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L’affaire Ferrand ou la première défaite du jupitérisme face à la presse

Alors qu’Emmanuel Macron souhaite instaurer une nouvelle distance entre la présidence et les journalistes, l’affaire Ferrand lui montre qu’il devra bel et bien batailler ferme pour ne pas se laisser dicter son agenda.

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Avec l’affaire Ferrand, ce qui se joue, c’est la présidentialité de Macron, tout simplement. Pour le président de la République, il s’agit de maintenir la presse à distance dès le début du quinquennat et tenter de circonscrire son influence. Une petite phrase du président en dit long : "les choses ne peuvent pas bien se passer quand la presse devient juge". Cela montre l’état d’esprit et l’intention présidentielle. Après les envies de l’Élysée de voir les journalistes spécialisés uniquement suivre les déplacements en fonction de leurs thèmes, voilà une nouvelle manière de tenter de cloisonner le regard sur la vie de l’Élysée. Avec l’affaire Ferrand, c’est un rapport de force qui s’entame à nouveau. La presse ne va pas faire et défaire la vie politique, estime Macron.

Coïncidence, le chef de l’État vient de passer deux jours dans l’ouest du pays, et on l’a vu repousser inlassablement les questions des journalistes. "Pas de commentaires, pas de commentaires", telle est la formule présidentielle sur des sujets qui ne concernent pas le déplacement. Encore une fois, c’est la volonté présidentielle d’amener la presse à se plier aux règles qu’il fixe lui-même. C’est l’enjeu de ce qu’on appelle maintenant le "jupitérisme", faisant référence au principe de Jacques Pilhan, le communiquant des présidents Mitterrand et Chirac. Il avait théorisé la parole présidentielle, qui doit s’abattre comme la foudre actionnée par Jupiter : rare et implacable.

Emmanuel Macron n’échappe pas à cette règle qui veut que chaque Président est obsédé par l’idée de marquer la rupture avec son prédécesseur. Sarkozy était focalisé sur la rupture avec Chirac, Hollande a fait de l’anti-sarkozysme l’axe de sa campagne et du début de sa présidence, Macron considère que Hollande a été miné et dominé par son addiction aux liens avec les journalistes, aux SMS permanents et aux témoignages pour le livre qu’il a trop alimenté lui-même. Il a été plus Premier secrétaire que président de la République. En changeant le code de la relation avec les journalistes, Emmanuel Macron pense qu’il redonnera du solennel à la fonction. Mais en l’espèce, il s’agit de l’affaire Fillon et de l’affaire Ferrand, qui ont commencé par des articles de presse et qui ont déclenché la justice. Cela veut dire que la presse a fait son travail, c’est l’exact rôle d’une presse libre et professionnelle. Preuve que cette stratégie jupitérienne ne fonctionne pas : après avoir répété qu’il n’y avait pas d’affaire parce qu’il n’y avait pas d’enquête, la justice a ouvert une enquête.

Dans son bras de fer avec la presse, le président Macron vient de perdre une première manche.

Réécoutez ici l’édito politique de Michaël Darmon dans le Grand Matin Sud Radio.

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