À la sortie du Conseil de défense spécial, dimanche 18 octobre, Emmanuel Macron a déclaré que "les islamistes ne dormiront pas tranquilles en France". Eric Coquerel, député LFI de Seine-Saint-Denis, tient avant tout à distinguer l’islam politique de l’islam religieux, expliquant que "l’islam politique, c’est des gens qui prétendent, quelque part pour aller vite, par des moyens divers, imposer une religion en France en termes de politique, imposer l’islam". Ces gens doivent, selon le député, être "surveillés, punis, empêchés de nuire" mais estime qu’il "faudrait les moyens", notamment en termes de surveillance.
Or, "depuis des années il y a des gens, par exemple ce Tchétchène, qui peut sur les réseaux sociaux simuler une décapitation, il l’avait fait, et ne pas avoir de problèmes", déplore-t-il, estimant qu’il faut faire "du renseignement humain". "La réponse doit être là, on a les lois", assure-t-il, notamment contre l'appel au meurtre et l'appel à la haine.
Pourquoi cet enseignant n’a pas été protégé ?
L’un des parents des élèves à qui le professeur d’histoire Samuel Paty, victime de l’attentat, avait montré des caricatures de Mahomet avait appelé au meurtre de ce dernier, or il n’a pas été inquiété. Pour Eric Coquerel, "il y a une différence entre des parents qui sont d’une religion et qui s’interrogent sur ce que fait un enseignant de manière un peu comme ça en le disant, et puis d’autres qui donnent carrément le nom d’un enseignant en le pointant avec des propos qui ont été tenus".
"On me dit que les renseignements territoriaux avaient remonté ce danger. Qu’est-ce qui a été fait ?", se demande le député. "Pourquoi ce collège n’a pas été protégé ? Pourquoi cet enseignant n’a pas été protégé ?", s'interroge le député de la Seine-Saint-Denis.
La question de l'expulsion
Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, a parlé d’expulsion. Pour Eric Coquerel, c’est en effet une possibilité : "s’il est prouvé que quelqu’un a manifestement fait de l’appel à la haine, promeut une idéologie qui est celle d’un islam politique, oui bien sûr que peut se poser" la question de l’expulsion.
Il rappelle néanmoins qu’il ne "faut pas donner comme victoire à ces gens-là", en laissant faire toute "division, tout amalgame, toute discrimination dans le pays". "Sous la poussée de l’extrême-droite, il y a un racisme anti-musulman" en France, dénonce l'élu. "Quand il y a un attentat devant une mosquée, que le chef de l’État, que le Préfet, qu’aucun ministre ne se déplace, qu’il n’y a pas un appel à se rassembler aussi pour dire ‘on ne touche pas à un de nos concitoyens musulmans parce qu’il est musulman’, eh bien, à partir de là, il nous paraît normal d’aller manifester", avec la CGT, la FSU..., souligne-t-il. On est bien à la fois quand on dit "qu'il faut sévir pour empêcher l'islam politique de se révéler dangereux et à la fois pour ne pas faire d'amalgame et protéger nos concitoyens de la deuxième religion en France".
"L'islam subit un véritable racisme"
Le ministre de l’Intérieur avait dénoncé les liens de LFI avec ce qui est appelé "l’islamo-gauchisme". Ce terme, "tel qu’il est utilisé par Valeurs Actuelles, par Gérard Darmanin et autres, ça me fait penser à judéo-bolchévique dans les années 30", s'indigne Eric Coquerel, en référence à la période hitlérienne. "L’islam aujourd’hui est une religion qui subit un véritable racisme, en tant que religion, comme l’a été à un certain moment, avec une autre ampleur évidemment, la religion juive", estime le parlementaire, qui regrette que le ministre de l'Intérieur "monte les gens les uns contre les autres". "Aujourd’hui il faut faire face à la menace et faire nation sur les principes républicains", appelle le porte-parole de la France insoumise.
Manuel Valls est également allé de sa critique sur certaines positions de la France insoumise. Eric Coquerel estime ces déclarations "insupportables", rappelant que LFI n’a jamais été aux commandes de la France alors que lui en a été Premier ministre. "Il est royaliste en Espagne, raciste en France", réagit le député qui souligne que Manuel Valls a "expliqué il y a peu de temps que l’islam était un problème, pas l’islamisme, l’islam". "Il fait mal, parce qu'il fait exactement ce que les terroristes attendent : se diviser, faire des attaques de ce type...", déplore-t-il.
Un problème Tchétchène ?
Jean-Luc Mélenchon a abordé le problème Tchétchène, en France. Eric Coquerel emboîte le pas et explique qu'il y a eu "des réfugiés tchétchènes qui sont venus à un moment, qui ont été acceptés en France parce qu'ils étaient opposants politiques à Poutine". Mais cette opposition politique était liée, selon Eric Coquerel, avec "l’islam politique pour une part d’entre eux". "Manifestement, ils ne sont pas assez surveillés", déplore le député, rappelant les violences à Dijon, dans l'été.
Eric Coquerel souligne néanmoins que dans les établissements scolaires, "il y a d’autres problèmes", comme "du trafic de drogue qui pourrissent la vie des établissements scolaires". "Je pense donc que d’abord, il faut toujours renforcer le corps enseignant", insiste l'élu qui appelle à "plus d’encadrement". Et que lorsqu’il y a la moindre alerte, "il faut effectivement que les forces de police soient présentes". Pour ce faire, Eric Coquerel juge que "le retour à une police de proximité dans ce pays, plus des services spéciaux dédiés à des luttes, par exemple la lutte antiterroriste, ne serait peut-être pas mauvais".
Quant aux caricatures de Mahomet, qui ont été l'élément déclencheur de ce nouvel attentat, comme celui contre Charlie Hebdo en 2015, Eric Coquerel juge qu’elles ont leur place dans les cours. "Si c’est dans un cours pour pouvoir faire en sorte que l’esprit critique des jeunes citoyens soit renforcé", elles peuvent être montrées. "Toute caricature, quelle que soit la religion, à partir du moment où c’est fait dans le cadre d’un projet pédagogique. Et manifestement, c’était le cas de cet enseignant d’après ce que j’ai lu", note le député.
"Ne pas renier nos principes"
Si l'avocat Thibault de Montbrial appelle à dissoudre les Frères musulmans, Eric Coquerel ne "croit pas qu'il y ait ce mouvement en France", et invite à "ne pas se diviser, se monter les uns contre les autres et renier nos principes", comme les libertés publiques ou la séparation des pouvoirs. Sur la question des dissolutions, l'élu estime que "si une association professe clairement l'islam politique, elle n'a pas lieu d'être", mais invite à être vigilant envers d'autres associations. "Il faut mettre tout à plat, bien regarder, que personne ne sente une différence de traitement par rapport à sa religion", estime-t-il.
Sur la question du traitement des fichés S, le député de la Seine-Saint-Denis réaffirme son opposition "à faire en sorte qu'ils soient tous expulsés". "Je suis pour faire en sorte que l'on ne passe pas directement de la case administrative à la case expulsion", précise-t-il, recommandant de donner les moyens "à la justice et au renseignement". Pas question pour autant de remettre en cause le droit d'asile. "On peut s'interroger sur des personnes, par rapport à des critères, mais ne pas remettre en question le droit d'asile, sinon, où va-t-on ?", conclut le porte-parole de la France insoumise.
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