Après le triomphe des présidentielles, place au raz-de-marée des législatives. Les résultats du premier tour des élections législatives, ce dimanche, annoncent une véritable vague de La République en Marche! dans l'Assemblée nationale qui sera élue dimanche prochain. Un premier tour qui marque également une débâcle historique pour le Parti socialiste, avec l'élimination de son premier secrétaire Jean-Christophe Cambadélis et de son candidat à l'élection présidentielle Benoît Hamon, mais aussi un net revers pour la droite et le Front national. Le tout, sur fond d'abstention record, avec environ un électeur sur deux qui ne s'est pas déplacé pour voter.
Selon les estimations par sièges des sondeurs, le mouvement présidentiel, la République En Marche (REM), et son allié du MoDem raviraient dimanche prochain entre 400 et 455 des 577 sièges de l'Assemblée nationale, culminant très nettement au-dessus de la majorité absolue (289 élus).
Le Premier ministre Edouard Philippe a estimé que les Français avaient confirmé leur "attachement dans le projet de renouvellement, de rassemblement et de conquête" de M. Macron. "Rien n'est joué, il faut rester mobilisé", a cependant tempéré le porte-parole du gouvernement Christophe Castaner. Se gardant de triomphalisme, l'Elysée ne fera pas non plus "de commentaire".
Le Parti socialiste, qui contrôlait la moitié de l'Assemblée sortante, s'effondrerait autour de 15 à 40 sièges, soit encore moins que les 57 de la débâcle de 1993. C'est un "recul sans précédent de la gauche", a reconnu son Premier secrétaire Jean-Christophe Cambadélis, qui a mis en garde contre le risque de "l'unanimisme" au Parlement.
Le patron du PS, éliminé à Paris, fait partie du cortège des battus, avec les anciens ministres Mathias Fekl, Pascale Boistard, Aurélie Filippetti, François Lamy... Le candidat du PS à la présidentielle, Benoît Hamon, a également été éliminé dès le 1er tour dans les Yvelines, tout comme les ex-ministres écologistes Cécile Duflot, à Paris, et Emmanuelle Cosse, en Seine-Saint-Denis.
En revanche, l'ex-Premier ministre Manuel Valls a annoncé être "nettement en tête" dans l'Essonne.
Son successeur à Matignon Bernard Cazeneuve a appelé à "rebâtir la gauche de gouvernement".
La droite, qui espérait priver le nouveau président Macron de majorité, terminerait avec 70 à 130 élus LR et UDI. Dont une partie devrait soutenir la majorité présidentielle. Un score "décevant pour notre famille politique", a convenu l'ancien président de l'Assemblée Bernard Accoyer.
Chef de la campagne LR-UDI, François Baroin a appelé à la mobilisation pour éviter des "pouvoirs concentrés" dans "un seul et même parti".
Le FN en net repli
Quant au Front national, un mois après son score record au second tour de la présidentielle, il obtiendrait seulement 1 à 10 sièges, contre 2 lors de la précédente législature. Avec un score de 13 à 14 % très éloigné du score de Marine Le Pen au premier tour de la présidentielle (21,30 %).
C'est "une déception", a reconnu son vice-président Florian Philippot : la barre des quinze députés pour former un groupe avait longtemps constitué un objectif minimal.
Mme Le Pen, en tête avec 46% des voix dans le Pas-de-Calais, a centré sa riposte sur le "taux d'abstention catastrophique" qui "pose la question du mode de scrutin" majoritaire.
La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon, obtiendrait, elle, 10 à 23 fauteuils, PCF inclus. Mais "la division des forces de gauche se paie très cher", regrette le dirigeant communiste Pierre Laurent, critiquant le refus d'alliance de M. Mélenchon, qui avait réuni plus de 19 % des voix au 1er tour de la présidentielle.
"L'immensité de l'abstention montre qu'il n'y a pas de majorité pour détruire le Code du travail", a jugé M. Mélenchon qui, contrairement à la présidentielle, a immédiatement appelé ses électeurs à "ne jamais permettre l'élection d'un candidat Front national".
Pour la première fois de l'histoire de la Ve République, l'abstention aux législatives dépasserait la barre des 50 % au premier tour.
Au terme d'une campagne atone qui a vu la REM creuser nettement l'écart sur ses rivaux, l'abstention pulvérise le précédent record pour un premier tour, qui remontait à 2012 (42,8 %, puis 44,6 % au second tour).
En voix, la REM arrive nettement en tête (32,0 - 32,9 %), devant LR-UDI (20,9 - 21,5 %) et le FN (13,1 - 14 %), selon les estimations. Le PS et son allié PRG obtiendraient entre 9 et 10,2% et sont légèrement devancés en voix par La France insoumise (11 %) de Jean-Luc Mélenchon.
Renouvellement historique en vue
Le parti macroniste est en passe d'obtenir une des plus larges majorités de la Ve République, sans effacer le record de l'UDF-RPR en 1993 (484 sièges). En revanche, il peut espérer battre le record de sièges pour un seul parti, détenu par l'UMP en 2002 (365 sièges).
Six membres du gouvernement, qui devront démissionner en cas de défaite, jouent leur avenir: Richard Ferrand, pris dans une affaire immobilière qui a terni la campagne de la REM, vire en tête à 33,93 % dans le Finistère; Christophe Castaner, en très bonne posture avec 44 % dans les Alpes-de-Haute-Provence; Bruno Le Maire, en ballottage très favorable avec 45 %. Annick Girardin, qui fera face à un second tour difficile, Marielle de Sarnez et Mounir Mahjoubi, largement en tête dans leurs circonscriptions parisiennes.
L'Assemblée nationale sera profondément renouvelée à l'issue du second tour dimanche prochain: quelque 224 députés sortants ne se représentaient pas.
Fort de cette probable solide majorité à l'Assemblée, Emmanuel Macron aura les mains libres pour appliquer son programme. Dans les prochaines semaines, le Parlement devra examiner la prorogation de l'état d'urgence jusqu'au 1er novembre, ainsi que le projet de loi sur la moralisation de la vie publique et les ordonnances de la réforme du droit du travail par ordonnances, le premier grand chantier économique et social du quinquennat.