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Il faut soutenir l'Égypte car la priorité est de lutter contre ceux qui veulent nous détruire

Henri Guaino revient aujourd'hui sur la polémique engendrée par la visite du controversé président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi.

Tout ce que la France compte d'ONG et de défenseurs des droits de l'Homme protestent contre la visite à Paris du Maréchal Abdel Fattah al-Sissi et contre les ventes d'armes de la France à l'Égypte. Les ONG recensent des dizaines de milliers de personnes emprisonnées pour des motifs politiques ou pour des raisons de mœurs. Certains démocrates reprochent aussi au président égyptien d'avoir renversé en 2013 le président démocratiquement élu, Mohamed Morsi, puis d'avoir instauré une dictature. Si le décompte des victimes du coup d'État et des prisonniers politique est difficile à faire, il est indéniable que l'Égypte n'est pas le paradis de la démocratie et des droits de l'Homme.

Les ONG ont-elles raison de protester ? Disons qu'elles sont dans leur rôle mais elles ne font pas la politique étrangère de la France, ni même d'aucune autre démocratie dans le monde. Et par opposition, un gouvernement n'est pas une ONG, il assume des responsabilités d'une autre nature. C'est ce que l'on appelle la real politique, c'est-à-dire une conception quelque peu cynique des relations internationales au nom d'un certain réalisme. Mais entre le cynisme et le moralisme, il y a la place pour un équilibre, entre ce que l'on appelle l'éthique de la conviction et l'éthique de la responsabilité. La dictature des Frères musulmans en Égypte, fut-elle arrivée au pouvoir par les urnes, n'avait rien de moral au sens de la démocratie et des droits de l'Homme. La morale abstraite dit : le bien et le mal. La politique, elle, est obligée d'agir dans le monde tel qu'il est. Et, en Égypte, en 2013, c'était la dictature militaire ou le totalitarisme islamiste. 

La France reconnaît les États, non les régimes, sinon elle n'aurait jamais reconnu la Chine de Mao. Sinon, on peut aussi revenir au temps de croisades et intervenir militairement dans tous les pays où le régime politique et la religion ne nous plaisent pas. L'Occident a bien trop cédé à ce penchant depuis quelques années avec le devoir d'ingérence. On voit les résultats en Irak, Syrie, Libye ect... Or, un gouvernement doit assumer les conséquences concrètes de ce qu'il fait, non seulement pour l'humanité tout entière mais aussi et surtout pour ses propres concitoyens dont il doit défendre les intérêts et qu'il a le devoir de protéger en priorité. Nul cynisme là-dedans, c'est, pour un gouvernement, un impératif moral pour honorer son mandat. Il règle donc d'abord ses relations avec les autres gouvernement sur cet impératif avec à chaque fois un cas de conscience et non dans le confort de la bonne conscience qui se moque des conséquences. Donc, de ce point de vue, Emmanuel Macron, a raison de préserver l'alliance avec al-Sissi comme avant lui le faisaient Mitterrand, Chirac et Sarkozy avec Moubarak, mais aussi comme on devrait le faire avec la Russie parce que c'est dans l'intérêt de l'Europe, de la France et de la paix.

Quid des printemps arabes ? Ce fut une grande illusion lyrique - magnifique d'ailleurs - et il était alors impossible d'émettre le moindre doute sur ces révolutions dont certaines, comme en Égypte, ont été quand même un peu manipulées de l'extérieur. Tout le monde devait se réjouir de la chute des nationalismes arabes. Nous savons maintenant que c'était une mauvaise nouvelle pour l'Occident mais aussi pour les populations du Moyen Orient, les chrétiens d'Orient et les victimes du fondamentalisme, des guerres de religion. La politique est confrontée au tragique de l'histoire où le bine et le mal, parfois, s'enchevêtre inextricablement. Si la Russie n'avait pas soutenu le régime syrien, où en serions-nous avec l'État islamique ? 

Il faut soutenir l'Égypte et continuer à lui vendre des armes, sans aucun cynisme et pas seulement pour faire tourner nos industries d'armement. La priorité est de lutter  contre ceux qui veulent nous détruire. Churchill et Roosevelt s'étaient bien alliés à Staline. Ils ne sont pas devenus communistes ni staliniens pour autant. Et s'ils ne l'avaient pas fait ?

>> L'intégralité de la chronique est disponible en podcast

 

 

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