Présentée en conseil des ministres, la réforme de la justice entre désormais dans une nouvelle phase. Parmi les mesures phares de ce texte, l’interdiction des peines d’emprisonnement de moins d’un mois, et le bracelet électronique ou autres peines alternatives généralisées pour les peines allant de un à six mois. Président de l’Association professionnelle des magistrats, Jean-Paul Garraud ne cache pas ses réticences vis-à-vis de ce texte.
"Pour la partie pénitentiaire de la réforme, il convient de rappeler un élément de bon sens. Si l’on veut faire diminuer les peines d’emprisonnement et le nombre d’incarcérations en France, ce qui est le souci de nombreux gouvernements, il faut d’abord commencer par faire baisser la délinquance ! Ensuite, développer les peines alternatives pour diminuer les incarcérations, ça existe déjà ! Et je peux vous dire qu’on incarcère moins en France que dans d’autres pays européens, et ce n’est pas de gaîté de cœur que les magistrats incarcèrent des gens…", affirme-t-il au micro de Sud Radio.
"Je suis très inquiet"
"Il y a des messages totalement contradictoires. Je ne reviendrai pas sur la question des moyens indispensables à la justice. Mais d’un côté, on vous dit qu’il faut favoriser les peines alternatives, alors que ces peines existent déjà. Et je peux vous assurer que lorsqu’on voit des multirécidivistes à la barre des tribunaux, ce sont des personnes qui, avant d’être en prison, ont fait l’objet de mesures alternatives ! C’est un vrai problème. Ensuite, nous apprenons aujourd’hui que le projet de création d’un parquet national antiterroriste était reporté aux calendes grecques. Je suis très inquiet, car je suis certain que c’est une structure absolument indispensable pour mener la guerre contre le terrorisme et l’islamisme", ajoute-t-il.
Enfin, celui qui fut également député (UMP) de la Gironde de 2002 à 2012 remarque une dernière mesure dangereuse selon lui. "Il y a une réforme très négative : la suppression des juges d’instance. Le juge d’instance, c’est le juge des litiges techniques, c’est le juge de proximité par excellence. Le supprimer pour tout regrouper au sein de grands tribunaux de grande instance, pour des soucis apparemment d’ordre budgétaire, me paraît être une très mauvaise chose. Quand on a des juges de proximité, la justice est mieux rendue et moins coûteuse pour l’État", lance-t-il.
Réécoutez l’interview de Jean-Paul Garraud dans le 18h Sud Radio