Jusqu’où montera la Seine ? En crue depuis plusieurs jours, le fleuve qui traverse une partie de la région Île-de-France ne cesse de voir son niveau grimper. Une bien mauvaise chose pour toutes les entreprises qui utilisent la Seine au quotidien, moins de deux ans après la crue de juin 2016 qui avait déjà laissé des traces. Même s’il est encore difficile de chiffrer les pertes, à l’heure où l’eau monte toujours, la SCAT (Société Coopérative Artisanale de Transport) constate déjà 90% d’activité en moins, avec notamment les barges qui acheminaient gravier et céréales qui ne naviguent plus aujourd’hui.
"Un bateau, ça représente 50 ou 60 camions"
"Les seuls transports que nous pouvons encore effectuer sont ceux qui relient Le Havre ou Rouen à Gennevilliers. Il y a des artisans qui travaillent chez nous, qui sont tous indépendants. Pour eux c’est une perte sèche, il va leur manquer entre 20 et 30 000 euros dans le mois...", déclare Philip Maugé, directeur de la SCAT, au micro de Sud Radio. Président de la communauté portuaire de Paris, Olivier Jamey se désole de l'impossibilité désormais d'utiliser la voie fluviale pour le transport de matériaux. "90% des centrales à béton à Paris sont sur les bords de Seine ! On a le chantier du Grand Paris qui repose beaucoup sur la Seine en termes d’évacuation de déblais et d’acheminement de matériaux de chantier. On est obligé de repasser par la route. Un bateau, ça représente 50 ou 60 camions...", rappelle-t-il.
En ce qui concerne les traditionnelles Vedettes de Paris, très prisées par les touristes de passage dans la capitale, le quai est aujourd’hui sous l’eau. Le PDG Frédéric Avierinos tente de prendre son mal en patience. "L'accès à nos pontons d’embarquement et de débarquement, qui sont aussi nos bureaux, sont inaccessibles. L’activité promenade est évidemment interrompue. Pour les activités événementielles, nos commerciaux regardent dans quelle mesure elles peuvent être reportées ou annulées. Les navigants, les billettistes et les mécaniciens ont été mis en chômage technique. Cette saison, on tourne avec deux bateaux, donc un départ tous les 45 minutes. Au mois de juin, c’est un départ tous les quarts d’heure !", souligne-t-il.
"EDF a coupé l’électricité alors qu’on n’était pas encore vraiment sous l’eau"
Une situation météorologique qui inquiète également Ricardo Esteban, directeur de la salle de concert du Petit Bain, près de la Bibliothèque François-Mitterrand. Une salle de concert et restaurant flottante qui accueille du public toute l’année mais qui doit considérablement revoir sa programmation avec cette crue. "Dès que l’eau dépasse 4,10 mètres, on ne peut plus accéder au bateau puisqu’on marche dans l’eau. Aujourd’hui, l’eau est à 5 mètres. On a eu la surprise de voir qu’EDF a coupé l’électricité alors qu’on n’était pas encore vraiment sous l’eau, donc tout ce qui était dans les frigos du restaurant est en train, tout doucement, de s’avarier… On a eu le temps de sortir les ordinateurs, de mettre le bateau en sécurité et de suspendre les passerelles, on a annulé des événements prévus demain et ce week-end. Or, une soirée qui marche bien, ça représente 6000 euros. On va déclencher un chômage partiel pour les salariés (20 personnes), et on se prépare à une fermeture qui risque de durer", indique-t-il.
Un reportage de Fany Boucaud