Proposition de loi sur la fin de vie, soins palliatifs, mortalité infantile, économie budgétaire, avenir de la droite : Philippe Juvin a répondu aux questions de Jean-Jacques Bourdin.
"On propose la mort à des personnes qui ne sont pas en fin de vie !"
Le député Les Républicains (LR) des Hauts-de-Seine et chef du service des urgences de l’hôpital Georges Pompidou, Philippe Juvin, s’oppose fermement à la proposition de loi sur la fin de vie examinée en commission. "Il est faux de dire que c’est une loi sur la fin de vie !", affirme-t-il. Selon lui, le texte permettra "d’ouvrir l’euthanasie à des personnes qui ont encore des années à vivre", comme les patients dialysés ou atteints de cancers métastasés traités efficacement par immunothérapie.
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Le médecin juge que les critères retenus sont flous. "Si vous avez une souffrance psychologique intolérable, mais que c’est vous-même qui la jugez, vous pouvez demander l’euthanasie." Il déplore une procédure "expéditive", avec une décision possible "entre 0 et 17 jours", alors qu’"une consultation contre la douleur peut nécessiter jusqu’à six mois d’attente". Pour lui, cette loi propose "la mort à des personnes qui ne sont pas en fin de vie".
Fin de vie : "L'euthanasie va être ouverte à des personnes qui ont encore des années à vivre" alerte @philippejuvin pic.twitter.com/LRcxEkE4ny
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Fin de vie : "Aujourd’hui, il n’existe plus d’acharnement thérapeutique"
Philippe Juvin défend les soins palliatifs comme véritable réponse à la souffrance des malades. Il rappelle que "lorsqu’ils entrent en soins palliatifs, 3% des patients demandent à mourir. Une semaine plus tard, ils ne sont plus que 0,3%." Ce changement montre selon lui qu’une réponse médicale et humaine peut suffire : "On a apporté des réponses à leurs demandes. On a calmé la douleur. On a restauré la dignité." "Ce que veulent les patients, c’est ne pas souffrir. Et ça, on peut le leur offrir."
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Loin de nier les situations douloureuses, le député-médecin insiste sur la pratique actuelle. "Quand quelqu’un souffre beaucoup, on a la possibilité légale de l’endormir. Cela s’appelle la sédation profonde." Cette anesthésie terminale permet selon lui de soulager sans provoquer délibérément la mort. "Depuis 35 ans, on ne donne plus de cocktails létaux. On accompagne. On soulage. On respecte."
Fin de vie : "Aujourd’hui, il n’existe plus d’acharnement thérapeutique. Dans une société civilisée, la réponse à la douleur ne doit pas être la mort" déclare @philippejuvin pic.twitter.com/wnjoiYN6oF
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"La main qui soigne ne doit pas être la main qui tue""
L'argument de la liberté, souvent invoqué par les défenseurs du texte, est retourné par Philippe Juvin. Il met en garde contre une dérive insidieuse du texte en l’état. "Le patient est-il vraiment libre quand il est seul, pauvre, isolé, en EHPAD sans visite ? La liberté réelle, c’est d’être soutenu. Dans l’Oregon, ce sont surtout les pauvres qui recourent au suicide assisté. Pourquoi ? Parce qu’ils sont seuls, donc moins libres de leur choix."
Fin de vie : "Quand on souffre d’une dépression sévère, quand on n’a pas Omar Sy pour pousser un fauteuil… Est-on vraiment libre de choisir de mourir ? Quand on est pauvre et seul, on est moins libre de ses choix" signale @philippejuvin pic.twitter.com/a1ud1rwFBM
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Interrogé sur la possibilité d’administration du produit létal par un professionnel de santé, Philippe Juvin s’oppose catégoriquement à cette disposition, même si elle est désormais encadrée par un amendement. "La main qui soigne ne doit pas être la main qui tue", affirme-t-il, précisant qu’il refuse que le personnel médical se retrouve dans cette ambiguïté. "Quand j’entre en blouse blanche dans une chambre, je ne veux pas que le patient se demande si je viens le soigner ou lui donner la mort." "Dans un système imparfait, l’auto-administration reste moins pire que l’acte direct d’un soignant."
Fin de vie : "La main qui soigne ne doit pas être la main qui tue !" lance @philippejuvin pic.twitter.com/W7ZVbK0NmS
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"100 000 infirmières diplômées ne pratiqueraient pas la médecine"
Philippe Juvin alerte sur une crise silencieuse dans les hôpitaux : le départ massif des soignants. "On estime à 100.000 le nombre d’infirmières diplômées qui ne pratiqueraient pas la médecine. C’est énorme." Selon lui, ce phénomène s’explique par la souffrance psychologique et les conditions de travail difficiles. "Vous voyez des gens mourir, souffrir. Ce métier est dur. Dans un monde aseptisé, digital, où tout est filtre et perfection, on n’est pas préparé à cette réalité."
