Des milliers de personnes se sont retrouvées à Paris pour la Fête de la musique, en particulier sur le canal Saint-Martin, sans respecter la distanciation sociale. François Xavier Bellamy, député européen Les Républicains, précise qu’il n’est pas "spécialiste" et donc se refuse de juger si c’est un problème ou non, et si le relâchement de la population est trop rapide. "Je ne suis pas bien placé pour le dire, c’est aux autorités compétentes qui disposent de toute l’information nécessaire de le dire." Il souligne néanmoins que "le contraste est frappant avec les règles qui nous étaient imposées il y a encore quelques jours", mais "il faut se remettre à vivre si le contexte épidémique le permet".
"L’éducation aura été une des grandes victimes de cette crise du coronavirus"
Les collèges et écoles primaires ont rouvert leurs portes pour les élèves, de façon obligatoire, lundi 22 juin 2020. "On a beaucoup de mal à comprendre ce qu’il se passe sur le terrain de l’éducation", juge le député européen. "Aujourd’hui, il est très difficile de suivre les décisions successives du ministère", explique l’élu qui a reçu des remontées de terrain.
"L’éducation aura été une des très grandes victimes de cette crise du coronavirus." Il estime, en tant que professeur de philosophie, que les "professeurs se sont beaucoup mobilisés" afin de garantir la continuité de l’apprentissage, même s’il concède que certains peuvent avoir fait leur travail "moins bien que d’autres".
"Le métier même d’enseignant a été déconsidéré"
François-Xavier Bellamy, lui-même professeur de philosophie, souligne notamment l’engagement des professeurs : "ils ont dû faire avec les moyens du bord et souvent avec leurs propres moyens", et ce alors que les rémunérations "ne sont pas astronomiques". Or, le gouvernement a décidé, pour des raisons de redémarrage de l’activité et de reprise, mais également des "raisons d’affichage", de les contraindre "à retrouver des cours en présence des élèves" de manière très compliquée et complexe. Pour lui, "toute une génération aura été privée de quelques semaines précieuses de cours, mais aussi de quelques moments très importants de la vie scolaire". "Le baccalauréat aura été, cette année, purement et simplement sacrifié."
Le député européen juge qu’il faut revoir la rémunération des enseignants : "en France, les enseignants sont beaucoup moins bien payés que la moyenne de l’OCDE, alors que notre pays est un pays dans lequel le niveau de vie est supérieur à celui de l’OCDE, le coût de la vie aussi". Pour le professeur, il y a un "décrochage" qui fait partie "de la crise symbolique du métier d’enseignant". "Le métier même d’enseignant a été déconsidéré." En France, le professeur ne doit pas transmettre de savoir, c’est à l’élève de se construire ses connaissances.
Cette crise est telle que, précise François-Xavier Bellamy, "dans un pays où le chômage de masse est désormais une donnée structurelle, depuis longtemps on n’arrive pas à recruter des enseignants". "Il faut redonner toute sa place, toute sa légitimité, toute sa consistance au métier de l’enseignement", ce qui est impossible si on continue de critiquer en permanence les enseignants.
"Au nom d’un antiracisme devenu fou, on voit réapparaître des tensions raciales"
Le militantisme antiraciste, qui réclame une réécriture de l’Histoire, est fortement critiqué par François-Xavier Bellamy et "très inquiétant". "Au nom d’un antiracisme devenu fou, on voit réapparaître des tensions raciales et des clivages racialistes".
Le député précise que, la semaine du 15 juillet 2020, une résolution du Parlement européen demandait aux députés d’écrire que "les vies noires comptent" (traduction de Black Lives Matter, le slogan antiraciste issu des manifestations aux États-Unis et ayant, depuis, largement traversé les frontières, NDLR.). Il souligne que cette résolution a fait "revenir dans un vote d’un Parlement une séparation ethnique".
La résolution demandait également aux députés européens de "souscrire à l’affirmation que l’Europe applique des politiques de racisme structurel dans tous les domaines de l’action publique", un "délire" pour le député européen. "On entretient un ressentiment, qui me paraît absolument infondé. Un ressentiment global qui ne peut conduire qu’à la spirale de la violence."
"Il n’y a rien de tel que le racisme structurel"
Pour le professeur de philosophie, ces revendications sont "l’agenda politique de gens qui rêvent de voir ressusciter, après l’échec de l’idée de la lutte des classes, l’idée d’une lutte de races". S’il confirme qu’il y a "des choses qui ne vont pas dans notre société" ainsi que des "situations d’injustice qu’il faut combattre" et des "faits de racisme qu’il faut condamner", "il n’y a rien de tel que le racisme structurel".
Le racisme structurel est un racisme "dont nous serions tous coupables, que nous l’ayons voulu ou non, que nous ayons posé des actes racistes ou non". "C’est ce qu’on voudrait nous faire avaler à travers une telle idée." François-Xavier Bellamy rapproche cette idée "à la grande tradition marxiste", à l’idée marxiste de la société comme étant "une espèce de guerre perpétuelle" dont nous sommes "tous les acteurs". "Je refuse cette vision-là".
"Nous sommes en train de perdre la raison"
Ces idées sont l’apanage "d’une certaine gauche" que le député européen oppose à la gauche "universaliste" et qui, d'ailleurs, "se révolte contre cette espèce de perspective catastrophique". Mais "il y a une vision politique conflictuelle de la société qui est aujourd’hui en train de gagner du terrain".
Il critique également la demande d’interdiction d’œuvres d’art ou encore le déboulonnage de statues ou encore l’attaque subie par Le livre de la jungle, le dessin animé des studios Disney : "je me dis que nous sommes en train de perdre la raison".
