C’est assurément une mesure qui ne fait pas l’unanimité parmi les Français. En proposant de fixer à 80km/h la vitesse maximale autorisée sur les routes nationales, le gouvernement sait bien qu’il s’apprête à affronter quelques semaines de vent de face. Invité du Grand Matin Sud Radio ce lundi, le président du Conseil départemental des Yvelines, Pierre Bédier, ne mâche pas ses mots sur ce sujet.
"Les routes à 80km/h ? Des décisions prises par des gens qui vivent dans les villes"
"Si on continue comme ça, moi j’ai une solution : 0km/h, et on laisse les voitures dans les parkings ! Ces décisions sont prises par des gens qui vivent dans les villes et qui peuvent monter dans un Uber quand ils veulent. Pour les gens qui vivent dans le péri-urbain ou à la campagne, la voiture est un instrument de travail ! Des gens mettent 1h30 pour venir travailler, en limitant les routes à 80km/h, vous leur rajoutez 10 minutes de temps de trajet. Ça fait donc 20 minutes par jour qu’on leur prend sur leur vie personnelle... Arrêtons d’embêter les Français !", martèle-t-il avant de répondre à Édouard Philippe, qui assume l’impopularité de cette mesure si elle permet de sauver des vies. "Il n’a qu’à interdire le tabac, ça tue infiniment plus ! Et si on doit interdire tout ce qui tue, il faut aussi interdire les exportations d’armes. Il y a plein de choses à interdire ! Ce gouvernement fait de la com’, et il le fait très très bien. Il monte donc dans les sondages, mais quand il s’agit de prendre de vraies décisions, on s’aperçoit que ça n’est pas réfléchi", pointe-t-il.
"Guillaume Pépy ? Il y a des préfets qui ont été virés pour moins que ça"
Pierre Bédier a également évoqué le cas de Guillaume Pépy, le patron de la SNCF convoqué ce lundi au ministère des Transports. "Si je dis vraiment ce que je pense, je vais me fâcher avec eux, donc je ne sais pas si ce serait très productif… Ça ne marche pas, la SNCF ne marche pas ! C’est une dure réalité. Les banlieusards préfèrent prendre le risque de prendre la voiture plutôt que prendre le risque de prendre le train. C’est quand même dingue ! (…) Guillaume Pépy est le chef, il y a des préfets qui ont sauté pour moins que ça. C’est au gouvernement de prendre la décision. Il n’est pas responsable des sous-investissements accumulés en région parisienne depuis 40 ans et de l’erreur stratégique d’avoir privilégié le tout-TGV, mais il y a une vraie question d’aménagement du territoire. Est-ce que la SNCF, en région parisienne, doit rester une société nationale ? Est-ce que ça ne devrait pas être une société métropolitaine ? L’État a été tellement mauvais, si on essayait les élus ?", propose-t-il.
"Il faut confier plus de pouvoirs aux départements et aux communes"
L’élu parisien a par ailleurs fait part de son opposition au projet de fusion de trois départements franciliens : les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne. "En région parisienne, il y a des choses qui marchent et des choses qui ne marchent pas. Le gouvernement propose de casser ce qui marche (les départements) pour renforcer ce qui ne marche pas actuellement (la métropole du Grand Paris). Nous sommes tous d’accords, de gauche comme de droite, pour dire qu’il faut une métropole puissante dans la compétition internationale, mais il faut une organisation pertinente au service des habitants et qui prenne en compte un truc tout bête : la démocratie locale. (…) Il faut que la métropole soit à l’échelle de la région, qu’on fusionne ces institutions et qu’on donne plus de pouvoirs stratégiques à la région, y compris des pouvoirs étatiques. Pourquoi privatiser Aéroports de Paris, par exemple ? Les élus ne pourraient-ils pas gérer cette société ? Est-ce normal que le président de la RATP, une société régionale, soit nommé en Conseil des ministres ? Confions plus de pouvoirs à la métropole, et que celle-ci confie des pouvoirs de terrain aux acteurs de terrains que sont les départements et les communes !", insiste-t-il.
Enfin, l’ancien Secrétaire d'État chargé des programmes immobiliers de la Justice (2002-2004) a envoyé un ultime petit message au gouvernement. "Nous devons représenter tous les territoires en souffrance. Le problème du gouvernement actuel, c’est que c’est le gouvernement des gens pour qui ça va plutôt bien. Mais dans une démocratie, il faut aussi s’occuper des gens pour qui ça va plutôt mal…", glisse-t-il.
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