Le documentaire "La Fabrique des Pandémies" de Marie-Monique Robin sera diffusé le dimanche 22 mai 2022 sur Ushuaïa TV, à l’occasion de la Journée de la Biodiversité.
Marie-Monique Robin : "La biodiversité, quand elle n’est pas endommagée, protège"
"Avant même le confinement, j’ai vu un article dans le New York Times qui disait : 'We made the pandemics' ('c’est nous qui avons fait la pandémie'). J’ai creusé le sujet, et j’ai découvert que depuis 30 ans, des scientifiques tiraient la sonnette d’alarme en disant : attention, si nous continuons à détruire les écosystèmes, et notamment les forêts primaires en zone tropicale, nous allons rentrer dans l’ère des épidémies. On parle beaucoup de Covid-19, mais avant aussi, il y avait beaucoup de maladies émergentes comme Ebola en Afrique, le sida, le chikungunya, MERS, le virus Nepah… la liste est longue.
Pour mon livre, j’ai interviewé 62 scientifiques. Et ils disent que c’est les activités humaines, notamment en zone tropicale, où il y a une grande biodiversité, qui encouragent l’émergence de ces virus. Nous y coupons des arbres. Or, la biodiversité, quand elle n’est pas endommagée, protège, réduit le risque infectieux. Et ça, c’est tout à fait nouveau", a déclaré Marie-Monique Robin.
"Quand les chauves-souris stressent, elles se mettent à excréter des virus"
Marie-Monique Robin a notamment cité deux exemples d’épidémies dans lesquelles les chauves-souris ont joué un rôle clé. "À la fin des années 1990, on est en train de déforester sur l’île de Bornéo pour planter des palmiers à huile. Et les chauves-souris qui vivent dans cette île doivent s’enfuir parce qu’on détruit leur habitat. Et les chauves-souris ont la merveilleuse capacité d’héberger une multitude de virus sans tomber malades, ils sont des porteurs sains. Quand elles sont obligées de s’enfuir, elles stressent. Et quand elles stressent, elles se mettent à excréter ces virus. Par leur urine et leurs excréments, elles peuvent contaminer des fruits qui vont être mangés par des singes. Puis, des humains vont manger des singes, et voilà comment on se retrouve avec Ebola.
Dans mon histoire, je parle des côtes de Malaisie, où on a planté une monoculture de manguiers, située au-dessus d’une ferme porcine industrielle. Les chauves-souris contaminent ces mangues. Les mangues tombent, les cochons mangent les mangues, tombent malades et meurent. Elles contaminent à leur tour les ouvriers agricoles des fermes porcines. Vous voyez, un virus qui vient de chauves-souris n’est pas transmis directement à l’homme, il faut qu’il y ait un animal intermédiaire qui va servir de pont. Et le cochon, c’est un très bon client parce qu’avec le cochon, nous avons 90% des gènes en commun. Puis, ces cochons partent à l’exportation, parce que la Malaisie est un pays musulman, ils ne mangent pas de cochon. Ces cochons arrivent ensuite à Singapour, et c’est comme ça que commence l'épidémie du virus Nipah."
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