La visite ne promet guère d'avancées, au vu de l'enlisement des dossiers où l'Europe est impliquée, qu'il s'agisse de l'adhésion de la Serbie à l'UE ou du dialogue avec le Kosovo. L'Elysée voit dans ce voyage d'abord l'occasion de renouer "l'amitié franco-serbe". Sur le fond, sans donner de piste pour y parvenir, Paris insiste pour une "reprise du dialogue" entre la Serbie et son ancienne province, le Kosovo, dont Belgrade ne reconnaît toujours pas l'indépendance. Et rappelle qu'Emmanuel Macron refuse tout élargissement de l'UE avant une réforme de son fonctionnement, sans date prévisible.
Côté serbe, le président Aleksandar Vucic semble décidé à impressionner son hôte, après l'humiliation ressentie pendant les cérémonies du 11 novembre à Paris.
Maladresse du protocole français, le président Vucic, représentant d'un pays martyr de la Première guerre mondiale, avait été placé dans une tribune secondaire, quand son homologue kosovar Hashim Thaçi s'asseyait dans la tribune principale, avec Emmanuel Macron, Vladimir Poutine et Donald Trump.
Après avoir hésité à quitter les lieux, Aleksandar Vucic avait promis un accueil "grandiose" à Emmanuel Macron pour "lui montrer ce qu'est l'hospitalité serbe".
Le gouvernement serbe a ainsi prévu de mobiliser 10.000 personnes lors d'une cérémonie prévue lundi soir en l'honneur de l'amitié franco-serbe.
Emmanuel Macron doit inaugurer un monument rénové, situé dans le parc central de Belgrade, dont l'inscription "Aimons la France comme elle nous a aimés" avait été maculée de peinture noire en décembre.
L'Elysée s'est d'avance réjoui de cet "accueil populaire".
Concrètement, des habitants de Belgrade ont reçu lundi matin des SMS les invitant à venir saluer le président français, accueilli dans une ville pavoisée aux couleurs de la France.
La Serbie avait déjà organisé un accueil triomphal à Vladimir Poutine lors de sa visite le 17 janvier 2019.
Des dizaines de milliers de Serbes, plus de 120.000 selon la police, acheminés de tout le pays, avaient défilé drapeaux au vent en l'honneur du "cher président Poutine".
Au tour de Macron
"Cet événement va donner l'occasion de créer un équilibre après l'accueil triomphal à Vladimir Poutine. C'est désormais au tour de Macron. Le pouvoir a les ressources nécessaires pour organiser un tel accueil et le faire apparaître comme grandiose. Le pouvoir peut faire venir le nombre de personnes souhaité, l'accueil de Poutine l'a démontré", souligne l'analyste politique Aleksandar Popov.
"Belgrade s'attend à ce que trois choses soient éclaircies: l'adhésion de la Serbie à l'UE, le rôle futur de la France (dans les Balkans) car on voit clairement un intérêt accru de Paris pour cette région et enfin la question du Kosovo. C'est une visite très importante dont Vucic souhaite tirer le maximum de profit", explique l'analyste.
En avril à Berlin, Angela Merkel et le président français s'étaient pourtant montrés optimistes sur leur capacité à pousser Belgrade et Pristina à renouer le dialogue. Les deux parties avaient prévu de se revoir à Paris début juillet. Mais la rencontre a été annulée faute de proposition nouvelle.
Ce désamour s'accompagne d'une faiblesse des liens économiques, même si Vinci a récemment remporté la concession de l'aéroport de Belgrade et qu'Alstom reste en lice pour le projet de métro.
Mais Alstom, dont les dirigeants accompagnent le président, est en concurrence avec un consortium chinois.
Les Balkans sont une pièce importante des "Nouvelles routes de la Soie", méga-projet de la Chine pour développer sa puissance économique. A coups de prêts à faibles taux, les Chinois multiplient les constructions d'infrastructures et les acquisitions industrielles dans la région.
Entre 2007 et 2017, Pékin a annoncé un total de 12 milliards d'euros de prêts dans les pays de la région, dont un tiers pour la Serbie