Le dimanche 1er octobre 2023 à 21h10, France 5 diffusera l'enquête de Frédéric Ploquin "Le monde en face : La drogue est dans le pré".
Frédéric Ploquin : "Les trafiquants de stupéfiants, ils ont leur business plan, ce sont des commerçants"
Le documentaire de Frédéric Ploquin raconte comment le trafic de drogue s’est propagé sur l’ensemble du territoire, dans les petites villes et les villages. "Dans cette enquête je vais des deux côtés de la barrière. Je travaille sur la police, donc j’ai des contacts à la police, à la gendarmerie, à la douane, qui parlent dans le film… Et de l’autre côté je fais parler les trafiquants eux-mêmes. Je pense que c’est à travers cette confrontation que le téléspectateur va comprendre des choses. Un dealer explique par exemple comment il a quitté une zone urbaine trop dense en région parisienne, où il y avait trop de concurrence, trop de danger. À un moment il s’est dit : 'pourquoi je n’irais pas à la conquête de nouveaux territoires ?'. Et c’est évident : s’il n’y avait pas de clients, les dealers repartiraient tout de suite. Pendant un certain temps il est tout seul sur le marché, tout se passe très bien. Puis, à un moment donné, va se reproduire ce qui se produit en ville : il va y avoir de la concurrence, de l’excitation, l’un qui balance l’autre… C’est comme ça que je suis parti sur ce sujet : j’ai vu qu’il y avait des règlements de comptes au Mans, à Châteauroux, à Besançon, à Blois, à Vierzon, à Dreux…"
"Il y a vingt ans, au fin fond de Normandie, il y avait énormément de contrôles routiers, qui permettaient de prendre des conducteurs qui conduisaient sous l’emprise de l’alcool. Aujourd’hui il y a plus de cas de conduite sous l’emprise de stupéfiants. C’est un signe, c’est un indicateur. Le monde rural d’aujourd’hui n’est pas celui des années 1970-1980. Les trafiquants de stupéfiants, ils ont leur business plan, ce sont des commerçants. Leur but est de conquérir et fidéliser de nouveaux clients. C’est l’un des grands changements de ces dernières années : la cocaïne était consommée par une petite élite parisienne, le showbiz, le monde des médias et de la pub… Et pour les trafiquants, c’est pas bon car c’est pas assez de clients, c’est petit comme clientèle. Alors ils sont partis à la conquête de gens ordinaires, de travailleurs et sont tombés sur des gens qui ont besoin de cet excitant pour tenir dans des conditions de travail difficiles. Ils ont commencé à fidéliser des marins-pêcheurs, des boulangers, des agriculteurs… : des gens qui bossent 10-15 heures par jour, de nuit. Et pour un trafiquant, c’est beaucoup plus intéressant qu’un jeune bobo parisien", explique Frédéric Ploquin.
"Les policiers ne sous-estiment pas les dealers"
Pourquoi est-ce si difficile de mettre fin à ce marché clandestin ? "Le trafic international de stupéfiants est relativement hors de contrôle. Mais on ne peut pas dire que les États ne font rien, en tout cas l’État français. L’État français ne peut pas faire tout tout seul, il a besoin d’autres pays : la marchandise vient de l’étranger, l’argent repart à l’étranger… Il ne faut pas sous-estimer l’adversaire, et les policiers ne les sous-estiment pas. Les dealers ne sont pas des imbéciles. Cette intelligence, ils auraient pu la mettre au service du commerce légal. Et je pense qu’un certain nombre de ces individus, s’ils n’avaient pas basculé du côté obscur, seraient aujourd’hui des grands chefs d’entreprise", a répondu Frédéric Ploquin.
Quelle est l’étendue de ce marché ? "Les Français consomment environ 1,3 tonne par jour de shit ou d’herbe. Par jour ! C’est-à-dire une quarantaine de tonnes par mois", a fait savoir Frédéric Ploquin.
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