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La baisse des coûts et des prix, une contradiction qui mine l'économie mondiale

Heny Guaino revient ce mercredi sur la petite guerre que se mènent les agriculteurs et les industriels autour du prix des produits alimentaires.

Après les États généraux de l'alimentation, les agriculteurs, les industriels et Michel-Édouard Leclerc s'écharpent sur les prix des produits alimentaires. Le partage de la valeur ajoutée est au centre des débats. Les agriculteurs et les industriels demandent des prix de vente aux consommateurs plus rémunérateurs donc plus élevés. Ils sont soutenus par certains distributeurs. Michel-Édouard Leclerc, lui, s'y oppose au nom de la défense du pouvoir d'achat.

Qui a raison ? Les deux, car on est au cœur en réalité d'une contradiction qui mine l'économie mondiale telle qu'elle fonctionne aujourd'hui, avec sa course effrénée vers la baisse des coûts et des prix. Produire toujours moins cher, vendre toujours moins cher, voila la maxime de l'économie globale qui transforme cette dernière en une gigantesque machine à fabriquer de la déflation. La loi de la concurrence me direz-vous. Oui mais c'est une concurrence par les coûts et les prix qui va trop loin et qui finit par être perverse. Il y a en réalité d'autres formes de concurrence qui, au lieu de tirer tout vers le bas, tire tout vers le haut. Par exemple, la concurrence par l'innovation, par la différenciation des produits, par la qualité. On peut aussi doser la concurrence parce qu'elle se retourne contre elle-même quand elle va trop loin. Trop de concurrence tue la concurrence. Et puis la concurrence libre et non faussée, si chère à Bruxelles, n'existe pas. Il faut compter avec les dumpings, les concurrences déloyales, les manipulations monétaires auxquelles le libre échange naïf - et qui ne regarde pas le monde tel qu'il est - ouvre la voie comme on ferait rentrer un loup dans la bergerie.

À la question de savoir si la baisse des prix s'avère positive pour le pouvoir d'achat, je réponds oui et non. C'est vrai pour un salaire donné. Quand les prix baissent, le pouvoir d'achat de ce salaire augmente, c'est d'ailleurs comme cela que l'on justifie de laisser entrer des produits importés bon marchés et que la grande distribution peut se se proclamer légitimement défenseure du pouvoir d'achat des Français. L'intérêt du consommateur, c'est le but ultime. Seulement voilà, les consommateurs sont aussi le plus souvent des producteurs et ça lui fait une belle jambe, au consommateur, de voir les prix baisser quand la guerre des prix détruit son emploi et sa rémunération, ou quand elle provoque une dégradations excessives de ses conditions de travail. En Économie, il y a ce qui se voit, la baisse des prix donc, et ce qui ne se voit pas derrière cette baisse:  la pression sur les coûts qui devient trop forte, qui conduit au freinage des salaires, à la compression des effectifs et à des exigences exorbitantes en matière de gain de productivité. Au bout, il y a l'augmentation du chômage et la diminution du pouvoir d'achat global. 

Tout ça n'est pas uniquement le fait de la grande distribution, c'est celle d'un système économique, tout entier déréglé, qui s'est construit autour de l'oubli de toutes les leçons de la grande crise des années 30.

>> L'intégralité de la chronique est disponible en podcast

 

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