Pour lui, "la conséquence, la pire de toutes, est le moment où on commence à censurer des images". Si certaines représentations sont "contestables" et "discutables", il appelle à la discussion et non à la censure. "L’intelligence, ça consiste justement à regarder les œuvres d’art pour se laisser déranger par elles. Le moment où on se laisse déranger par des œuvres d’art, c’est le moment où l’art commence vraiment".
"Le résultat final correspond exactement au cauchemar des Gilets jaunes"
La Convention citoyenne sur le climat (CCC) ne correspond pas, pour le député européen, à une attente des Français. Il rappelle qu’elle a été lancée lors de la crise des Gilets jaunes et en pleine "contestation des institutions" et alors qu’on parlait de "référendum citoyen" et que les Gilets jaunes étaient opposés à la baisse de la vitesse sur les routes secondaires à 80 km/h. "On se retrouve à la fin avec des propositions tellement éloignées des aspirations de début qu’on voit bien qu’il ne suffit pas de tirer des gens au sort pour avoir une idée de ce que les Français veulent".
S’il ne se prononce pas sur la question de savoir si les participants à la Convention citoyenne ont réellement, ou non, été tirés au sort, "je pense qu’ils ont vraiment été tirés au sort", il estime que "le résultat final correspond exactement au cauchemar des Gilets jaunes". Parmi les résolutions finales de la CCC, il y a, par exemple, l’abaissement de la vitesse sur toutes les autoroutes de France à 110 km/h, mais également une multiplication "des sources de fiscalité".
"On veut encore rendre la vie quotidienne plus chère", en imposant par exemple la rénovation énergétique des logements "sans se préoccuper des moyens de la mettre en œuvre".
"Est-ce que la démocratie représentative est à ce point discréditée ?"
"Le sujet est encore plus fondamental : quelle est la légitimité de nos institutions ?", juge le député européen. "Je crois que le président de la République, qui ne cesse de dénoncer les populistes, est en train d’adopter ici un virage authentiquement populiste". "Est-ce que la démocratie représentative est à ce point discréditée qu’on considère que 150 personnes tirées au sort, qui travaillent dans un milieu fermé, vont suffire à produire des propositions qui ressemblent vraiment à ce que veulent les Français ?", se demande le professeur de philosophie.
"Je ne le crois pas", précise-t-il estimant que cette initiative le montre. "Je ne sais pas qui sont ces gens, je ne sais pas quelle est leur légitimité, je ne sais pas quelle est leur vision politique, je n’ai pas voté pour eux." François-Xavier Bellamy critique ainsi fortement le principe de cette Convention citoyenne : "je ne vois pas au nom de quoi la décision qu’on me présente aujourd’hui comme étant le résultat de leurs spéculations à l’intérieur d’un hémicycle clos que je n’ai pas pu suivre, devrait s’imposer à moi comme citoyen".
"La question écologique est un sujet majeur"
Emmanuel Macron a avancé l’idée que les propositions de la CCC pourraient être soumises à un référendum à choix multiple. "La question, c’est sur quoi porte le référendum", estime le député européen. Parmi les propositions issues de la Convention citoyenne sur le climat, il y a l’inscription du crime d’écocide dans la Constitution française. "On peut agiter les grands mots autant qu’on voudra : réviser la Constitution pour dire qu’il est interdit d’attenter à l’environnement, ça me paraît à la fois très déclamatoire et potentiellement très attentatoire à nos libertés fondamentales".
S’il estime que "la question écologique est un sujet majeur", il considère que les conclusions de la CCC entraînent un risque pour la liberté, car il y a derrière, "l’idée que la liberté de l’être humain est forcément antinomique avec la préservation de l’environnement". "Pour préserver la planète, il faudrait restreindre nos libertés fondamentales", et c’est ce qui, selon le député, est présenté dans cette réforme constitutionnelle. En tout cas, le texte n’étant pas connu, c’est ce qui semble ressortir de "la formule qui nous a été décrite".
Loin d’estimer qu’il restriction des libertés est la solution pour préserver la planète, il juge que "ce qui doit nous permettre de préserver la planète c’est aussi l’inventivité humaine, la capacité de la liberté humaine d’innover, de rechercher, de proposer un progrès".
"Il faut faire attention de sortir de l’indignation réactive"
Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement, est revenue sur l’arrestation violente de l’infirmière qui aurait lancé des pierres sur les forces de l’ordre. Une phrase, notamment, a fait scandale, mais François-Xavier Bellamy tient à remettre les propos dans leur contexte. Il confirme avoir "bondi" lorsqu’il a entendu les propos de Mme Ndiaye, mais "je dois dire que j’ai pris le temps de regarder la séquence dans son ensemble".
"En réalité, ce que dit Sibeth Ndiaye, c’est que si l’infirmière que l’on voit lancer des pierres sur les policiers n’était pas condamnée, elle ne saurait pas dire à ses enfants qu’il est mal de jeter des pierres sur les policiers." Le député européen explique donc que ce que Sibeth Ndiaye veut dire c’est "qu’il est nécessaire qu’une procédure judiciaire ait lieu" à l’encontre de l’infirmière.
S’il estime que Sibeth Ndiaye a utilisé une expression très complexe pour, au final, exprimer une pensée simple, "il ne faut pas jeter des pierres sur les policiers", il juge que la porte-parole serait victime "d’un mauvais procès" si on la jugeait "uniquement sur cet extrait". "Il faut faire attention de sortir de l’indignation réactive et d’essayer de se comprendre avant de se mettre systématiquement à dénoncer".
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