Les guerres peuvent-elles avoir un impact sur l'économie européenne et française ?
Conflit russo-ukrainien, guerre Israël/Hamas... autant de conflits auxquels est confronté le monde. Mais, en même temps, que deviennent les économies en temps de guerre ? Plus précisément, les économies européenne et française peuvent-elles être impactées par les guerres ? Comment, de quelle façon, pourquoi ? André Bercoff reçoit Charles Gave pour en parler.
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"Alors, ça veut dire quoi, ça ? Ça veut dire que c'est quelque chose qui était attendu ou que c'est quelque chose qui doit nous surprendre, Charles Gave ?"
André Bercoff : Et oui, le célèbre "money" de Pink Floyd, et la monnaie sonante et trébuchante, effectivement, et malheureusement, malheureusement les guerres n'arrangent pas les choses de ce point de vue-là, sont sorties les chiffres, par exemple, que donne Courrier internationale le coût exorbitant de la guerre en Ukraine pour l'économie mondiale, 1600 milliards de dollars de PIB, de PIB, pour du intérieur brut, en moins. On parle aussi beaucoup que le chef, par exemple, l'économiste du FMI, Pierre-Olivier Gourin-Chasse, une hausse de 10 dollars des prix du pétrole, si elle était persistante, pourrait entraîner une perte de 0,15 points de pourcentage de PIB au niveau mondial. On va pas vous abreuver de chiffres, mais quand même, celui-ci, la guerre, effectivement, en 2022, a impacté le portemonnaie des ménages français qui déboursent entre 30 et 40 euros chaque mois par foyer, 30 et 40 euros par mois, 450 euros par ménage en 2022. Voilà, c'est des chiffres bruts, mais au-delà de ça, ah oui, juste un dernier, Charles Gave, l'Institut de l'économie allemande de Cologne estime que l'invasion de la Russie, en Ukraine, a amputé la production de richesses dans le monde de 1600 milliards de dollars en 2022, ce qu'on a cité. Selon l'étude publiée en février, elle coûtera encore 1000 milliards de dollars en 2023. Alors, ça veut dire quoi, ça ? Ça veut dire que c'est quelque chose qui était attendu ou que c'est quelque chose qui doit nous surprendre, Charles Gave ?
Charles Gave : les guerres coûtent cher et soient inflationnistes, c'est vieux comme les guerres, quoi, ça veut dire, il n'y a rien de bien nouveau, quoi. Ce qui est étonnant, c'est que les gens ne se soient pas souvenus de ce que disait de Gaulle, qui disait que "l'épée est l'axe de l'histoire". C'est-à-dire que ces braves crétins à Bruxelles ont cru qu'ils pouvaient sortir d'un monde dangereux, à coups de règlement, à coups de...
André Bercoff : Ah oui, la paix assurée à coups de règlement et de bureaucratie.
Charles Gave : Et de bureaucratie. La bureaucratie allait nous assurer la paix. Bon, on voit bien que ce n'est pas le cas. Et la réalité, c'est qu'il s'agit d'une guerre qui est tout à fait compréhensible, parce que le but, c'était d'essayer de continuer à s'assurer le contrôle par les États-Unis, du monde du pétrole, par l'intermédiaire du dollar, entre autres.
André Bercoff : C'est-à-dire de continuer la prééminence, enfin l'hyperpuissance absolue des États-Unis.
Charles Gave : C'était le but, et c'est en train d'échouer lamentablement, puisqu'au contraire, ça part dans l'autre sens, puisqu'aujourd'hui, il y a toute une série de pays qui peuvent acheter leur pétrole autre chose qu'en dollars. Je ne sais pas si vous vous souvenez, mais dans le temps, il y avait des gens comme Kadhafi ou Saddam Hussein qui se mettaient à vendre leur pétrole en autre chose que dollars, leur espérance de vie diminuait de façon considérable.
André Bercoff : Certes, drastique, oui.
"Et le dollar n'est plus la monnaie prééminente, donc ça déconstruit."
Charles Gave : Ce qui se passe en ce moment, c'est que la Russie, quand même, commençait à vendre beaucoup son pétrole en euros, ce qui a beaucoup déplu aux Américains, d'où toute une série de tentatives de gêner la Russie par l'intermédiaire de l'Ukraine. Il y a eu le coup d'état Maïdan, et puis ensuite tout ce qui s'est produit après. Mais aujourd'hui, les États-Unis sont en train de perdre le contrôle et du monde de l'énergie, et du monde du dollar. Et le dollar n'est plus la monnaie prééminente, donc ça déconstruit.
André Bercoff : Elle est déjà plus la monnaie prééminente, parce que quand même, la quasi-totalité de ces transactions, aujourd'hui, Charles Gave, alors nous parlons, se passe encore en dollars.
Charles Gave : Tout à fait, tout à fait, mais ça n'est plus obligatoire. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, par exemple, l'Arabie Saoudite vend son pétrole à la Chine en yuan, et c'était le plus gros importateur de pétrole. Aujourd'hui, le deuxième marché au monde futur sur le pétrole, c'est là où on fait des transactions à terme sur le pétrole, vous savez, qui est à Shanghai, ne cote plus en dollars, mais en yuan, enfin en renminbi. Donc vous êtes dans un monde, d'un seul coup, où cet héritage de la deuxième guerre mondiale, que les États-Unis contrôlaient les économies mondiales, puisqu'ils contrôlaient le dollar, et si vous n'aviez pas de dollars, vous n'aviez pas d'énergie, votre économie se viandait, et ben c'est fini, c'est fini aujourd'hui, c'est fini, l'Inde achète son pétrole à la Russie en roupie, et donc tout ça c'est en train de se péter la gueule à toute allure. Et ce qui est très intéressant, si on regarde l'utilisation des monnaies internationales, on voit que le dollar pour l'instant n'a pas tellement baissé, mais celui qui s'est complètement écroulé dans l'utilisation des monnaies internationales, c'est l'euro.
André Bercoff :Oui, l'euro est en plein écroulement.
Charles Gave : L'euro dans l'utilisation, les gens n'utilisent plus l'euro dans les transactions internationales.
André Bercoff : Donc ça le fait baisser, évidemment. (...)