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Fabrice Gardel : "Yasser Arafat reste une figure historique"

Par Jean Baptiste Giraud

Pour évoquer Yasser Arafat, les réalisateurs Fabrice Gardel et Florian Uzan étaient les invités de Stéphanie de Muru et Gilles Ganzmann sur Sud Radio le 11 septembre 2023 dans "Sud Radio Média".

Yasser Arafat
Florian Uzan, invité de Valérie Expert et Gilles Ganzmann dans "Sud Radio Média" sur Sud Radio.

Le mercredi 13 septembre 2023 à 20h55, à l’occasion des 30 ans des accords d’Oslo, la chaîne PLANÈTE+ diffuse "Arafat, l’insaisissable", une série documentaire de 4x26 minutes sur Yasser Arafat, réalisée par Fabrice Gardel et Florian Uzan.

 

Florian Uzan : "Yasser Arafat, c’est une trajectoire comme on n’en voit pas tous les jours"

"C’est l’histoire d’une évolution, d’un personnage, qui est presque un personnage de fiction dès le départ. Il commence en militant politique, puis il va devenir guerrier révolutionnaire, terroriste. Il va se métamorphoser en homme politique, en diplomate, en chef d‘État, et en prix Nobel de la Paix à un moment. C’est une trajectoire comme on n’en voit pas tous les jours", a commenté Florian Uzan.

Pourquoi ce titre, "L’insaisissable" ? "Parce qu’on ne peut pas l’attraper. Déjà pour les Israéliens qui essaient de lui faire la peau toute sa vie. Et y compris pour nous, réalisateurs, Fabrice Gardel et moi, il y a quelque chose d’insaisissable chez lui, on n‘arrive pas à le comprendre, il y a quelque chose de fantomatique chez lui. Même ses amis le comparaient à du mercure. C’est une espèce de substance qui glisse entre les doigts. Et même sa vie en elle-même pose un problème, puisqu’on ne sait pas où il est né, on ne sait pas comment il est mort, donc ça fait un mystère du début et la fin. Donc il reste insaisissable même pour nous, même après avoir fait le film, il y a quelque chose encore qui nous échappe chez lui", a confié Florian Uzan.

 


Comment les deux réalisateurs s’y sont-ils pris pour raconter l’histoire de Yasser Arafat ? "D’abord, on a travaillé en se documentant avec tous les livres, toutes les biographies qu’on pouvait trouver. On a travaillé aussi avec l’un des spécialistes mondiaux de la question, qui est Henri Laurence, professeur au Collège de France, qui nous empêchait de dire des bêtises et nous permettait d’avoir toujours un regard juste et avisé sur le sujet. Et effectivement, c’est les archives. On a travaillé avec les équipes de notre productrice de CC&C. On a eu des milliers d’archives à notre disposition. Et c’était un vrai plaisir de travailler avec eux", a raconté Florian Uzan. "Ils ont une expertise en termes d’archives qui est exceptionnelle. Ils ont trouvé des archives russes inédites, des archives italiennes et aussi les fonds Arafat. Donc, en termes de documents inédits, c’est vraiment exceptionnel", a répondu Fabrice Gardel.

"Yasser Arafat savait se vendre"

Peu de gens le savent, mais Arafat a fait fortune dans l’immobilier… "Ce qu’on voit tout le temps, c’est le personnage politique. Et en fait, il est beaucoup plus romanesque. Il a commencé à faire de l’argent, c’était un très bon businessman, il a le sens de l’argent. D’ailleurs, plus tard, on dira que c’est un corrupteur et pas un corrompu. Mais en tout cas un corrupteur, et l’argent est au cœur du système. Et tout jeune déjà, effectivement, il y a ce rapport à l’argent. Il a été habité par sa cause toute sa vie. Il n’a pensé qu’à ça toute sa vie, il dormait dans son avion. Il mangeait une tranche de pastèque et le miel du Yémen, qui était son seul luxe. On l’a beaucoup accusé d’être corrompu, mais en réalité, il se servait de l’argent pour déjouer des complots", a raconté Florian Uzan.

