L’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République a remis sur le devant de la scène l’une des fractures de la société française : celle entre les citadins et les ruraux. Alors que la situation socio-économique inquiétante des zones rurales fait de plus en plus parler, le sénateur de la Drôme Didier Guillaume était l’invité politique du Grand Matin Sud Radio pour en parler ce jeudi. "Le monde rural souffre beaucoup, mais ce n’est pas tant des entreprises qui mettent la clé sous la porte, mais l’isolement, le sentiment de déclassement. Il faut retisser du lien avec les zones rurales et remettre la ruralité sur les chemins de la République. Vivant dans un secteur rural, je sais ce que c’est que la ruralité. Les petits commerces ferment dans les villages parce que les gens font leurs courses dans les grandes surfaces. En même temps, il y a de fortes initiatives en matière culturelle, des associations vivent… Il y a une vraie dynamique. (…) On parle beaucoup de France périphérique. C’est un mot qui me fait vomir. Il n’y a pas de France périphérique. Les Français sont les mêmes partout. Affirmons le fait que la France est une et indivisible mais diverse. Et parce qu’elle est diverse, nous devons traiter différemment les zones rurales et les villes", plaide-t-il.
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— Sud Radio (@sudradio) 16 novembre 2017
Réaffirmant son attachement aux emplois aidés dont "l’annonce brutale de l’arrêt a été une erreur" selon lui, Didier Guillaume s’est également prononcé sur la question des emplois francs, remis au goût du jour par le gouvernement. "Les zones franches n’ont pas été un échec du tout. Elles ont fait revenir des PME dans les quartiers difficiles. C’était une bonne mesure. Le problème, c’est que chaque gouvernement veut imprimer sa marque et défaire ce qui a été fait avant. C’était un gouvernement de droite qui avait fait les zones franches et nous avons fait sauter cela quand nous sommes arrivés. C’était la première fois que nous faisions venir ou revenir des petites entreprises dans des quartiers en difficulté. On sait très bien qu’il y a une énorme discrimination à l’embauche, mais plus que ça, une discrimination de quartier", déplore-t-il.
"Un peu rapide de juger l’action de Macron au bout de six mois"
Alors qu’un sondage Ifop/Fiducial pour Sud Radio et CNews assure que les retraités et les habitants des zones rurales sont les grands perdants de la politique d’Emmanuel Macron selon les Français, Didier Guillaume se veut modéré dans sa critique du gouvernement. "Les mois de juillet et août ont été difficiles pour certaines catégories de citoyens. Mais soyons objectifs. Même si l’info va vite, tirer un bilan au bout de moins de six mois de l’action du président de la République me semble un peu rapide. Il met des mesures en place, des réformes vont dans le bon sens et d’autres dans le mauvais sens. Celles qui vont dans le bon sens sont à mon avis toutes celles qui augmentent le pouvoir d’achat : baisse des charges, augmentation du minimum vieillesse et de l’allocation adulte handicapé, la suppression de la taxe d’habitation, etc. Ces Français aux petits salaires ne placent pas l’argent quand ils le gagnent, ils le dépensent ! Donc ça relancera la machine. Je pense qu’on aurait tout de même pu se passer de l’erreur faite sur l’impôt sur la fortune", pointe-t-il.
Le sénateur de la Drôme s’est ensuite exprimé sans concession sur la polémique actuelle entre la rédaction de Charlie Hebdo et Edwy Plenel, sur fond d’affaire Tariq Ramadan. "On voit bien la dérive intellectuelle d’Edwy Plenel. Aujourd’hui, il y a une ligne de fracture terrible dans la gauche et dans la République. La guerre entre deux gauches, ça ne m’intéresse pas. Aujourd’hui, il y a une dérive d’un certain nombre de gens de gauche qui font des amalgames. L’islam est une belle et grande religion. Je suis d’accord avec tous ceux qui combattent l’islamisme et qui n’acceptent pas les dérives d’Edwy Plenel et d’autres. La guerre Charlie Hebdo-Mediapart est dramatique pour notre pays. Il faudra que les choses soient tranchées, et j’en appelle ce matin au président de la République pour qu’il dise quelle est sa position, non pas sur la querelle Plenel-Charlie, mais sur ce sujet plus global. C’est la France qui est en jeu", assure-t-il.
"Les partis politiques sont tous en crise, y compris LREM"
Enfin, celui qui est le chef de file du groupe socialiste au Sénat en appelle à une réforme générale du fonctionnement des partis, à l’heure où Christophe Castaner pourrait prendre la tête de LREM tout en restant au gouvernement. "Ça ne me regarde pas, c’est le problème de LREM. Je pense qu’il faut de la clarté aujourd’hui. S’il reste au gouvernement, Christophe Castaner aura en tout cas beaucoup de travail à faire pour LREM. Les partis politiques sont tous en crise, y compris LREM, et je ne sais pas si nos concitoyens ont encore envie de partis politiques. Nous avons besoin de rénovation et de réforme. Au PS, nous serons en difficulté. Nous avons connu une déroute historique. Je pense que les partis politiques ne peuvent plus fonctionner comme avant avec des sections, des fédérations, des réunions, etc. Il y a des grands sujets de société sur lesquels la population doit pouvoir s’exprimer, pas seulement les adhérents d’un parti. faut tout réformer. Si LR, le PS et LREM fonctionnent comme les partis d’antan, ça ne marchera plus", prédit-il.
Retrouvez en podcast l’intégralité de l’interview de Didier Guillaume dans le Grand Matin Sud Radio