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Drames, guerres, crises, menaces… Le monde en proie à une étrange atonie

Une drôle de sensation semble s’être emparée de la sphère publique ces derniers temps. Une sorte d’apathie collective, paradoxale au vu de la multitude d’événements dans le monde entier.

File d'attente dans le métro de Saint-Pétersbourg (©OLGA MALTSEVA - AFP)

Quelque chose d’étrange dans l’air du temps. Un million d’événements dans le monde ne font que quelques imperceptibles rides à la surface de l’océan de l’information. Ô temps ! Suspends ton vol, et vous, heures propices suspendez votre cours ! Une étrange atonie semble avoir saisi le monde en ce début d’année. Un flot ininterrompu de nouvelles se coule dans une sorte de routine. Rien de surprenant, rien d’extravagant. Le vacarme du monde ne renvoie qu’un lointain écho, ponctué ici ou là par quelques hystéries passagères sur les réseaux sociaux, un mot de travers, un geste déplacé. À force de dénonciation de toutes les agressions sexuelles depuis un demi-siècle, on finit par écouter machinalement la liste sans fin des noms des agresseurs avérés ou imaginaires. Même les attentats, malgré les efforts de l’information en continu, suscitent une réaction émotionnelle modérée, sauf quand ils tuent tout près de chez soi car tout à coup on se dit qu’on peut y passer aussi.

Trump et la Corée du Nord, Trump et ses tweets, Trump et son mur ? C’est du réchauffé, on s’est habitués. L’extrême-droite au gouvernement en Autriche ou au Parlement en Allemagne ? Il fallait bien que ça arrive. Daesh, ce n’est pas fini ? Ah bon, on croyait, pourtant. La puissance et les ambitions chinoises, qui grandissent ? On avait bien dit que quand la Chine s’éveillerait... La religion ? Dieu paraît tout à coup bien loin et les fondamentalistes rôdent toujours, mais rien de nouveau. Mêmes les grandes passions politiques françaises semblent s’être endormies. Plus de Front national, plus d’opposition, plus de front syndical, plus de grandes grèves et manifestations, plus de débats enflammés. À part la mort de Johnny Hallyday, rien de notable. Quelques policiers tabassés ? Violence ordinaire. On recherche toujours Xavier Dupont de Ligonnès, mais ça fait bientôt sept ans. Une sorte de lassitude s’est emparée du monde. Poutine va être réélu, mais qui en doute ?Erdogan ? Il va falloir faire avec, c’est comme ça. Quelques morts palestiniens de plus pour Jérusalem ? On est habitués. La faim dans le monde, les migrants, le réchauffement climatique, les guerres, les persécutions, on est aussi habitués. Le quotidien de l’information. 

Étrange atmosphère. Tout le monde le ressent, personne n’en parle. L’information continue, toujours. Alors, la fin de l’Histoire ou le calme avant la tempête ? Qui sait ? Étrange, ce moment, au milieu de tant de crises et de violences, où les drames semblent s’équilibrer. Équilibre instable. Le 15 mars 1968, Pierre Viansson-Ponté, alors directeur du Monde, écrivait dans le grand quotidien du soir : "ce qui caractérise actuellement notre vie publique, c’est l’ennui". Aujourd’hui, malgré les guerres, les drames, les menaces, on dirait que c’est le monde entier qui s’ennuie.

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