Sait-on ce que sont devenues sa femme ? "Ce qu’on sait, c’est qu’elle est à l’abri du besoin et qu’elle a quand même mis beaucoup d’argent de côté. Ça, tout le monde le dit. Elle aime l’argent, ce qui n’était pas le cas de son mari. Elle vit à l’abri du besoin. Yasser Arafat a 26 enfants adoptés des martyrs. Ça, c’est un pan de la vie de Yasser Arafat qu’on ne connaissait pas vraiment. En réalité, il redistribuait de l’argent aux Palestiniens, aux plus pauvres, à ceux qui étaient enfants de martyrs, il les prenait en charge", a répondu Fabrice Gardel.

 


Yasser Arafat avait un sens du marketing… "Oui, on l’a vu lors de son exil en Tunisie. Il sait se vendre, il se met en scène. Et évidemment, ce qui l’a mis en scène dès le départ, c’est le keffieh. C’est vraiment en sortant de la Guerre des Six Jours, avec la bataille qu’on appelle la bataille de Karameh… on le dit, c’est une défaite glorieuse puisqu’il était un peu comme les 300 Spartiates. Ils sont partis à 300 Palestiniens contre l’armée israélienne. Ils ont perdu, mais ils ont résisté. On a découvert cet homme qu’on a appelé le Che Guevara de l’Orient par la suite, ce qui lui va assez bien, je trouve. Il a commencé effectivement à intéresser les médias du monde entier avec son keffieh, ses lunettes de soleil, son attrait militaire. Il y a un côté révolutionnaire qui marchait bien", a fait savoir Florian Uzan.

Fabrice Gardel : "Dès le départ, Yasser Arafat sait que le combat armé est une impasse"

"C’était un homme de paix qui s’est servi des moyens qu’il avait au début. Malheureusement, les seuls moyens qu’il avait au début, c’était le combat armé. Il a commencé comme ça. Mais en discutant avec Henri Laurence, le spécialiste du sujet, on comprend vite qu’Arafat, dès le départ, sait que le combat armé est une impasse. Et dès qu’il l’a pu, il a changé de cap pour se diriger vers la diplomatie. Avec l’aide d’un ex-Premier ministre autrichien, qui est juif et rescapé des camps, qui va être le premier dirigeant européen à inviter Arafat chez lui. C’est lui qui va pousser pour qu'Arafat aille à l’ONU et soit reconnu comme un leader à part entière", a raconté Fabrice Gardel.

Qu’est-ce qui reste de Yasser Arafat aujourd’hui ? "Son image reste assez présente. J’ai été, il n’y a pas très longtemps, au Liban, j’ai été en Israël. Et on voit des représentations. Il reste quand même une figure historique. Et je pense qu’aujourd’hui, c’est peut-être un des intérêts de la diffusion du film, en ce moment où la question israélienne a un peu disparu de l’actualité pour mille raisons".

Il rajoute : "Avec l’exposition à l’Institut du monde arabe en ce moment, on voit que la Palestine revient sur le devant de la scène, parce que c’est une tragédie qui n’est toujours pas réglée. Donc, à l’heure du montage, on s’est dit que pour les gens qui regardent Netflix toute la journée, il faut raconter ça comme un thriller. L’idée, c’est vraiment d’intéresser des gens qui ne sont pas des spécialistes, comme nous, on n’est pas des spécialistes. Et de faire vraiment un polar pour les aider à expliquer ou en tout cas à mettre la lumière sur cet enjeu de la Palestine, qui est central aujourd’hui", a répondu Fabrice Gardel.

 

 

Retrouvez “L'invité média” de Gilles Ganzmann chaque jour à partir de 10h00 dans “Sud Radio Média” avec Valérie Expert.

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