La France en aura-t-elle bientôt fini avec le terrorisme islamiste lié à l’État Islamique ? Si l’organisation terroriste est aujourd’hui réduite à peau de chagrin d’un point de vue territorial en Syrie et en Irak, son influence sur de nombreux terroristes avérés ou potentiels est encore grande. Député (MoDem) du Var, Philippe Michel-Kleisbauer était l’invité de Sud Radio ce samedi pour évoquer le sujet. "La défaite de Daesh ne signifie pas sa fin, et l’éventuelle fin de celui-ci ne signifie pas la fin du jihadisme là où il se trouve. Nous avons encore Aqmi, Boko Haram, et nous ne pouvons pas ignorer que d’autres groupes vont encore naître. Nous en sommes à la troisième génération du jihadisme, cela veut dire que ce combat est encore vaste et sur des territoires très étendus", prévient-il d’emblée au micro de Michaël Darmon.
"Le front Est de l’Europe inquiète plus les Américains que le terrorisme au Moyen-Orient"
Celui qui est par ailleurs membre de la Commission de la défense nationale et des forces armées a également eu l’occasion de rencontrer plusieurs membres de l’administration Trump à Washington dans le cadre de ses activités liées à l’Otan. Un séjour qui lui a permis de constater un certain décalage entre les objectifs américains et les préoccupations françaises. "De leur point de vue, curieusement le front Est de l’Europe est peut-être plus présent que la question liée au terrorisme. Peut-être ont-ils trop de confiance en cette avancée contre Daesh et pensent-ils qu’on en arrive au bout. Toutefois, ce qu’il s’est passé au Niger ces dernières semaines, notamment cette embuscade dans laquelle sont tombés des soldats américains et dans laquelle les soldats français ont très bien protégé nos alliés, a ravivé dans l’esprit des Américains que la zone était accidentogène. (…) Lors de nos débats, ce qui revenait toujours sur la table, c’était la ligne Est, la Roumanie qui craint toujours une invasion de la Russie, l’Ukraine qui vit depuis 2014 un conflit qui a fait plus de 10 000 morts, la Suède qui craint toujours une prise en main de la Russie sur la mer Baltique, etc.", explique-t-il.
Sur ce théâtre d’opération, Philippe Michel-Kleisbauer se réjouit de l’attitude d’Emmanuel Macron, qui veut maintenir le dialogue avec Vladimir Poutine. "Je pense que le président Macron a raison de ne pas vouloir ignorer ou repousser le président Poutine, qui va vers une nouvelle élection en mars. Nous avons besoin que les accords de Minsk soient respectés pour l’Ukraine et qu’il n’y ait pas de nouvelle offensive ou aide russe sur d’autres territoires européens. C’est là où la France a un rôle à jouer. Nous avons des accords commerciaux avec la Russie qui perdurent (on leur importe du gaz liquide), et c’est peut-être ce qui gêne le plus les Américains. Le président Macron a raison d’essayer par la voie du dialogue de les faire reculer sur certaines de leurs ambitions aux frontières Est de l’Europe. On ne pourra pas toujours donner des solutions armées à tous les conflits et problèmes que nous avons sur la planète. Le dialogue et le retour du politique sont importants", assure-t-il.
"Le Congrès américain ? La présence de Dieu dans chacune des phrases..."
Surtout, le député a pu constater à Washington une forte tendance chez certains politiques à invoquer… la religion. "Dans leur administration, il y a beaucoup de rationnel avec des gens très brillants que nous avons pu rencontrer et écouter. En ce qui concerne les membres du Congrès, c’était bien moins rationnel... La présence de Dieu dans chacune des phrases pour essayer d’expliquer que Dieu a voulu que Jérusalem soit la capitale d’Israël, qu’il a donné du gaz liquide en grande quantité aux Américains et qu’il convient que nous le leur achetions au détriment de celui des Russes, etc. Il arrive un moment où cette présence de Dieu dans les dialogues nous a permis de constater unanimement (et la délégation représente tous les courants politiques) que nous avions affaire à des gens qui étaient aussi fous de Dieu que certains de nos opposants au Levant. (…) Ça nous inquiète. Il faut être très vigilant là-dessus, et ça a renforcé la trame commune de notre délégation à maintenir la laïcité dans notre façon de faire de la politique", indique-t-il.