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Valentin Stoquer : "On a reçu les données de 11,7 millions de téléphones avec leur bornage sur deux semaines"

Valentin Stoquer et Margaux Subra-Gomez, journalistes, étaient les invités de Valérie Expert et Gilles Ganzmann sur Sud Radio le 10 mars 2025 dans "Le 10h - midi".

Valentin Stoquer et Margaux Subra-Gomez
Valentin Stoquer et Margaux Subra-Gomez, invités de Valérie Expert et Gilles Ganzmann dans "Sud Radio Média" sur Sud Radio.

En quelques jours, "L'Œil du 20 heures" a réussi à obtenir ces nombreuses informations personnelles grâce auxquelles il est ensuite facile de désanonymiser les propriétaires des téléphones. Informée, la Cnil met notamment en cause certaines applications, qui jouent avec le consentement des utilisateurs.

Margaux Subra-Gomez : "Les mastodontes comme Google, Facebook et X gardent les données en interne pour faire leur propre publicité"

Valentin Stoquer et Margaux Subra-Gomez se sont adressés à un courtier en prétendant travailler dans le marketing. Avec une grande facilité, ils ont pu se procurer un échantillon de plusieurs millions de téléphones. "On a plus ou moins conscience. On télécharge des applis, on accepte vite fait les Conditions d’utilisation, dont la géolocalisation parfois. On a découvert que ces données faisaient l’objet d’un marché tout à fait légal. Il y a un sujet sur les applis dans lesquelles il y a beaucoup de publicité. Il y a beaucoup de jeux qu'on télécharge comme ça, on joue dans le métro, deux jeux sur lesquels il y a des pubs. C’est clairement le business model de ces applications-là : récupérer de la donnée, afficher des publicités, revendre ces données-là. Les data brokers auxquels nous avons parlé nous expliquaient qu’ils n'ont pas de données qui proviennent des applications de Google ou de Facebook, ou même de X, de ces mastodontes. Ils gardent ces données en interne pour faire leur propre publicité", a raconté Margaux Subra-Gomez.

"Les millions de données que vous avez récupérées sont visibles sur une carte. On voit tous les petits points des contacts qui vous ont été vendus. On nous a envoyé des fichiers de points GPS, on avait 11,7 millions de téléphones avec leur bornage sur à peu près deux semaines. C'est un abonnement : tous les mois, moyennant 2.500 dollars par mois, on reçoit toutes les géolocalisations de ces presque 12 millions de téléphones qui ont borné dans le mois. Ensuite, ces points GPS, on les a cartographiés, on en avait un peu plus d'un milliard. Et derrière, on a tiré des fils en refaisant des trajets. Ces points GPS sont affiliés à un identifiant de téléphone (qui n’est pas un numéro de téléphone). C'est d'ailleurs toute la complexité de la chose parce que c'est pour ça que c'est plutôt légal", a poursuivi Valentin Stoquer.

Valentin Stoquer : "On a contacté notre collègue en retrouvant son numéro de téléphone dans l'annuaire interne, c'était plus simple"

Les deux journalistes ont "vu" beaucoup de gens importants, devinent-ils. "On a trouvé des policiers qui sont en charge de la sécurité de l'Élysée. On a trouvé des gens qui passent à l'Élysée, qui vont dans des ministères, des diplomates. Le danger ne vient pas forcément du téléphone qu'on a dans la poche, mais du téléphone des gens qui nous accompagnent. Et c'est d'autant plus le cas quand on a des fonctions de pouvoir. En général, les ministres ont des téléphones plutôt sécurisés sur lesquels ils ne jouent pas à Candy Crush. Mais pas forcément le chauffeur, pas forcément les gardes du corps…", a déclaré Valentin Stoquer.

Mais ils n’ont pu déanonymiser qu’une seule personne. Et encore, parce qu’elle travaillait dans le même bâtiment et qu’ils avaient accès à l’annuaire interne. "C’est presque anonyme. On a retrouvé des centaines de points à l’intérieur du bâtiment de France Télévisions. Et on en a tiré un particulièrement. Il y a plein de points qui sont raccrochés à cet identifiant de téléphone, donc on est capables de retracer des trajets. C'est là où ces données sont presque anonymes : en retraçant des points, en sachant où les gens habitent, où ils rentrent le soir, où ils travaillent, dans quel restaurant ils vont… Ça nous donne souvent assez d'informations pour réussir à remonter des gens via les réseaux sociaux, via des photos, via des habitudes d'endroits où ces personnes-là vont. Et comme ça, on a retrouvé une collègue qu'on ne connaissait pas à France Télévisions, car il y a beaucoup de monde dans ce bâtiment. Et c'est la surprise quand on l'a contactée en retrouvant son numéro de téléphone dans l'annuaire interne, du coup c'était plus simple. C'est très surprenant, on ne s'y attend pas", a raconté Valentin Stoquer.

"Notre collègue nous a un petit peu dévoilé ses habitudes pour essayer de comprendre quelle appli pouvait être en cause. Elle dit qu'elle joue beaucoup dans les transports pour passer le temps. Et vu les points qui étaient générés, c'était très nettement sur les trajets de métro ou de train", a commenté Margaux Subra-Gomez.

Retrouvez “L'invité média” de Gilles Ganzmann chaque jour à partir de 10h00 dans “Sud Radio Média” avec Valérie Expert.

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