D’abord parce que c’est un texte fourre-tout qui parle de tout et qui en même temps n’a pas de force contraignante. Donc ça intrigue. Il y avait jusqu’ici un traité franco-allemand signé par de Gaulle et Adenauer à l’Élysée, il y a soixante ans. Et ça suffisait largement. Je ne reviendrai pas sur les fantasmes stupides que ce texte a fait naître. Car il ne mérite vraiment pas la publicité qu’on lui a donnée. Pour moi il contient un paragraphe inutile, superflu, voire même dangereux. Et je ne comprends pas que des diplomates avisés aient pu le laisser passer. Je vous le livre : Les deux États s’engagent à poursuivre leurs efforts pour mener à terme des négociations intergouvernementales concernant la réforme du Conseil de sécurité des Nations Unies. L’admission de la République fédérale d’Allemagne en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies est une priorité de la diplomatie franco-allemande.
Quel est le problème ? L’Allemagne est une grande puissance économique me direz-vous. Eh bien justement le Conseil de sécurité est un sanctuaire de l’histoire. Il n’a rien à voir avec la taille de l’économie. Sinon le Japon aurait sa place depuis longtemps, l’Inde aussi, voire le Brésil. Ce Conseil de sécurité est composé par les vainqueurs de 1945, c’est-à-dire ceux qui ont imposé la liberté et vaincu le nazisme. En plus il y a la Chine, car c’est une puissance nucléaire officielle et non officieuse. L’Allemagne est un vaincu de 1945 et c’est pour cette raison que son opinion publique considère comme tabou les sujets militaires. Par ailleurs ce n’est pas une puissance nucléaire. Du coup cette demande visant à intégrer le Conseil de sécurité est incongrue. Et ça me choque que la France affirme dans un traité que ce sujet est une priorité de la diplomatie franco-allemande. À l’heure du Brexit, d’un Occident élargi à la Russie, d’une lutte sans merci contre l’islamisme et d’une émancipation vis-à-vis d’un empire américain qui nous lâche, il y a de vraies priorités. Par ailleurs si l’Allemagne est un nain politique, elle s’en est accommodée. Et ce n’est pas à la France de jouer sa partition. Alors que dans les opérations extérieures, elle fait le service minimum.
Avec ce paragraphe Emmanuel Macron a ouvert une Boite de Pandore. Comme s’il n’avait pas assez de problèmes en ce moment. C’est ce qu’on appelle manquer totalement de sens politique !