Dans l'affaire qui porte son nom, il est un élément qui rendrait François Fillon presque sympathique, c'est le caractère improvisé et foutraque de sa défense. Bien qu'entouré de communicants chevronnés et autres spécialistes de la communication de crise, le candidat des Républicains n'a cessé de changer de pied. Après avoir estimé qu'il n'y avait aucun problème et que seule une mise en examen le contraindrait à renoncer, il a ensuite reconnu avoir fauté sur le plan moral et non sur le plan légal, quand l'inverse me semble plus juste, puis dénoncé une conjuration de médias et d'officines, avant de contester la compétence du parquet national financier en charge de l'enquête et annoncé, au rebours de sa première déclaration, qu'une mise en examen ne le dissuaderait pas de briguer l'Élysée. La boucle était bouclée, ou presque, puisque s'adressant aux parlementaires de son camp, son principal argument fut de leur servir qu'une élimination au premier tour de son éventuel remplaçant, le fameux plan B comme Baroin, signifierait une déroute aux législatives. Autrement dit, si vous tenez à vos sièges mesdames et messieurs, prières de me soutenir comme la corde soutient le pendu. Tout cela fait un peu IV République, surtout pour un gaulliste proclamé.
La réalité excède de beaucoup les limites du 238 rue de Vaugirard, le siège des Républicains, parce que parmi les aspects positifs de cette campagne hors du commun, on peut noter qu’elle oppose des projets très contrastés, entre le choc libéral de François Fillon et le programme teinté d’utopie de Benoit Hamon, la rupture d’extrême-droite prônée par Marine le Pen et, disons, le « Macronisme » d’Emmanuel Macron, on attend qu’il en dise un peu plus. Ces options mériteraient d’être débattues en toute clarté et sérénité, d’être discuté sur le fond, afin que l’électorat choisisse en connaissance de cause, une voix ou une autre, ou la France sort de ce mi-chèvre mi-choux devenue sa marque de fabrique depuis des années. Or, François Fillon n’est pas ou n’est plus en mesure de défendre sa vision de la France, puisque au milieu du vacarme de casseroles réels ou métaphoriques, il dépense l’essentiel de son énergie à écoper les vagues de révélations qui s’abattent semaines après semaines sur son canot de sauvetage et à esquiver les coups de couteaux dans le dos de ses propres compagnons de parti. François Fillon n’accédera peut-être jamais à la fonction suprême, mais il peut dès aujourd’hui affirmer sa stature d’homme d’état, qui place les intérêts du pays au-dessus de sa personne, en renonçant à la présidentielle. Ce sera toujours plus digne que d’aller faire son marché idéologique du côté de Nicolas Sarkozy.