Il évoque aussi une désorganisation des services. "Il n’y a pas un hôpital en France où tous les postes sont pourvus. C’est une situation nationale." Philippe Juvin appelle à "prendre soin de ceux qui soignent", et alerte sur les plaintes récentes pour harcèlement moral et homicide involontaire. "Il y a des suicides dans les hôpitaux. Ça devrait nous alerter tous."
"Il n’y a pas un seul hôpital en France où tous les postes sont pourvus. En France, il y aurait 100 000 infirmières qui ne pratiqueraient pas leur métier" regrette @philippejuvin pic.twitter.com/TCwPYTnbUa
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Mortalité infantile : "La première hypothèse, ce sont les pathologies liées à la maman"
La mortalité infantile connaît une hausse discrète mais régulière en France. Le pays est désormais 23e sur 27 dans l’Union européenne. "C’est la mort d’un bébé entre la naissance et la première année. La moitié, c’est dans la première semaine" précise Philippe Juvin. "Et en France, on n’enregistre pas les causes."
Le médecin pointe un faisceau de causes possibles : "Obésité, tabac, alcool, précarité, isolement des mères." Il insiste également sur la prévention : "Il faut coucher les bébés sur le dos, pas de peluches, pas d’animaux, pas de lit partagé. Les photos des couches montrent souvent le contraire. C’est dramatique." Pour lui, un meilleur suivi des causes de décès permettrait d’agir efficacement. "Aujourd’hui, on navigue à vue."
Mortalité infantile : "La première hypothèse, ce sont les pathologies liées à la maman : l’obésité, le tabac, l’alcool" indique @philippejuvin pic.twitter.com/ZGm5vzHSBh
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Budget 2026 : "Il faut travailler plus !"
Sur le terrain économique, Philippe Juvin soutient une ligne claire : "Il faut travailler plus, dépenser moins." Il critique l’état des finances publiques et les annonces du gouvernement. "40 milliards d’euros d’économies annoncées pour 2026, mais on ne sait pas comment." Il alerte : "On ne peut pas toujours augmenter les impôts. On est au maximum."
Selon lui, une solution concrète existe : "Si on travaillait autant qu’en Hollande, la moitié de notre déficit disparaîtrait. On a 5 millions de chômeurs et aucune entreprise qui ne cherche pas à recruter. C’est un paradoxe." Il insiste sur le temps de travail. "La France est le pays de l’OCDE où l’on travaille le moins. Ce n’est pas soutenable."
Budget 2026 : "Il faut travailler plus !" pour @philippejuvin pic.twitter.com/4fM1zXx0aY
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"La droite doit avoir une primaire. Sinon, elle ne sera pas au second tour"
Côté politique, Philippe Juvin soutient Bruno Retailleau pour la présidence des Républicains. Il défend sa capacité à rassembler : "J’aime sa manière de faire travailler ensemble les fédéralistes, les souverainistes, les libéraux. La droite est diverse, Bruno Retailleau le comprend." Face à Laurent Wauquiez et sa proposition d’un "Guantanamo à la française", il reste mesuré : "Ce n’est pas notre proposition. Mais je ne critique pas un membre de mon parti. Il fait campagne, chacun jugera."
OQTF dangereux "enfermés" à Saint-Pierre-et-Miquelon : "Oui, c'est déroutant, (...) mais @laurentwauquiez fait campagne. Chacun jugera" affirme @philippejuvin pic.twitter.com/SpaWT4Re2K
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Pour 2027, il appelle à une primaire ouverte, condition selon lui d’un second tour possible. "Si on est 10 candidats, on n’y sera pas. Il faut un moyen de départager : une primaire ouverte. La dernière a fait gagner Fillon. Il n’a pas perdu à cause de la primaire, mais à cause de ses costumes."
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"La nationalité française, ça se désire"
Interrogé sur l’accès à la nationalité française, Philippe Juvin rejoint la proposition de Bruno Retailleau qui souhaite supprimer l’automaticité de l’attribution pour les enfants nés en France de parents étrangers. "L’acquisition de la nationalité française ne doit pas être automatique", déclare-t-il.
Pour le député, devenir Français implique un engagement : "La France, elle se désire. On ne devient pas Français par automaticité administrative, mais par volonté." Il appelle à faire de la nationalité un acte de choix et de conscience, plutôt qu’un simple fait juridique.
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"Donald Trump a le même programme que la France Insoumise, et à la fin, c’est le consommateur qui paye !"
Enfin, sur le protectionnisme économique, Philippe Juvin établit un parallèle avec LFI. "Donald Trump a le même programme que la France Insoumise." En cause, une même tentation de hausse des tarifs douaniers. "Mais à la fin, c’est le consommateur qui paye !", insiste-t-il.
Il prend des exemples concrets : "Votre chemise chinoise coûtera plus cher, mais on ne rouvrira pas d’usines en France pour autant." Il évoque également Boeing, dont les composants viennent de 40 pays. "Trump va taxer les composants de Boeing, et c’est Boeing qui va payer." Selon lui, le protectionnisme pénalise à la fois le consommateur et l’industrie nationale.
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