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Sarah Barukh : "La violence se reconnaît à la peur"

Par Jean-Baptiste Giraud

Claire Lajeunie, réalisatrice, et Sarah Barukh, auteure, étaient les invitées de Valérie Expert et Gilles Ganzmann sur Sud Radio le 3 juillet 2024 dans "Le 10h - midi".

Le 3 juillet 2024 à 21h15, C8 diffusera "Vivantes", un documentaire inédit de 94 minutes, avec Sarah Barukh, qui a imaginé et conçu l'ouvrage collectif "125 et des milliers" paru en 2023 (Éditions Harper Collins).

Sarah Barukh : "J’ai du mal à considérer que les monstres existent"

Sarah Barukh a tout d’abord raconté son histoire personnelle. "Je me suis enfuie avec mon bébé dans la nuit du 5 au 6 juin 2020. Et très rapidement, comme je ne correspondais pas vraiment au stéréotype des femmes victimes de violences telles qu’on les décrit (des femmes qui ne maîtrisent pas bien la langue française, qui viennent d’un milieu défavorisé)… J’ai été accueillie par mes parents, j’ai retrouvé ma chambre d’ado avec mon bébé de 16 mois. J’étais accablée par la honte."

Cela arrive-t-il à Sarah Barukh de se dire que son enfant est l’enfant d’un monstre ? "J’ai du mal à considérer que les monstres existent, je pense que tous sont les résultats d’une histoire. Et j’ai un véritable problème à porter un jugement sur les humains. J’ai du mal à vivre avec la colère. Je ne lui pardonne pas de ne pas s’être soigné comme je lui demandais. C’est ça qui me met en colère. Je rêvais d’avoir une grande famille avec trois enfants, c’est quelque chose qui ne m’arrivera pas. J’ai perdu des années à ne pas voir ma famille comme je l’aurais aimé, j’ai perdu de vue des amis, je n’ai pas écrit comme j’aurais aimé… Tout ça, je ne le récupérerai pas."

"Si on peut sauver au moins une femme, on aura gagné le pari"

Comment l’idée de ce film est-elle revenue à Claire Lajeunie ? "J’ai vu beaucoup de films sur ce thème, et je me demandais ce que pouvais faire de plus. J’ai vu les derniers documentaires sur les hommes violents et la justice réparatrice, dont on parle tant. Et je n’avais pas envie de faire la même chose, je me demandais ce que je pouvais faire à mon petit niveau de réalisatrice pour essayer de faire bouger les lignes. Quand je rencontre Sarah, j’ai tout de suite le sentiment de m’identifier à cette jeune femme, je me dis ‘c’est ma petite sœur, c’est ma copine’. Il faut essayer de sensibiliser au maximum et d’arrêter les caricatures. Sarah venait de monter son association. Et on s’est dit : ‘on va faire un film mode d’emploi’. Et si on peut sauver au moins une femme, on aura gagné le pari."

"C’est une vie entière qui se fracasse"

Comment se rendre compte qu’on vit une relation malsaine ? "La violence se reconnaît à la peur. Est-ce que je fais ces choix-là par peur, ou est-ce moi qui décide en pleine possession de mes idées, de mes choix et de mon envie", a expliqué Sarah Barukh.

"Je crois que ce qu’il faut retenir surtout, c’est de ne pas juger et de ne pas se juger. Que le temps de la victime n’est pas le même que le temps des proches. Que ça prend du temps. On culpabilise souvent les femmes : ‘pourquoi tu n’es pas partie ? pourquoi tu ne portes pas plainte ?’. Mais c’est une vie entière qui se fracasse lorsqu’on fait ça. Donc, il faut être prête à l’affronter, il faut être prête pour les mois qui vont suivre", a poursuivi Sarah Barukh.

Retrouvez “L'invité média” de Gilles Ganzmann chaque jour à partir de 10h00 dans “Sud Radio Média” avec Valérie Expert.

Cliquez ici pour retrouver l'intégralité de l’interview média en podcast.

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