Les vaccins semblent d’ores-et-déjà en pénurie, arrivant au compte-gouttes en France et de fait dans les lieux de vaccination. Patrick Kanner espère que le gouvernement "dit la vérité aux Français". "Aujourd’hui, je crois qu’on est devant un gouvernement qui navigue à vue, qui n’a pas anticipé la situation, qui change de braquet en permanence", déplore le sénateur PS du Nord.
"On a ouvert une boîte de Pandore"
Pour lui, cela entraîne auprès des Français "une inquiétude" et "une anxiété". Lors de l'annonce faite aux élus sur l’ouverture de la vaccination aux plus de 75 ans, soit près de 6 millions de personnes en France, Olivier Véran a confirmé "qu’il y aurait 1 million de vaccinés à la fin du mois de janvier". "Bah, cherchez l’erreur", réagit l'élu. "On a ouvert une boîte de Pandore qu’on n’est pas capables de fermer parce qu’on a créé un espoir et, surtout, malheureusement, une illusion", regrette-t-il.
La distribution des vaccins dépend des contrats signés avec l’Europe qui prévoient une distribution par quotas, chose sur laquelle le gouvernement n’a pas forcément bien communiqué. Patrick Kanner estime que "c’était assumé par le gouvernement". Il rappelle que le début de la vaccination a été "très très très très lent, parce que le gouvernement savait qu’il n’avait pas les doses". Emmanuel Macron s’était même ému, dans le Journal Du Dimanche, de cette lenteur, déclarant qu’il fallait aller plus vite. "Donc, c’est de la navigation à vue", ajoute le sénateur.
"Tout faire" pour éviter un nouveau confinement
La France est depuis samedi sous couvre-feu à 18 heures sur l’intégralité de son territoire. Une mesure qui, pour le président du groupe socialiste au Sénat, "améliore les choses". Pourtant, "nous sommes toujours sur un plateau très haut, 23.000 contaminations par jour, beaucoup de personnes qui rentrent en réanimation, à l’hôpital, etc. Je pense qu’à ce stade, on peut s’interroger sur l’efficacité de cette mesure", estime Patrick Kanner.
Pour lui, si cette mesure est "utile", mais il faut se demander si "elle est suffisante". l'élu du Nord explique qu’il faudrait "tout faire" pour éviter un nouveau confinement, "mais tant qu’on est sur une vaccination aussi faible, une immunité collective aussi faible" la question du troisième reconfinement se pose.
"Je crains un automne sanglant"
L’Espagne a conservé ses restaurants ouverts et a un couvre-feu plus tardif, sans pour autant avoir plus de cas. "Est-ce que les gestes barrière sont plus respectés ?", se demande l’ancien ministre. "En tout cas, moi je me limite à notre territoire national, et on voit bien qu’on n’est pas bons", ajoute-t-il. Le nombre de cas en 24 heures est au-dessus de 20.000. "Ce n’est pas les 5.000 espérés par le gouvernement", souligne Patrick Kanner qui craint "qu’un troisième reconfinement se profile à l’horizon."
Une telle décision coûterait encore plus cher à l’économie, déjà durement affaiblie. "C’est déjà le cas", estime le sénateur PS. "Depuis un an nous vivons sur le ruissellement de la dette publique", souligne-t-il. La dette Covid devrait encore augmenter, selon lui. "On sait bien qu’on vit à crédit, aujourd’hui. Mais là, vous voyez, je ne jette pas la pierre au gouvernement : il fallait sauver l’économie, il fallait sauver les salariés et les Français". Mais maintenant se pose la question de "la suite". "Je crains un automne sanglant en matière économique et sociale", prévient l'élu.
"Un million et demi de jeunes vivent sous le seuil de pauvreté"
L'Ancien ministre de la Jeunesse et des Sports va défendre, au Sénat, le 20 janvier prochain, un projet de loi visant à ouvrir le RSA aux jeunes de moins de 25 ans, très touchés par la crise et exclus de cette aide sociale. Une ouverture que le gouvernement refuse. "On est sur un discours idéologique de la part du gouvernement qui est de dire ‘mais non, on ne peut pas offrir comme seule perspective à des jeunes qui arrivent dans la vie active le RSA’", note Patrick Kanner.
Un argument contre lequel il avance "l’urgence" alors que "un million et demi de jeunes vivent sous le seuil de pauvreté" en France. "30% des jeunes de moins de 25 ans sont touchés par le chômage ; ils n’ont plus de petits boulots à cause de la crise sanitaire ; qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ?", déplore le sénateur qui précise être dans "une démarche pragmatique". "Aujourd’hui, je préfère un RSA pour les jeunes de moins de 25 ans plutôt que les voir à la soupe populaire", se justifie l'élu.
Il tient toutefois à préciser que "c’est pour les jeunes qui en ont besoin" et non tous les jeunes. "Ce n’est pas un revenu minimum universel, c’est un revenu minimum pour ceux qui en ont besoin", corrige-t-il. "C’est quand même une vraie interrogation que la septième puissance mondiale soit amenée à ce que la jeunesse aille à la soupe populaire", ajoute Patrick Kanner.
"Le gouvernement ne fait pas beaucoup d'efforts pour que les régionales aient lieu"
Le président de la République souhaiterait organiser un référendum sur le climat. Une mesure inutile pour le sénateur socialiste, qui rappelle que "la charte de l'environnement intégrée par Jacques Chirac a une reconnaissance constitutionnelle". Par la simple application de l'article 89 de la constitution, "le gouvernement pourrait demander au Parlement d'intégrer cela par la voie du congrès", souligne l'élu du Nord pour qui le référendum est "une sorte de vote qu'espère Macron pour préparer sa campagne présidentielle". "Un risque énorme" pour Emmanuel Macron qui n'est pas à l'abri d'un refus.
Autres scrutins en discussion, ceux des élections régionales et départementales qui devaient initialement avoir lieu en mars 2021. Elles devraient être repoussées en juin prochain, mais Patrick Kanner déplore que "le gouvernement ne fait pas beaucoup d'efforts pour qu'elles aient lieu". Le probable futur candidat PS dans la région Hauts-de-France aimerait voir la mise en place "d'un vote par correspondance ou anticipés et de nouveaux moyens de communication pour remplacer les porte-à-porte et les marchés".
"C'est vraiment une loi de report au minimum que nous allons adopter", regrette-t-il en s'inquiétant du fait que "le gouvernement ne veut pas modifier le code électoral". "Il a vu le résultat catastrophique aux municipales, il sait qu'il n'y aura aucun président de département ou région qui serait de sa sensibilité politique", ajoute l'élu qui estime que l'exécutif souhaite "enjamber" cette étape.
Cliquez ici pour écouter "L’invité politique" avec Patrick Roger
Toutes les fréquences de Sud Radio sont ici !