Emmanuel Macron, jusqu’à présent, avait plutôt fait un sans faute diplomatique. Pourtant, sa campagne ne le laissait pas présager : elle était d’une banalité totale, absolument conforme aux poncifs et aux discours dominants : Poutine était un méchant, et nous allions nous aligner sur l’OTAN et une Union Européenne atlantiste. Tous les gages qu’il fallait donner à ces milieux qui savent ouvrir les portes du pouvoir.
Et puis, surprise, il découvre, une fois au pouvoir, que si la France veut retrouver une voix sur la scène internationale, elle doit cesser d’être le paillasson des Etats-Unis. Il reçoit Vladimir Poutine, il tient la dragée haute à Donald Trump, il joue les médiateurs entre Mohamed Ben Salman, le prince saoudien, et le premier ministre du Liban, séquestré à Riyad. Mais il est en train de découvrir qu’il se confronte à plus fort que lui.
Il faut comprendre les rapports de force qui se jouent en Syrie. Les milieux néoconservateurs de Washington ont décidé d’imposer l’ordre mondial américain. Pour maintenir le système néolibéral, fondé sur une globalisation culturelle et un marché mondial unifié, il faut ressouder les troupes, parce que ça craque de partout. Donc, il faut un ennemi.
L’ennemi, c’est Vladimir Poutine, et ce sont ses alliés, ses intérêts. L’Iran, en particulier, qui prétend devenir une puissance régionale, au grand dam de l’Arabie Saoudite. D’où le chantage permanent fait à la France, mais aussi à l’Allemagne : si vous n’êtes pas avec nous, vous êtes contre nous, vous êtes dans le camp du mal.
Emmanuel Macron, qui avait tenté de sortir de cette logique depuis un an, s’y retrouve englué au moment où Mohammed Ben Salman est en France pour interdire à nos entreprises d’investir en Iran, et surtout au moment où une attaque au gaz vient opportunément mettre les Occidentaux au pied du mur.
Emmanuel Macron a lui-même parlé de ligne rouge. Et du coup, il s’affaiblit s’il recule. Il est là, le piège.
Sauf à montrer qu’on ne craint pas les diktats américain et saoudiens. Et à exiger des certitudes sur l’origine de ce gaz. C’est la seule porte de sortie raisonnable.
En fait, nous allons voir si les magnifiques discours de notre Président sur la souveraineté, sur l’indépendance, sur une future Europe de la Défense, ont un semblant de fond ou si ce n’est que du vent pour mieux rallier la France au camp de l’impérialisme américain et de ses intérêts financiers.
Écoutez la chronique de Natacha Polony dans le Grand Matin Sud Radio, présenté par Patrick Roger et Sophie Gaillard