La future feuille de route du gouvernement, le budget 2025, la possible censure de François Bayrou... Philippe Juvin a répondu aux questions de Maxime Lledo.
Budget 2025 : la politique de gauche d'Eric Lombard "est un point de préoccupation"
La composition du gouvernement de François Bayrou a été dévoilée avec une majorité de ministres de droite mais une surprise : Eric Lombard, anciennement à la tête de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) et personnalité plutôt de gauche, récupère le portefeuille stratégique de l’Économie. Philippe Juvin, député LR des Hauts de Seine et chef des Urgences de l'hôpital Pompidou, explique que depuis deux ans il dit "il faut arriver à une coalition parce que la France a besoin d’un gouvernement". "Quand il n’y a pas de majorité dans les urnes, il faut que les hommes et les femmes politiques soient suffisamment intelligents et souples pour créer es majorités." Néanmoins, il ne manque pas de rappeler au nouveau ministre de l’Économie qu’il doit "définir une feuille de route". "Pour l’instant, je ne la vois pas encore."
Eric Lombard, lors de sa passation de pouvoirs, a tenu un discours plutôt ancré à gauche, annonçant plus de justice sociale ou encore se réclamant de Michel Sapin. "Je ne vous cache pas que c’est un point de préoccupation", confie Philippe Juvin. "La situation économique du pays devrait être, en fait, la seule préoccupation" du gouvernement et des politiques. "Nous sommes dans un moment de décrochage", prévient le député LR. Pour résoudre le problème, il estime qu’il faut "dépenser moins", "dépenser mieux" et "travailler plus".
Si, au premier abord, les positions de Philippe Juvin et Eric Lombard semblent en opposition, le chef des urgences de l’hôpital Pompidou lui laisse une chance : "laissons lui le temps de présenter un Budget". Mais il prévient : "le pays ne s’en sortira que s’il fait des économies et s’il arrête d’augmenter les impôts".
"Mayotte est une sorte d’expression exacerbée des insuffisances d’une classe politique qui sait et qui pourtant n’agit pas."
Mayotte a été frappée par celle qui pourrait être la plus grosse catastrophe naturelle de l’histoire de France. Pour Philippe Juvin, c’est toutefois même plus que ça. "Ce qui se passe à Mayotte est finalement assez révélateur de ce qui se passe ne France." S’il ne nie pas que la catastrophe est évidemment une "tragédie", il estime qu’elle "ne fait que révéler au grand jour un état de déliquescence que nous sommes plusieurs à dénoncer depuis des années". Le département de Mayotte avait notamment des problèmes d’eau potable, de santé et d’immigration… des problèmes qui n’ont fait qu’aggraver le bilan du cyclone Chido. "On a laissé aller les choses au vu et su de tout le monde." Et alors que tout le monde savait, "la classe politique n’a pas agi à Mayotte". Cette catastrophe est "un cruel révélateur d’une classe politique qui ne sait pas prendre les décisions".
Il fait donc un parallèle, qu’il estime lui-même "un peu osé", avec le reste de la France. "au vu et au su de tout le monde", les politiques français n’ont pris aucune décision pour contrôler l’immigration ou encore les comptes publics. "Tous les rapports existent. Tous les compte-rendus existent. Tous les commentaires disent ce qu’il faudrait faire… et pourtant aucune décision n’est prise." De quoi faire augmenter la grogne des Français, pour Philippe Juvin, qui "à un moment ne vont pas laisser faire".
"Et un jour, on nous prêtera plus. Et un jour le Fonds Monétaire International arrivera à Paris" et mettra la France sous tutelle comme ce fut le cas en Grèce. "Mayotte est une sorte d’expression exacerbée des insuffisances d’une classe politique qui sait et qui pourtant n’agit pas."
"Nous ne voterons pas de motion de censure parce que le pays ne peut pas se le permettre, mais nous ne voterons pas un budget qui a une augmentation des impôts et des taxes."
Après l’annonce de la composition du gouvernement de François Bayrou, la question d’une possible censure du gouvernement dès janvier 2025 se pose, d’autant plus que la gauche est remontée contre le nouveau Premier ministre. Or, François Bayrou a déclaré que la réforme des retraites, qui crispe toutes les tensions depuis 2023, serait mise en suspens, ce qui aurait un coût pour les finances publiques. Pour Philippe Juvin, c’est tout l’inverse de ce qu’il faut faire : "il faut dépenser moins".
Ira-t-il jusqu’à censurer le gouvernement Bayrou si le Budget 2025 qui sera présenté en janvier 2025 ne lui convient pas ? Non. "Voter la motion de censure est un acte politique qui crée du trouble sur le trouble." Pour le député LR, le RN et LFI ont fait "une grande erreur" en faisant tomber le gouvernement Barnier. "On a mis le pays dans une position pire que la situation qu’il connaissait." Il est donc clair : la motion de censure, "il ne faut pas l’utiliser".
Pour autant, il n’ira pas dans le sens du gouvernement aveuglément. Il veut "empêcher que le gouvernement fasse des bêtises" comme augmenter les impôts ou les dépenses. "Nous ne voterons pas de motion de censure parce que le pays ne peut pas se le permettre, mais nous ne voterons pas un budget qui a une augmentation des impôts et des taxes."
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