De quoi Telegram s'est-il rendu coupable ?
Nathalie Loiseau : "Ce qui est illégal dans la vie réelle doit être illégal en ligne"
"Ce qu'on comprend, et ce que je partage, c'est que ce n'est pas parce que vous êtes une plateforme en ligne que ce qui se passe en ligne ne doit pas respecter les règles. Ce qui est illégal dans la vie réelle doit être illégal en ligne. Et donc, abriter des trafics de pédocriminalité, abriter des trafics de stupéfiants en ligne, ne pas coopérer avec la justice, ça a forcément des conséquences. Dans un pays qui respecte l'État de droit, ce qui est le cas de la France, c’est à la justice de décider. C'est la justice qui a demandé l'arrestation de Pavel Durov. Il est mis en examen, il est libéré sous contrôle judiciaire étroit, et c'est la justice qui tranchera", a déclaré Nathalie Loiseau.
Fabrice Epelboin : "Pavel Durov est une cible facile"
L'arrestation en France de Pavel Durov a été un coup de tonnerre mondial, elle a fait réagir dans de nombreux pays. C'est comme si la France avait été la première à briser un tabou. Pourquoi? "Parce que Pavel Durov est une cible facile. Les Brésiliens en ce moment tentent de s'attaquer à Elon Musk, et ils se sont aperçus pas plus tard qu'hier, suite à un communiqué de l'armée, que sans Starlink, l'armée brésilienne était totalement incapable de communiquer. Pour ce qui est de l'Europe, il n'y a pas de programme spatial européen sans Starlink. Sans Starlink l’Europe aurait été incapable d'assurer le lancement des satellites européens à un coût raisonnable. Il n'y a pas de transition écologique, sauf à se résigner à adopter des voitures électriques chinoises. Donc, on est sur un rapport de force qui est beaucoup plus facile avec Pavel Durov. Et puis surtout, il y a un contexte géopolitique qui est plus simple avec Pavel Durov. Il est détenteur de quatre passeports, dont un russe, un français et un émirati. Et le Wall Street Journal a révélé la semaine dernière que la France et les Émirats, en 2016, avaient mis sur écoute Pavel Durov. Donc, on est là dans quelque chose qu'il est difficile de ne pas voir comme un piège", a répondu Fabrice Epelboin.
"Dans ce cas-là, il faut interpeller Mark Zuckerberg, parce que vous pouvez également trouver de la prostitution infantile et de la drogue sur Facebook, tout comme Snapchat, dont le patron a également bénéficié d'un passeport français. Et Dieu sait que vous pouvez trouver et de la drogue et de la prostitution infantile sur Snapchat. Donc, à un moment on est plus dans l'arbitraire que dans la justice", a poursuivi Fabrice Epelboin.
"Il faut que les plateformes respectent les règles que nous avons décidées en commun au niveau de l'Union européenne"
Des échanges à caractère antisémite, on en lit tous les jours sur X. Est-ce que ça signifie que la prochaine fois qu’Elon Musk posera le pied sur le sol français, il faudra qu'il soit interpellé pour répondre de ce qu'il laisse échanger sur sa plateforme au même titre que Pavel Durov sur Telegram? "Il faudrait déjà qu'il réponde aux interpellations de la Commission européenne et que la Commission européenne entre dans un rôle qu'elle a rarement joué jusqu'à présent. Concrètement, si les dérives sont établies, qu’elle imposerait des sanctions. 6% du chiffre d'affaires mondial de n'importe quelle plateforme, je pense que ça fait réfléchir un Elon Musk ou un autre. Il faut qu'on soit absolument capables de faire ce que nous avons décidé que nous ferions", a répondu Nathalie Loiseau.
"Je constate que depuis qu’Elon Musk a pris la tête de X, on a vu changer cette plateforme. On a parfois l'impression d'ouvrir une poubelle quand on ouvre ce réseau social. J'ai constaté alors de manière très anecdotique et très personnelle : j'ai signalé des contenus qui consistaient en des menaces de mort me concernant. Aujourd'hui, quand vous signalez ces contenus à une plateforme comme X, vous avez une réponse. Qui vous dit que le contenu n'est pas contraire aux règles de la communauté. Là, il y a quand même un problème. Il est aujourd'hui temps que, si X ou d'autres veulent bénéficier du marché européen, ils respectent les règles que nous avons décidées en commun au niveau de l'Union européenne", a poursuivi Nathalie Loiseau.
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