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Ségolène Royal : "La hiérarchie des valeurs a changé"

Par Jean Baptiste Giraud

Ségolène Royal, députée des Deux-Sèvres (en 1988), puis ministre de l'Environnement (1991-1993), ministre déléguée à l'Enseignement scolaire (en 1997) et enfin ministre de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie (en 2014), était l'invitée de Valérie Expert et Gilles Ganzmann sur Sud Radio le 6 juin 2023 dans "Le 10h - midi".

Ségolène Royal
Ségolène Royal, invitée de Valérie Expert et Gilles Ganzmann dans "Le 10h - midi" sur Sud Radio.

Ségolène Royal publie un nouveau livre : Refusez la cruauté du monde ! : le temps d’aimer est venu (Éditions du Rocher).

 

Ségolène Royal : "Il y a une transmission des principes du privé vers la gestion des affaires publiques"

Qu'est-⁠ce qui a changé dans la manière d’exercer le pouvoir ? "Ce qui a changé, je pense, c’est la hiérarchie des valeurs. Aujourd'hui vous avez des va-⁠et-⁠vient entre le privé et le public. Et on observe qu’il y a une transmission des principes du privé vers la gestion des affaires publiques. Par exemple, tout ce qui n'est pas profitable n'a plus de valeur. C'est pour ça qu'il y a une dégradation du service public de l'éducation, une dégradation du service à l'hôpital, une privatisation à outrance… ça va jusqu'à la privation des soins aux personnes vulnérables. Et quand on arrive à des maltraitances dans les crèches ou des maltraitances dans les EHPAD, ce n’est pas le fait du hasard – c’est parce qu'on applique le principe du profit maximal à court terme à des métiers qui ne peuvent pas faire de profit.

 


Il est impossible de faire du profit sur des soins aux personnes de grand âge en dégageant à la fois des marges de profit et en payant des actionnaires. Pour faire ce profit-là par rapport à un service public qui a juste des salaires réglementés à verser, qui n'a pas d'actionnaires à rémunérer… vous faites des économies sur quoi pour faire du profit ? Sur les prestations ? Sur les salaires des soignants, vous dégradez aussi leur niveau de formation ? Sur l'alimentation ? Sur les soins ? Et c'est comme ça que vous voyez ces maltraitances en EHPAD. Et maintenant ces maltraitances en crèches, dans des entreprises qui font partie des 100 plus grandes fortunes de France. Il n’est pas possible d’accepter cela", a répondu Ségolène Royal.

"Il y a eu une espèce d'ivresse du pouvoir"

Ségolène Royal est très critique vis-à-vis de la gestion du Covid-19 en France. Aurait-elle fait mieux si elle était présidente de la République ? "Je pense que si on avait écouté les gens, s'il y avait eu une intelligence collective… Vous vous souvenez de ces élus locaux qui ont mis les masques assez tôt mais de façon bienveillante. Ces maires ont été sanctionnés et renvoyés au tribunal. Et après les masques sont devenus obligatoires. Mais globalement, si on prend un peu de recul, il y a eu une espèce d'ivresse du pouvoir de la part d'un certain nombre de personnes inexpérimentées qui ont été fascinées par le pouvoir qu’elles avaient tout d'un coup de confiner des millions de gens chez eux et de leur coller des amendes quand ils sortaient de chez eux."

"La question de la santé publique justifie qu’il y ait des règles de gestion des prix"

Les ventes de produits bio se sont effondrées. Interrogée sur cette question, Ségolène Royal propose que la grande distribution mette en place une péréquation entre produits bio et conventionnels. "C'est dramatique. J’ai présidé pendant dix ans une région très, très agricole, rurale, une région d'élevage, Poitou-⁠Charentes. Et on avait effectivement orienté les agriculteurs vers le bio. Mais c'est dramatique. Il y a des solutions, il faut que le gouvernement intervienne de façon extrêmement rapide. Le bio, c'est empêcher qu’il y ait des pesticides, protéger la santé humaine. Vous savez, tous les cancers sont liés aux pesticides et aux produits qui nous infectent. Quand un agriculteur s'engage dans le bio, ce sont des auxiliaires de la santé publique. Et donc quand il y a un recul du bio, il y a un recul de la santé publique.

 


Je pense qu’il y a un vrai problème avec la grande distribution. Lorsque le bio rapportait, la grande distribution avait encouragé les agriculteurs à s'installer en bio, elle les avait même aidés. Et puis aujourd'hui, quand le bio rapporte moins, elle les laisse en rase campagne et ne paie plus le prix correspondant au travail supplémentaire que nécessite l'agriculture biologique. À partir du moment où la grande distribution française ne paie plus les agriculteurs bio avec leurs marges nécessaires, ils peuvent très bien faire une péréquation. En ce moment il y a une baisse du pouvoir d'achat, les gens achètent moins le bio. Il appartient donc aux grandes surfaces et aux ministères concernés d'imposer une péréquation entre les produits bio les produits non bio. Cela, pour que les produits bio soient bien rémunérés mais ne soient pas plus chers pour le consommateur. La question de la santé publique justifie qu’il y ait des règles de gestion des prix pour pouvoir permettre aux agriculteurs de continuer à produire bio parce qu’ils rendent un service d'intérêt général à la population."

 

 

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