Le mandat d'Hervé Godechot à l'Arcom prend fin aujourd'hui. Quel bilan tirer de ces six années de travail pour le régulateur des médias ?
Hervé Godechot : "Les journalistes sont confrontés à cette ‘concurrence’ de tous ceux qui se croient journalistes"
Qu’est-ce qui a changé dans les médias en six ans ? "Des plateformes de vidéo à la demande, il n’y en avait pas tant que ça : il y avait Netflix et Amazon. S’agissant de la radio, le DAB+, c’était 20% de couverture, alors qu’aujourd’hui c’est 65% de couverture et 620 radios qui sont dessus. On commençait à s’intéresser à la lutte contre la haine en ligne et les fausses informations sur les réseaux sociaux, mais la loi de décembre 2018 n’a jamais été véritablement opérationnelle. Aujourd’hui c’est entré dans le domaine de la régulation avec le Digital Services Act et sa traduction nationale, la loi SREN", a raconté Hervé Godechot.
Hervé Godechot tient à rappeler à quel point la donne change constamment pour les médias. "J’interviens beaucoup dans des écoles de journalisme, et je dis toujours aux étudiants qu’ils ne feront pas du tout le même métier que moi, il y a 35 ans. À mes débuts, le journalisme était quelque chose de ‘simple’ : on collectait l’information, on la vérifiait, on la traitait et on la diffusait. Aujourd’hui, les journalistes sont confrontés à cette ‘concurrence’ de tous ceux qui se croient journalistes et qui diffusent et charrient sur les réseaux sociaux un peu tout et n’importe quoi. On voit d’ailleurs aujourd’hui que toutes les grandes rédactions ont des cellules de vérification de l’information."
Maintenant qu’il quitte l’Arcom, par quelles restrictions est-il tenu ? "L’Arcom est une autorité indépendante, donc on veut être sûrs qu’un conseiller à l’Arcom ne va pas être corruptible pendant son exercice à l’Arcom, mais aussi après. Donc, ça interdit tout naturellement d’aller travailler pour des médias qui sont régulés par l’Arcom, mais aussi pendant trois ans pour des entreprises qui ont 30% de capital commun avec un média régulé par l’Arcom. Autant vous dire, à l’heure des groupes intégrés de médias… je vais bien trouver autre chose. En tout cas, on ne va pas me revoir sur une antenne de radio ou de télévision pendant au moins trois ans", a fait savoir Hervé Godechot.
Radios : "À partir d’un certain chiffre d’affaires, on rentre dans un régime de convention"
La radio reste-t-elle un média auquel les gens sont fidèles ? "Tout à fait : entre 39 et 40 millions Français par jour écoutent la radio, 2h45 par jour en moyenne. On a un paysage radiophonique quasiment unique au monde : on a aux alentours de 1.000 stations de radio », a répondu Hervé Godechot.
Quid des webradios ? Sont-elles régulées par l’Arcom ? “Jusqu’à un certain chiffre d’affaires, les webradios ont juste une déclaration à faire comme quoi elles émettent sur le web. Et puis, à partir d’un certain chiffre d’affaires, on rentre dans un régime de convention, comme n’importe quel média."
Hervé Godechot voit-il arriver une radio intégralement pilotée par l’IA ? "D’un de vue réglementaire, je ne vois pas ce qui s’y opposerait. La question qui se pose, c’est plutôt : quel est l’intérêt de faire ça ? Je n’y crois pas trop. Ce qui fait l’intérêt et la magie de la radio, c’est sa singularité, les gens qui sont derrière le micro. Si on remplace ces gens par une machine…"
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