L'élection Raphaël Arnault (NFP) à Avignon a suscité beaucoup de commentaires en raison de l'existence d'une fiche S sur sa personne. Virginie Duby-Muller, députée Droite Républicaine de Haute-Savoie, a même déposé une proposition de loi interdisant aux personnes fichées S de se présenter à des élections.
Virginie Duby-Muller : "Il y a, à mon sens, une faute morale de la part de LFI, qui avait connaissance de la fiche S de Raphaël Arnault"
Comme l’explique Virginie Duby-Muller, députée Droite Républicaine de Haute-Savoie, cette idée n’est pas totalement nouvelle. "Il faut savoir que cette proposition de loi avait déjà été déposée par mon collègue Robin Reda, et au Sénat par Roger Karoutchi. Donc il y avait déjà eu des initiatives parlementaires en ce sens. Moi, pendant toute ma campagne, j'ai eu beaucoup de retours négatifs sur la candidature de Monsieur Arnault de la part d'électeurs qui s’étonnaient qu'une personne qui soit fichée S, et même triple fichée S en l'occurrence, puisse être candidat à une élection législative. Il y a aussi, à mon sens, une faute morale de la part de LFI, qui avait connaissance de cette information et qui malgré tout, l'a investi pour le NFP dans la circonscription du Vaucluse."
Le mandat de député est-il incompatible avec le fait d'être fiché S, selon Virginie Duby-Muller ? "Oui, absolument. Nous avons accès à un certain nombre d'informations sensibles, nous représentons nos administrés. Je rappelle que quelqu'un qui est fiché S a quand même une surveillance particulière de la part des services de renseignement. Et à ce titre, ces personnes n'ont pas leur place dans un hémicycle. D'autant que, s'agissant de Monsieur Arnault, vous savez qu'il est antifa qu'il a eu aussi un certain nombre de faits à son actif. Il y a cette fiche S, mais il y a aussi d'autres évènements, qui ont d'ailleurs donné lieu à une condamnation. Et pour moi, il n'a pas sa place dans notre hémicycle."
Jean-Baptiste Soufron : "En France, ce n'est pas à l'administration de décider qui peut ou pas être candidat"
Jean-Baptiste Soufron, avocat du Barreau de Paris et ancien haut fonctionnaire, est de l’avis opposé. "On peut comprendre le besoin de moraliser la vie politique, et c’est vraiment une demande croissance chez tous les Français. Mais de là à vouloir passer par un criblage de qui peut être candidat ou pas à des élections… c’est une proposition qui ne me semble pas respecter l'État de droit. C'est l'administration qui décide si vous êtes sur une fiche S ou pas. Il y a 642.000 fiches S aujourd'hui. Normalement, en France, ce n'est pas à l'administration de décider qui peut ou pas être candidat. François Molins l'avait dit : ce n'est pas quelque chose d'acceptable. Marc Trévidic, pareil, avait qualifié ce genre de proposition d'aberrante. Toute décision administrative ou judiciaire qui serait basée seulement sur une fiche S serait nécessairement une façon de rendre la main à l'administration, voire au gouvernement. Et donc, de façon très concrète et très simple, de permettre au gouvernement de décider qui peut être candidat ou pas aux élections législatives."
"Le fichier S est un fichier de police qui a un vrai rôle : ça sert pour les informations et les enquêtes. En gros, si on a des informations qui permettent de déterminer que peut-être vous êtes lié à des opérations dangereuses, on va vous surveiller. On va pouvoir retracer vos déplacements, pouvoir faire des recoupements avec d'autres personnes qui sont également suivies etc. C'est juste un système d'information, mais ça ne veut pas dire du tout que vous êtes coupable. On va pouvoir ficher la famille de quelqu'un : on va pouvoir ficher ses frères, ses soeurs, ses collègues… Donc vous voyez, c'est quelque chose de très particulier, le fait de se focaliser comme ça sur le fichier S. En plus, ce n'est même pas une demande de la police. Mais au-delà de ça, c'est peut-être même dangereux pour l'usage du fichier en lui-même. Ce fichier est très utilisé. Mais il n'est pas du tout destiné à prendre des décisions. Et surtout pas à prendre des décisions qui seraient basées sur ce seul fichier", a poursuivi Jean-Baptiste Soufron.
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