Retranscription des premières minutes :
- Le Grand Matin Sud Radio, 7h-9h, Jean-Jacques Bourdin.
- Elisabeth Lévy, si nous parlions de l'affaire du petit Émile, enfin de l'affaire du petit Émile, de l'enquête sur la mort du petit Émile.
- Et en réalité, cher Jean-Jacques, j'aurais envie de vous répondre, si nous n'en parlions pas, pour la bonne raison qu'en réalité, on ne sait rien.
- On ne sait rien et je ne sais d'ailleurs pas pourquoi le procureur a cru bon d'annoncer Urbi et Torbi, non seulement la garde à vue des grands-parents, mais aussi le motif de cette garde à vue, donc suspicion d'homicide volontaire.
- Ce sont les faits, c'est la transparence des faits.
- Eh bien je pense, je vais vous dire pourquoi je pense que ce n'est pas une bonne idée.
- Parce que la réalité, c'est que nous ne savons toujours rien et que c'est le meilleur moyen.
- Nous ne savons pas s'ils sont incriminés directement, nous ne savons rien du tout, ils sont présumés innocents.
- Et que c'est le meilleur moyen de nourrir le moulin à rumeurs et de lancer quand même le barnum médiatique qui n'a pas manqué.
- J'ai fait un petit tour.
- Dans nos concurrents ce matin, eh bien on voit que des dizaines de journalistes ont déjà fondu ou vont fondre sur les malheureuses communes de la Bouilladis et le Petit Hameau du Haut-Vernay.
- Non, la Bouilladis c'est une ville de 6 000 habitants, c'est le Haut-Vernay.
- Oui, et le Petit Hameau du Haut-Vernay, c'est le bourg de la Bouilladis.
- Oui, c'est 6 000 habitants.
- Et les habitants donc sont invités devant chaque micro, chaque caméra à donner leurs hypothèses.
- On voit des comptes formés, ils sont pour ou contre les grands-parents, je vous assure.
- Parce que je l'ai entendu.
- On dissèque les petites manies de chacun et chacun sort ses bouts d'enquête, spécule sur le van ou sur d'autres éléments.
- Les experts en meurtre d'enfants sont convoqués et je vous l'avais bien dit que c'était la famille Triomphe également.
- Bien sûr, il ne nous manque que Marguerite Duras.
- C'est un juge écrasé par la pression médiatique pour qu'on se refasse un sinistre remake de l'affaire Grégory.
- Bien, dès qu'il y a malheureusement un fait dans les médias.
- On commente avant de s'attarder aux faits, avant d'expliquer, analyser.
- Ça, c'est une pratique effectivement absolument désagréable.
- Alors, que faire ? Ne pas en parler ? Dans un monde idéal où la vérité serait, Jean-Jacques, notre seule et unique boussole à tous, eh bien, on se contenterait de donner la formation, la garde à vue des grands-parents.
- Voilà, point.
- Ça prend 10 secondes et c'est terminé.
- On n'a rien d'autre à dire.
- Mais évidemment, ça ne se passe pas comme ça.
- Et il ne faut pas jeter la pierre.
- Et nous, participants, je participe évidemment au phénomène que je décris.
- J'essaye simplement de l'analyser.
- Mais nous avons aussi un public.
- Nous avons des auditeurs.
- Nous avons des lecteurs.
- La clientèle, comme dit affectueusement mon ami Golnadel.
- Et ce public veut savoir.
- Il veut savoir malheureusement en temps réel.
- Et s'il n'en parle pas, si on n'en parle pas, il ira bien sûr ailleurs chercher, acheter sa dose d'émotion, sa dose de pseudo-informations et de spéculations.
- Alors évidemment, nous sommes tous fascinés.
- Parce que c'est un fait divers au sens strict, vraiment.
- Il n'y a pas d'erreur des pouvoirs publics.
- Pas de loi défaillante.
- Pas de pays hostile à un criminel.
- Donc la collectivité n'est pas responsable.
- C'est un acte à la fois singulier, c'est-à-dire complètement même hors norme, évidemment, que de tuer un enfant si le meurtre est confirmé, si l'acte criminel est confirmé.
- Mais c'est aussi un acte universel.
- Et ça nous permet, dans le fond, en réfléchissant, ce n'est pas juste nos mauvaises armes, c'est aussi notre instinct, notre voyeurie.
- C'est parce que ça nous permet aussi de nous approcher de la question du mal comme, en quelque sens, le fait un grand roman.
- Alors bien sûr, on peut quand même, Jean-Jacques, apprendre collectivement de nos erreurs.
- Vous vous rappelez qu'à Lépange, et on en a parlé hier, parce que vous étiez, je crois, vous étiez à RTL à l'époque.
- Oui, oui.
- C'est ça.
- J'ai vécu de près l'affaire du...
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