Sur quoi la Cour de cassation va-t-elle se prononcer ?
Il ne s'agit pas de rejuger l'affaire. La Cour de cassation, la plus haute instance judiciaire, vérifie l'application du droit par les juges du fond. Elle a reçu les argumentaires des parties au début de l'année. La justice doit ainsi confirmer ou pas la condamnation des époux Tiberi, aujourd'hui âgés de 80 et 78 ans.En 2013, durant le procès en appel, ils ont continué de nier la mise en œuvre d'inscriptions frauduleuses sur les listes électorales. Le procureur général devrait demander ce mardi après-midi le rejet du pourvoi.
L’affaire des faux électeurs remonte aux années 1990
Cette affaire a marqué l'histoire politique de Paris. Jean Tiberi, issu d'une lignée corse comme sa femme, a été député de la 2e circonscription de Paris pendant quarante ans. Proche de Jacques Chirac – l'ancien président le désigne comme son successeur à la mairie de Paris en 1995 –, ce qu'il devient d'ailleurs après avoir conquis son fief du 5e arrondissement.Selon l’accusation, des proches du couple, sympathisants du RPR et autres personnes ne résidant pas dans l’arrondissement, avaient été incités à s’inscrire sur les listes aux municipales de 1995 et législatives de 1997, en échange d’un emploi, d’un logement ou même d’une place en crèche.En appel, l’avocat général avait décrit Jean Tiberi comme le concepteur d’une "opération massive d’inscriptions frauduleuses", dont les "maîtres d’œuvre" étaient son épouse et sa première adjointe. Il avait présenté Xavière Tiberi comme investie par son mari d’“un pouvoir considérable et irrégulier au sein de la mairie”.En 1997, les quelque 6 000 radiations effectuées sur les listes électorales après la découverte de la fraude reflétaient l'ampleur de l'affaire.En appel, en 2013, Jean Tiberi avait été condamné à dix mois de prison avec sursis, 10 000 euros d’amende et trois ans d’inéligibilité, comme en première instance d'ailleurs. Jean Tiberi était alors toujours maire du Ve, mais il a cédé la place aux dernières municipales.Son épouse avait été condamnée, comme en 2009, à neuf mois avec sursis et 5 000 euros d’amende.
16 ans entre les premières révélations et le procès
C'est Le Canard enchaîné, en 1997, qui révèle les premières informations, alerté par un haut fonctionnaire. Les journalistes épluchent la liste des électeurs. Ils trouvent effectivement des personnes domiciliées à des numéros de rue qui n'existent pas, ou des dizaines d'électeurs habitant à des adresses prétextes. Après 4 mois d'enquête, ils trouvent près de 800 faux inscrits.Puis, ses adversaires politiques, l'écologiste Yves Contassot et la socialiste Lyne Cohen-Solal, portent plainte. La machine judiciaire est lancée, mais l'enquête s'enlise. Il faut 3 ans pour établir un premier rapport, pourtant accablant. Seulement voilà, le Conseil constitutionnel valide l'élection, n'ayant trouvé que 800 faux électeurs, un score qui ne suffisait pas à changer potentiellement le résultat final du scrutin. Un recours vise finalement à réexaminer l'élection de 1997. Jean Tiberi dénonce lui des "opérations de déstabilisation".Il ne lâche rien. Pour les municipales de 2001 à Paris, la droite investit Philippe Seguin. Pourtant, Jean Tiberi tient à se présenter. Et laissera donc un boulevard à un certain Bertrand Delanoë, qui devient donc maire de Paris.
2008 : Jean Tiberi et son épouse devant un tribunal
En février 2008, les époux Tiberi sont renvoyés devant le tribunal correctionnel, ainsi que neuf autres prévenus. Le maire du 5e a été mis en examen en 2005 par les juges dans l'affaire des faux électeurs. On parle alors de 7 000 cas d'électeurs fantômes.En appel, en 2013, en pleine campagne pour se faire réélire une cinquième fois dans le 5e arrondissement, Jean Tiberi dénonce une "intrusion judiciaire dans la campagne électorale". Au final, l'affaire ne l'empêchera pas d'être réélu ! Les Tiberi restent coriaces. Pourtant, le procureur devrait demander le rejet du renvoi. Avec cet épilogue judiciaire, mais surtout l'échec de leur propre fils Dominique, l'an dernier aux municipales dans leur fief du 5e arrondissement de Paris, il y a comme une odeur de fin de règne pour la lignée Tiberi.