des entreprises ne s’est pas encore rétablie à son niveau d’avant la crise, nous disons qu’il faut s’abstenir de tout coup de pouce pour cette année", ajoute-t-il.
"Une situation totalement atypique en France"
Par ailleurs, le rapport préconise également de revoir la formule de calcul du Smic, et notamment d’en finir avec la revalorisation automatique, exemples à l’appui. "Quel est notre objectif ? Lutter contre la pauvreté des travailleurs ? Nous montrons dans ce rapport qu’à coût identique pour l’État, il est pour l’instant préférable d’augmenter la prime d’activité plutôt que le Smic. Deuxièmement, nous regardons les autres pays autour de nous. Les pays nordiques, dans lesquels il n’y a pas de salaire minimum national, et les 26 autres pays des 35 pays de l’OCDE dans lesquels il y en a un. Sur ces 27 pays (en comptant la France), il y en a 23 qui ne possèdent aucune clause de revalorisation automatique de ce salaire. Dans les 4 autres pays, il y a un chômage généralement plus élevé et une situation plus fragile chez certains publics, notamment les peu qualifiés. Pour trois de ces quatre pays, la clause de revalorisation automatique ne s’applique uniquement en fonction des prix. La France est la seule qui s’applique sur les prix et sur un index salarial. Cette situation totalement atypique contribue – avec d’autres éléments, le Smic n’est pas le seul responsable – à nous maintenir dans une situation de chômage massif", clame-t-il.
"Relever la prime d’activité serait plus efficace"
Pour Gilbert Cette, d’autres leviers pourraient être plus efficaces qu’une augmentation du Smic pour lutter contre la pauvreté des travailleurs. "Les bénéficiaires de la prime d’activité sont tous des salariés. Nous remarquons simplement que quand on augmente le Smic, 23% seulement des bénéficiaires de cette augmentation sont pauvres. 77% ne le sont pas. En revanche, quand on augmente la prime d’activité, presque tous les bénéficiaires sont pauvres. Nous disons donc que si on veut une politique de lutte contre la pauvreté, il est indiscutable que le relèvement de la prime d’activité est plus efficace", martèle-t-il.
Retrouvez ici en podcast toute l’interview de Gilbert Cette dans le grand journal de Sud Radio