Le 5 décembre 2024 à 23 heures, France 2 diffuse un nouveau numéro de "Complément d’enquête" : "Action : toujours moins cher, mais à quel prix ?", un documentaire réalisé par Blanche Lacroix et Nathalie Gros.
Nathalie Gros : "On n'a jamais été seuls dans un magasin Action sans un chargé de com’"
Pourquoi avoir choisi d’enquêter sur cette enseigne ? "C'est vrai que c'est un phénomène en province, en dehors de Paris. Et puis, deux années de suite, c’est l'enseigne préférée des Français, les prix les plus bas. Et puis, un véritable phénomène en ligne : sur TikTok, sur les réseaux sociaux, des communautés d''Action addicts'. J’ai donc invité Nathalie à voir ce qu'il y a derrière ces petits prix, comment c'est possible", a répondu Blanche Lacroix.
Comment les dirigeants d'Action ont accueilli les deux journalistes ? Leur ont-ils ouvert leurs portes, ou redoutent-ils au contraire une enquête sur leur enseigne ? "Je pense qu’il y a certainement un mélange des deux. Ils ont certainement dû réfléchir avant, mais ils ont choisi de nous ouvrir les portes. Donc, c'était assez inhabituel, une entreprise qui accepte de recevoir les journalistes qui enquêtent sur elle. À certaines conditions toujours. C'est-à-dire qu'on n'a jamais été seuls dans un magasin Action sans un chargé de com’, qui soit soit issu de l'équipe salariée d'Action, soit du cabinet de conseil qui les a accompagnés tout au long de notre travail", a fait savoir Nathalie Gros.
Les deux journalistes ont pu jeter un clin d’œil sur le travail du service des achats… "Il y a plusieurs étapes qui qui recouvrent toute la vie du produit, à partir du moment où ils vont choisir d'acheter, de construire leur assortiment. Donc, ça se passe au niveau du service des achats. Ils sont pas très nombreux : on pourrait s'attendre à ce qu'ils soient beaucoup plus nombreux, vu l'étendue de l'offre, il y a quand même des magasins dans douze pays d'Europe. Ils sont une vingtaine d'acheteurs seulement, tous aux Pays-Bas. Il y a un choix des produits qui est fait, vraiment très fin, avec des fournisseurs avec des méthodes de négociation qui font que, généralement, Action obtient ce qu’il veut", a raconté Nathalie Gros.
"À aucun moment derrière notre enquête, on ne cherche à dénigrer"
Comment Action coexiste-t-il avec la concurrence ? "Ça me fait penser un peu à la fast-fashion aussi. Ce qu'on voit aujourd'hui avec la déferlante Shein, cette enseigne chinoise vendue en ligne, c’est que tout ce qui est moyen de gamme a du mal à survivre. Les boutiques physiques ont du mal à survivre. Après, on a beaucoup parlé à Action de leur concurrence. Et ils avaient l'air de dire qu'il y avait quand même un effet positif : c'est à dire que là, il y avait un Action, là un GIFI, souvent un Stokomani, un Centrakor… On ne peut pas lier non plus totalement l'essor d'Action avec le cas GIFI. Mais ce qui est sûr, c'est que c'est un rouleau compresseur. Dans l'enquête, on le voit dans nos témoignages : ces petits prix-là n'arrivent pas par hasard. Ils ont un prix. Et ce prix-là a des conséquences sociales très importantes", a fait savoir Nathalie Gros.
En même temps, Nathalie Gros tient à préciser : "L'idée de cette enquête, c'est de comprendre la méthode. On a aussi cette chance d'avoir pu pénétrer les coulisses, donc c'est vraiment exceptionnel. Et évidemment, à aucun moment derrière notre enquête, on ne cherche à dénigrer. C'est vraiment une enseigne qui a sa place dans le paysage. C'est d'autant plus pour ces raisons-là que c'est une enquête qui était, à nos yeux, une enquête d'utilité publique. C'est que c'est une enseigne où 21% des Français se sont rendus le mois dernier pour acheter des produits à la fois plaisir et à la fois de première nécessité."
"Il y a beaucoup de turn-over et d’absentéisme"
Blanche Lacroix raconte l’éternelle course contre la montre pour les salariés d’Action : "Sur chaque charrette il y a une étiquette qui est calculée avec un algorithme qui dit combien de temps, minutes et secondes précises les employés, qui sont polyvalents, ont pour faire la mise en rayon. Et ça, ça ne prend pas forcément en compte les clients qui interpellent en magasin, le fait d'aller ouvrir une caisse, le fait de ranger d'abord l'assortiment en magasin… Il y a donc une optimisation du temps de travail qui est calculée par un algorithme."
Ceci dit, y a-t-il beaucoup de turn-over ? "Il y a beaucoup de turn-over dans l'enseigne. Ça vient aussi du fait que c'est des emplois où il y a beaucoup d'étudiants, de jeunes. Ce n'est pas uniquement parce que personne ne reste. Mais quand même, il y a un fort turn-over qui pose question. Il y a beaucoup d'absentéisme aussi, avec des absents pas toujours remplacés", a raconté Blanche Lacroix. "L'absentéisme tourne autour de 10% dans cette enseigne. Concrètement, ça veut dire sur dix salariés, il manque une personne le matin, quoi", a ajouté Nathalie Gros.
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