Angela Merkel et Emmanuel Macron ont donné une conférence de presse pour tenter d’apaiser après la crise de l’Aquarius. Ils ont convaincu ?
D’abord, ils ont été pris par l’urgence. Ce sommet devait être consacré à la réforme de la zone euro, les migrants se sont invités dans les discussions avec les tribulations de l’Aquarius. Le deuxième point, c’est qu’Angela Merkel aborde cette période avec des boulets aux pieds. Elle est sous la menace de son ministre de l’Intérieur et de ses alliés de la CSU, ce qui la force à chercher en Emmanuel Macron un allié, elle qui n’a eu de cesse depuis quelques mois de le soutenir avec la bienveillance et l’efficacité de la corde soutenant le pendu. Et puis, là, ils peuvent s’envoyer des fleurs, se congratuler mutuellement d’être à la fois lucides et humanistes et de vouloir sauver les valeurs européennes d’accueil et de respect de la personne humaine quand les méchants italiens sont indignes.
Indéniablement, ils ont essayé d’avancer sur quelques points, sachant que tout cela doit ensuite être validé par les 26 autres pour avoir une chance de voir le jour. Mais il y a des ébauches : une action dans les pays d’origine, pour stabiliser les situations, des plateformes régionales de débarquement, c’est-à-dire des lieux d’accueil dans les pays de passage des migrants, pour distinguer les gens éligibles au droit d’asile et les autres. Il s’agit d’envoyer un message aux opinions : nous ne restons pas inactifs, nous voulons diminuer les flux. Mais tout cela était exprimé avec d’infinies précautions, des trésors de prudence, et une gêne mal dissimulée. On les sentait tellement mal à l’aise, incapables de dire clairement que l’Europe joue son avenir.
Les opinions, chauffées à blanc par des décennies de discours lénifiants sur le thème "il n’y a pas de problème et l’immigration est une chance", n’en sont hélas plus à des considérations sur l’harmonisation du droit d’asile. On a deux dirigeants qui savent qu’ils n’en feront pas assez pour apaiser les angoisses de citoyens européens qui ont bien compris que la population d’un pays comme le Nigeria va doubler dans les deux décennies à venir, et que ce sera toujours trop pour les ligues de défenses des droits de tous les hommes sauf de ceux qui veulent perpétuer la civilisation européenne. Et puis, ces deux dirigeants adeptes du multiculturalisme ont du mal à admettre que le multiculturalisme, c’est la mort des valeurs européennes qu’ils prétendent défendre, puisqu’elles seront concurrencées par d’autres.
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