La scène a choqué le corps enseignant du lycée professionnel Jean-Baptiste Clément de Gagny, en Seine-Saint-Denis, et a même été filmée et diffusée sur les réseaux sociaux. Dans cet établissement, une professeure a en effet été giflée par un élève, un acte sur lequel revient Maxime Besselièvre, secrétaire départemental de la CGT Éduc’Action 93 et lui-même professeur d’histoire-lettres en lycée professionnel à la Courneuve.
"Bien heureusement, ce genre d’incident impliquant une violence physique envers un collègue n’est pas fréquent. Ce qui est fréquent en revanche, ce sont des conditions de travail et d’apprentissage pour les élèves et les personnels de la Seine-Saint-Denis qui ne sont pas suffisantes pour travailler dans un climat apaisé", clame-t-il. "Cet acte souligne la situation particulière qu’on vit en Seine-Saint-Denis avec un sous-investissement de l’État et de la région, en particulier dans les lycées. Il y a cette histoire du lycée Jean-Baptiste Clément de Gagny, mais il y a aussi une douzaine de lycées (sur les 68 que compte le département) qui ont été mobilisés depuis la rentrée de septembre avec de une à cinq journées de grève pour cause de manque de moyens (personnels et locaux) pour accueillir les élèves dans des conditions correctes. On fait cette rentrée en Seine-Saint-Denis avec les équivalents de 300 profs équivalents temps-plein en moins, ce qui nous ramène aux conditions de la rentrée 2012. Si ça n’explique pas, bien évidemment, l’acte de cet élève que nous condamnons fermement, il y a un climat scolaire tendu, avec des difficultés et des manques de moyens très importants", insiste-t-il.
"L’école est le réceptacle de toutes les tensions de la société"
Pour cet enseignant, la filière professionnelle doit faire l’objet d’une attention toute particulière de la part de l’Éducation nationale. "L’école est le réceptacle de toutes les tensions qu’il y a dans la société. Un tiers de la jeunesse (1 élève sur 3) est scolarisé dans la partie professionnelle du lycée. C’est une filière qui doit avoir des formations qualifiantes et permettre aux élèves d’avoir un espoir. Tant que le niveau de chômage est aussi fort à la sortie, ça n’aidera pas. Dans cet établissement en question, on est sur des filières tertiaires (vente, commerce, gestion, administration) et sur ce point il faut des moyens adaptés pour permettre les réussites d’élèves et notamment les poursuites d’études. Bien souvent, et les élèves le savent, il n’y a pas forcément de travail à la clé même en ayant son bac pro", déplore-t-il.
Maxime Besselièvre regrette également la tournure prise pour l’instant par les débats actuels sur la formation professionnelle. "On sait qu’une réforme de la formation professionnelle est en discussions. Mais on entend uniquement comme solution le développement de l’apprentissage. Nous pensons qu’il y a un mythe autour de ça, puisque l’apprentissage concerne d’abord les meilleurs élèves – contrairement à ce que l’on pense – qui sont recrutés par les entreprises. Alors que dans la voie professionnelle, on scolarise tout le monde sans discrimination", pointe-t-il.
Réécoutez en podcast l’interview de Maxime Besselièvre dans le Grand Matin Sud Radio