single.php

Un remaniement, pour quoi faire ?

Après la démission fracassante de Nicolas Hulot, la semaine dernière, Emmanuel Macron devrait dévoiler aujourd'hui son remplaçant. Et si, le remaniement semble à première vue concerner uniquement le ministre de l'écologie, il n'est pas exclu que le périmètre soit en réalité plus large.  

C’est donc un exercice délicat dans une période difficile pour Emmanuel Macron : difficile sur le plan économique avec une croissance en berne, un chômage qui stagne, une augmentation de la dette... Mais surtout sur le plan politique : le réformateur que rien ne semblait pouvoir arrêter, qui fonçait sabre au clair tel Bonaparte au pont d’Arcole, sous le regard admirateur, voire enamouré de grands nombres de commentateurs, au point de l’affubler de comparaison aussi ésotérique que Jupiter, Napoléon , Louis XIV, eh bien, ce réformateur fait plutôt une rentrée a reculons, une rentrée prudente, inquiète même. Une rentrée sans audace, à l’image de la valse hésitation sur l’impôt à la source. Le Macron de 2017, sûr de sa bonne étoile, la fameuse Fortuna, chère à son cœur de spécialiste de Machiavel, ce Macron la aurait foncé. Le Macron de 2018, en plein doute, tergiverse .

On l’avait quitté en Gatsby le magnifique, pour reprendre là encore certains propos de ses thuriféraires, on le retrouve plus simplement en Valéry Giscard d’Estaing, du 21ème siècle, lorsque les premières difficultés apparurent et que l’illusion du Centre en même temps termina sa route dans le corner d’une droite pour laquelle il n’était pas assez à droite et d’une gauche pour laquelle il n’était pas assez à gauche. Alors, ce remaniement est bien plus important qu’il n’y parait. 

Soit Emmanuel Macron s’en saisit pour redonner un sens à son quinquennat, un souffle, un élan et là nous serions dans un remaniement large, qui permet de renouveler des effectifs qui ont pour beaucoup, du mal à trouver leur place : on pense bien sûr à Françoise Nyssen la ministre de la Culture mais pas seulement... Quid de Nathalie Loiseau, ministre des affaires européennes, quid de Stéphane Travert, le ministre de l’agriculture , quid de Jean-Yves Le Drian, ministre des affaires étrangères,... Tous totalement éteint dans ce dispositif et je ne parle même pas des secrétaires d’état quasiment inexistants sur des sujets pourtant très importants comme l’université, le handicap, ou même le numérique...

Prendre le risque de redonner du poids politiques à des portefeuilles en nommant des personnalités qui incarnent, des politiques de cet ancien monde qui savent mener des arbitrages, tenir des positions, mener des rapports de force à Bruxelles ou en réunion interministérielle. Va-t-il donc changer quelque chose dans sa manière de gouverner, c’est-à-dire partager la fonction politique, sans être le seul à incarner la politique ? Va-t-il également faire entrer une personnalité publique forte, qui va incarner la question sociale, notamment dans la bataille pour les retraites ? Voilà l’option d’un remaniement large. Soit il se contente de remplacer de poste à poste, afin aussi de minimiser le départ de Nicolas Hulot et il prend le risque du non événement ou de la cosmétique ... Le non événement serait Pascal canfin ou Laurence Tubiana. Le premier a déjà démissionné une fois dans les valises de Cécile Duflot. La seconde a géré la COP21, dans l’ombre de Fabius et Royal et a un profil de haut fonctionnaire sans aspérité ni véritable sens politique. Il prend aussi le risque de la cosmétique, ce serait un profil à la Hulot, risque qui semble écarté puisque la piste Cohn Bendit est abandonné. 

La dernière option c’est le coup politique. Parvenir à débaucher une tête d’affiche à gauche ou a droite... Autrement dit Ségolène Royal qui ne semble pas du tout candidate à y retrouver ou Alain Juppé qui serait un formidable renfort de poids. Mais le maire de Bordeaux, humilié dans sa conquête élyséenne, a-t-il envie d’y retourner comme simple numéro deux et Macron a-t-il envie de renforcer Edouard Philippe à Matignon ?

En réalité, le roi est nu. C’est la malédiction du quinquennat. Emmanuel Macron l’a vue, l’a subie directement lorsqu’il était secrétaire général adjoint auprès de Francois Hollande. Il a vu le président prendre le toboggan de l’opinion, il est d’ailleurs quasiment à son niveau de l’époque ! Il a vu la majorité indisciplinée tuer le quinquennat dès la première année. Il sait la difficulté a remanier quand les temps sont plus difficiles dans l’opinion. D’ailleurs, lui même a été le premier bénéficiaire de cette difficulté à trouver un remplaçant à Arnaud Montebourg .

Des seconds couteaux, vous en trouverez toujours. Mais des perles rares, politiques et médiatiques qui peuvent tenir la marée, politiquement et techniquement, eh bien vous ne les attirez pas comme ça dans vos filets. Finalement Emmanuel Macron a très peu de marge de manœuvre. Au risque de se livrer au enième remaniement parfaitement inutile. Ou presque .

L'info en continu
07H
04H
23H
21H
19H
18H
17H
16H
Revenir
au direct

À Suivre
/