"Emmanuel Macron débarque pour la première fois en Afrique sur la base de Barkhane à Gao au Mali, le 14 mai 2017. Sa détermination est complète : « L’opération Barkhane ne s’arrêtera que le jour où il n’y aura plus de terroristes islamistes dans la région et où la souveraineté pleine et entière des Etats du Sahel sera restaurée. Pas avant. » Sept ans plus tard, les djihadistes sont de plus en plus nombreux, et l’armée française a été obligée de quitter le Mali, le Burkina Faso, le Niger, et le Tchad pourrait suivre... Cette débâcle n’est pas militaire, c’est une déroute politique. Avec la fin de son influence en Afrique, la France a affaibli son armée, perdu ses alliés aux Nations Unies et dit adieu à sa voix singulière sur la scène internationale". On en parle avec Leslie Varenne, auteure de "Emmanuel au Sahel. Itinéraire d'une défaite" (éd. Max Milo).
Les invités
Du lundi au jeudi, André Bercoff donne la parole à des écrivains pour parler de leur nouveau livre et vous donne la parole pour réagir en direct avec notre invité. À retrouver sur Sud Radio et en podcast.
Retrouvez ci-dessous la retranscription automatique des 3 premières minutes de votre émission :
"Les Africains n'ont rien d'anti-français."
André Bercoff : Leslie Varen, alors « Emmanuel au Sahel », c'est vraiment un livre que je recommande, c'est un livre à lire. C'est un livre qui raconte effectivement les rêveries d'un promeneur solitaire dans un continent qu'il ne connaît pas. Et vous dites vous-même, vous avez une phrase formidable, vous dites « le président qui ne savait pas ce qu'il ne savait pas ». Et c'est vraiment ça, c'est quand on lit votre livre, je rappelle que vous êtes journaliste, que vous avez très longtemps, que vous êtes spécialiste de l'Afrique, vous y avez passé des années et des années, arpentant effectivement plusieurs pays, et on découvre quand même ce qui s'est passé. Alors, il n'y a pas que Macron, bien avant Macron, ça avait commencé effectivement ce désamour. Alors que la France, la francophonie d'un côté, les colonies de l'autre, enfin, 150 ans de présence plus ou moins assumée, et puis ce qui se passe aujourd'hui. Alors ce qui est absolument, on apprend vraiment beaucoup de choses dans votre livre, et ce qui est tout à fait sidérant, c'est la profondeur du gouffre et presque abyssale du désamour effectivement, ou je ne sais pas si on peut appeler ça d'un divorce. Dites-moi, qu'est-ce qui s'est passé, qu'est-ce qui fait qu'on en est à ce point ?
Leslie Varenne : Alors, il y a plusieurs choses sur ce sujet-là. D'abord, on parle toujours de sentiment anti-français, de ressentiment anti-français, je m'inscris en faux. Les Africains n'ont rien d'anti-français. Ils rejettent la politique française. Mais moi, je suis française, je vis en Afrique, tout se passe bien, tous mes amis qui vivent en Afrique, tout se passe bien pour eux, donc il n'y a absolument aucun racisme anti-blanc, enfin toutes ces bêtises-là, ça c'est faux.
"Alors, où est le problème ?"
André Bercoff : Vous voulez dire qu'en Afrique, il n'y a pas ça ?
Leslie Varenne : Rien, non, rien du tout. Franchement, les Africains d'Afrique francophone que je connais, parce que l'Afrique c'est 55 pays, je ne connais pas tous les pays d'Afrique, mais en tout cas, ce où je me rends, il n'y a absolument pas ça.
André Bercoff : Alors, où est le problème ?
Leslie Varenne : Alors, le problème, c'est des strates successives qui ont été posées. On peut revenir très longtemps en arrière, bon, la colonisation, etc., mais je crois que c'est au coup... Moi, je remonte à 2011, quand même, les plus grandes catastrophes, ça a été la guerre en Libye et la guerre en Côte d'Ivoire. Donc là, il y a eu un véritable rejet de la politique française, avec, souvenez-vous, l'assassinat de Kadhafi. On oublie qu'au Mali, en 2011, pendant la guerre en Libye, il y avait des manifs géantes pour contester cette guerre que l'OTAN menait dans ce pays, pour contester le rôle de la France, etc. Et puis, Côte d'Ivoire, 2011, c'est aussi l'arrestation par l'armée française de Laurent Gbagbo, d'Anson Walker, qui a vraiment choqué l'Afrique. (...)