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Surveillance des messageries : "Jusqu’où la justice va permettre cette surveillance ?"

Par Aurélie Giraud

Faut-il autoriser la surveillance des messageries cryptées ? Damien Bancal, spécialiste des questions de cyber intelligence, était l'invité de Jean-Jacques Bourdin le 20 mars 2025 dans “Sud Radio vous explique”.

Kirill KUDRYAVTSEV - AFP/Archives

Le gouvernement veut instaurer un disposition contestée dans la loi contre le narcotrafic. Objectif : pouvoir accéder aux contenus des messageries cryptées, ce qui revient à créer une porte dérobée et à détruire la confidentialité des échanges.

Les messageries sont "quasiment toutes" cryptées aujourd’hui

"Il faut savoir qu’aujourd’hui tous ces outils qui nous permettent de communiquer permettent de chiffrer la communication", explique Damien Bancal, Spécialiste des questions de cyber intelligence et fondateur du site Zataz.com. Les messageries sont "quasiment toutes" cryptées aujourd’hui. "Parce que ça a été aussi un argumentaire marketing", rappelle-t-il. "Il y a impossibilité pour une personne non autorisée à lire les conversations."

Le gouvernement veut intégrer une exception dans le cadre de la loi. Pour bloquer le narcotrafic ou encore lutter contre le terrorisme. Sauf que la plupart des experts en sécurité sur Internet estiment que c’est un danger pour la vie privée. "On a clairement ici une histoire de morale" entre les utilitaristes et les kantiens, analyse Damien Bancal. La vision utilitariste juge que la police "va pouvoir espionner toute conversation privée pour permettre d’arrêter un réseau criminel". De son côté, le kantien met en garde : "si on surveille une personne, ça veut dire qu’on doit permettre la surveillance de tout le monde". "La problématique elle est là : jusqu’où la justice, la loi, va permettre cette surveillance ?", explique le spécialiste de cyber intelligence. Une idée qui remonte aux années 70, par ailleurs. "C’est compliqué."

"Si on explique aux professionnels du crime que leurs messageries peuvent être écoutées, ils vont mettre, eux, leur propre couche de cybersécurité"

Peut-on faire la part des choses ? Autoriser une surveillance et une certaine confidentialité ? "Je pense que ça s’appelle la justice", estime Damien Bancal. Ce sera elle le "garde-fou". "La justice ne dira pas ‘allez-y, surveillez tout et n’importe quoi’", juge le fondateur de Zataz. Mais les opposants s’inquiètent de possibles dérives futures.

Mais "on ne va pas se voiler la face", explique le spécialiste. "Si jamais les cybercriminels savent qu’il existe justement cette espèce de porte d’entrée", ils vont prendre des mesures pour la contrer. Et certains vont se dire "essayons de trouver la serrure", et donc utiliser à mauvais escient cette porte dérobée.

Est-ce qu’il existe des messageries cryptées totalement inviolables aujourd’hui ? "On en sait rien", affirme Damien Bancal, car celles-ci seraient alors cachées du grand public. Il rappelle qu’il y a quelques années, les autorités "ont arrêté des messageries ultra-sécurisées installées sur des téléphones spécialement conçus à cet effet". Et, de plus, "il existe plein d’outils me permettant de chiffrer des messages, puis passer par des messageries classiques". Selon lui, la question est simple : "si on explique aux professionnels du crime que leurs messageries peuvent être écoutées, ils vont mettre eux leur propre couche de cybersécurité". "Ils ont aussi des gens qui font de la recherche et développement."

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