Le moment est venu de prendre de la hauteur et de la distance par rapport à cet événement du 11 septembre 2001.
Hier les États-Unis commémoraient ces attentats qui resteront sans doute comme le premier grand dérèglement de la mondialisation dans toutes ses dimensions. Fini en effet depuis lors, la jolie histoire selon laquelle toutes les barrières et tous les murs entre les hommes allaient tomber et l'humanité enfin réunie dans le grand marché mondial et le commerce - qui dit-on adoucit les mœurs - et les droits de l'Homme qui font tomber toutes les tyrannies. Après l'ère des certitudes, qui depuis la chute du mur de Berlin imprégnait un occidentalisme triomphant, le 11 septembre ouvrait l'ère d'un doute qui n'a cessé depuis de grandir.
Le 11 septembre a peut-être davantage changé le monde que Google, Facebook et Apple réunis
Exagère-t-on l'importance de ces attentats ? Non, on a plutôt sous-estimé son impact sur les mentalités et l'ordre du monde. En effet, est venu depuis le doute que la science et la technique n'allaient peut-être pas résoudre tous les problèmes de l'humanité qui devait pourtant être enfin débarrassée de se sentiment et de ses passions. Pire, l'Occident redécouvrait que la science et la technique - mises au service de la barbarie, du fanatisme ou tout simplement de la haine que pouvait susciter l'occidentalisation du monde - pouvaient avoir des effets dévastateurs. Dévastateurs, ces attentats le furent dans leurs conséquences immédiates sur l'Afghanistan et l'Irak, véritables bombes à fragmentation géopolitiques, mais ils le furent aussi pour l'état du monde. On le voit bien aujourd'hui, 16 ans après, en regardant tous les murs et toutes les barrières qui, dans les têtes et dans les faits séparent de nouveau les Hommes. Le mur de Trump en est la dernière illustration en date, après les barbelés installés sur des frontières européennes en 2015, sur un continent qui devait pourtant abolir toutes les frontières.
L'irruption des avions dans des salles de marché des tours jumelles de New York a peut-être davantage changé le monde et notre façon d'y vivre que Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft réunis. Comme quoi, les croyances, les passions, les sentiments et les imaginaires humains ne doivent pas être pris à la légère si nous voulons que le monde soit habitable. Ce ne sont pas des résidus d'un passé révolu, ils font partie de notre présent et de notre avenir au même titre et avec une égale importance que les nanotechnologies, l'intelligence artificielle et la génétique...