Pourquoi quatre condamnés sur dix à de la prison ferme n’exécutent en fait pas leur peine derrière les barreaux ? C’est ce que révèle un rapport de l’Institut pour la Justice qui déplore une volonté de cacher ces aménagements de peine, car trop impopulaires.
De la prison ferme pour 59% des condamnés
En analysant les chiffres des condamnations et des incarcérations du ministère de la Justice de 2016 à 2020, l'association a constaté que seulement 59 % des condamnés à une peine de prison ferme vont réellement en prison. Pour l’IPJ, c’est là tant le fruit d’une idéologie que du manque de places en prison. Ainsi, la réalité du recours à l’emprisonnement est à l’opposé du message envoyé par les sanctions prononcées. "Ce sont les chiffres de base, décrypte Pierre-Marie Sève, directeur de l’Institut pour la Justice. Nous sommes partis de chiffres officiels du ministère de la justice. Nous avons croisé les sources et fait un seul calcul. Le ministère de la Justice a été contacté par Le Figaro pour savoir si cela était vrai ou non. Ils ont reconnu que c’était assez cohérent."
Quels types de condamnations ne sont pas effectuées en prison ? "Les condamnations courtes, essentiellement et heureusement. Malgré tout, pour être condamné à une peine de prison ferme en France, il faut y aller. C’est cela qui est le plus inquiétant : nous parlons de quatre sur dix, mais de personnes condamnées à de la prison ferme. Soit une toute petite part des peines prononcées. La majorité des gens sont condamnés à du sursis, des obligations de soins…"
Une justice tournée vers la réinsertion
Est-il vrai qu’en dessous de deux ans, on ne va plus en prison ? "Avant, vous aviez de grandes chances. Maintenant c'est si vous avez été condamné à un an ou moins, mais vous avez 99% de chance de ne pas aller en prison. La cause officielle, c’est le manque de place de prison. Mais ce n’est pas qu’une question de moyens. C’est avant tout une question d’idéologie qui circule dans l’élite judiciaire, dans les universités. La prison serait mauvaise, pas la bonne solution. La réflexion pénale et judiciaire n’est tournée que vers la réinsertion du délinquant. Elle compte, mais la priorité du procès est de protéger la société, sanctionner le délinquant, et réparer le tort subi par la victime".
Le bracelet électronique est-il une bonne chose ? "Cela remonte aux années 1980 et nous vient des États-Unis. En France, il est arrivé dans les années 2000. Vous avez un bracelet à la cheville. La journée, vous faites ce que vous voulez, et le soir, vous devez être à proximité d’un boîtier. Mais les services de probation ont des milliers de cas à suivre, et ne vont pas vous appeler tout de suite tant que vous n’exagérez pas trop. Ce n’est pas dissuasif. Rien n’a été trouvé de plus dissuasif que la prison. Malheureusement, une punition doit être désagréable."
Retrouvez "Sud Radio vous explique" chaque jour à 7h40 dans le Grand Matin Sud Radio avec Patrick Roger.
Cliquez ici pour écouter “Sud Radio vous explique”
Toutes les fréquences de Sud Radio sont ici !